Théâtre : « Allah Islah” gros succès à la FOL pour la première pièce de Youssef Lahrichi (Interview)

La pièce de théâtre « Allah Islah » de la compagnie « 19h théâtre » cartonne à Casablanca. À chacune de ses représentations à la Fédération des œuvres laïques (F.O.L.), la salle est comble, et le public séduit par la comédie qui aborde avec finesse l’éducation parentale. Le pitch ? L’histoire d’une famille marocaine vivant sous le joug d’un père autoritaire, persuadé qu’une extrême sévérité suffira à maintenir l’ordre dans son foyer. Résultat : son discours brutal flirte avec l’absurde… Le succès de la pièce est tel que deux dates ont été rajoutées : le 10 et le 23 février à 20h30. Derrière cette œuvre, un artiste : le photographe Youssef Lahrichi qui a pris pour la toute première fois la plume. Entretien.

On vous connaît davantage en tant que photographe que metteur en scène…
Effectivement, je fais de la photo depuis très longtemps et mes premières expositions remontent à 2014. En revanche, « Allah Islah » est ma toute première expérience dans l’écriture et la mise en scène. Je ne savais pas du tout comment allait être accueillie la pièce. Et à la fin de la première représentation au théâtre, cela a été un grand soulagement de voir la réaction du public qui a été emballé par le jeu des comédiens et la subtilité du texte.

Qu’est-ce qui vous a poussé à écrire cette pièce ?
Deux choses. Tout d’abord, lorsque nous avons créé en 2015 « 19h Théâtre », nous voulions dynamiser notre groupe qui est une bande d’amis faisant jusque-là des adaptations de textes en français. En fondant la troupe, nous voulions écrire nos propres textes en darija. J’ai alors pris l’initiative de me lancer en premier. Ensuite, le sujet qui m’est tout de suite venu à l’esprit, c’est celui de l’éducation au sein de la famille marocaine et du manque de communication. Pour moi, c’est un thème très important et qui me tient particulièrement à cœur. Car la petite famille est le noyau de la société. Et à travers ses dysfonctionnements de communication, il y a beaucoup de maux qui sont engendrés.

Pourquoi avez-vous choisi de traiter ce thème sous un ton humoristique ?
Pour que ce soit plus « digeste » pour le public. L’humour fluidifie les messages et capte l’attention du spectateur. Si j’avais traité ce sujet de manière frontal, j’aurais pu tomber dans le sermon que nous avons déjà entendu et que nous n’avons pas envie d’entendre à nouveau.

Pouvez-vous nous donner un exemple de scènes dans votre pièce qui illustre avec humour l’incohérence de cette éducation au sein de la famille ?
À un moment donné dans la pièce, l’une des filles souhaite avouer à son père qu’elle entretient une relation amoureuse avec un homme. Pour elle, c’est quelque chose de tout à fait normal et innocent. Dans ce passage, le spectateur voit d’un côté comment la jeune fille essaie de communiquer, et de l’autre, la manière dont cela est accueilli par le père. S’ensuit une scène cocasse. Car le père qui refuse d’admettre la relation de sa fille, se permet lui d’être… infidèle. Il se retrouve assis sur le même tabouret que sa fille et reprend le même discours amoureux pour impressionner sa maîtresse. A ce moment-là, on comprend comment vit cette famille, et c’est plutôt marrant.

D’où vous est venue l’inspiration ?
Ce sont des scènes de vie vues autour de moi. Je vois des familles qui ont souffert ou qui souffrent encore de ce type d’éducation. Par exemple, quand j’étais plus jeune, j’avais un camarade de classe qui avait pour père, un ancien flic, qui connaissait par cœur son emploi du temps, tous ses amis, et venait même le récupérer à la sortie du lycée. Mais ce garçon était en fait le gars qui faisait le plus de bêtises, alors qu’il était celui qui était le plus surveillé ! Je pense que c’est classique : lorsqu’on est sous-pression, à la moindre petite brèche, les conséquences peuvent être catastrophiques.

Pourquoi avoir fait le choix d’écrire en darija ?
Pour toucher un public plus large. Avant, nous avions l’impression de nous adresser à une tranche minime de la société car tous les Marocains ne parlent pas français. En plus, nous ne pouvions pas traiter le thème choisi dans cette pièce en français parce c’est un sujet typiquement marocain. Même si les problèmes de communications existent partout, la manière dont nous l’avons abordé reste très liée à notre société.

Vous avez encore deux représentations à Casablanca, mais n’avez-vous pas envie de continuer à faire « vivre » cette pièce qui a un succès fou ?
Oui. Nous avons joué cinq fois à Casablanca, et nous avons toujours autant de demandes. Notre souhait est de jouer le maximum possible. D’ailleurs, nous serions ravi d’interpréter cette pièce dans d’autres villes, et pourquoi pas dans les écoles, encore faut-il que les parents soient prêts à accepter le texte car il vise clairement le comportement des parents. Dans tous les cas, notre objectif est de toucher un public bien plus large. Mais notre troupe n’a pas assez de moyens pour se permettre de lancer une tournée. Nous n’avons pas de producteur derrière. « Allah Islah » est une autoproduction. Mais nous ne désespérons pas, nous espérons obtenir suffisant d’aides pour pouvoir jouer un peu partout.

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