Iman Oubou a décroché le titre de miss New York en 2015 et la deuxième place au concours miss USA. Depuis, cette Américaine originaire du Maroc est à la tête du media en ligne Swaay et bien décidée à écraser de son talon tous les préjugés sexistes dont les femmes sont victimes. Car on peut très bien être à la fois glamour et leader.
Que retenez-vous de vos expériences de miss ?
Ces expériences m’ont aidée à avoir davantage confiance en moi, un meilleur équilibre ainsi que des ambitions d’un niveau supérieur. Contrairement à ce que la plupart des gens pensent, les concours de beauté sont très difficiles. Il faut beaucoup de détermination, de dévouement, de discipline, de travail et de préparation mentale pour être capable de monter sur scène devant des centaines de personnes et pour présenter la meilleure facette de nous devant l’auditoire et les juges. Même si nous savons que la perfection n’existe pas, dans les concours de beauté, elle doit être partout : physiquement, mentalement et émotionnellement. Après tout le travail que j’ai fourni pour arriver à décrocher ces deux titres, j’ai eu l’impression d’être devenue invincible et je me suis dit que si j’étais capable de concrétiser ce rêve, je pouvais réaliser tout ce qui me passait par la tête. De nouveaux horizons s’ouvraient donc à moi comme la possibilité de construire un empire médiatique qui change la façon dont les femmes sont dépeintes. Et c’est ainsi qu’est né « Swaay », ce media en ligne qui casse les stéréotypes sur les femmes et met sur le devant de la scène entrepreneuses et dirigeantes.
Vous avez créé votre blog « Entrepreneuse en vogue » et « Swaay », un média en ligne pour aider les femmes entrepreneurs et casser les stéréotypes. Ça pèche aussi aux Etats-Unis dans ce domaine ?
Il y a beaucoup d’initiatives prises pour aider les femmes entrepreneuses mais il n’y a pas de plateforme médiatique axée sur l’entrepreneuriat féminin qui s’adresse aux femmes « fonceuses », modernes, et qui n’ont qu’une hâte, celle de devenir leur propre patron. La plupart des publications se focalisent sur leur apparence. Il y a peu de choses axées sur l’auto-développement, les conseils pratiques ou du contenu intelligent qui apporterait une valeur ajoutée à des femmes qui sont arrivées à des postes de direction.
Les Etats-Unis est le pays où il y a le plus de femmes patrons. Il y a eu un véritable boom entre 2007 et 2012 de l’ordre de 27%. Comment cela s’explique-t-il ?
Internet a permis à tout un chacun de transformer ses rêves en réalité. Les femmes sont extrêmement créatives. Et grâce à Internet, elles peuvent mettre à profit leur créativité pour gagner de l’argent. Des études ont montré que lorsque des femmes ont des enfants, il est souvent plus difficile pour elles de réintégrer le marché du travail. C’est pourquoi la plupart d’entre elles se tournent vers l’entrepreneuriat. C’est l’idéal pour à la fois gagner sa vie et passer du temps avec sa famille, sans être restreint par les jours de congé limités ou le congé maternité.
Quelles sont les difficultés auxquelles font face ces femmes qui pourtant sont de plus en plus nombreuses à se lancer dans l’entrepreneuriat ?
Le financement et le “mentorship” sont les deux grands défis auxquels les femmes entrepreneurs sont confrontées quotidiennement. Même s’il y a de plus en plus de femmes dirigeantes, on constate qu’il y a encore un grand écart entre les sexes dans les entreprises, même dans celles fondées par les femmes. Les stéréotypes sexistes ont la dent dure. Encore aujourd’hui, les hommes ont plus facilement accès au coaching que les femmes et ils ont aussi davantage de modèles. D’où ma volonté d’augmenter la représentativité des femmes entrepreneurs dans les médias.
De quelle manière les aidez-vous ?
Swaay est en train de devenir la principale publication qui donne une voix aux femmes. Nous mettons en lumière des femmes ordinaires qui font des choses extraordinaires. Et elles ont osé défier les stéréotypes, ce qui va forcément inspirer d’autres femmes. Dans Swaay, on trouve des articles traités en profondeur comme des analyses qui vont aider nos lectrices à prendre les bonnes décisions au sujet de leur entreprise, mais aussi dans leur vie.
Avez-vous des projets avec des entrepreneuses marocaines ?
J’aimerais lancer un Maroc Swaay et engager une équipe (rédacteur en chef et journalistes) qui puisse retranscrire les histoires de ces femmes d’affaires qui ont réussi au Maroc. Il faut inspirer les jeunes pour qu’elles aient envie de devenir les dirigeantes de demain dans notre pays. Je n’ai pas encore de détails précis à vous donner mais je discute avec des Marocaines qui sont en train de construire une communauté de femmes chefs d’entreprise dans le pays. Nous sommes en train de créer du contenu. Je vous avoue que je crois beaucoup à l’expression: « Vous ne pouvez pas devenir ce que vous ne pouvez pas voir ». Je reste donc persuadée que pour que les jeunes femmes marocaines deviennent des entrepreneuses, elles ont besoin de voir plus de femmes dans leur pays qui atteignent les sommets et assument des rôles de leadership. C’est vraiment important.
Quels sont les freins ici au Maroc auxquels sont confrontées les entrepreneuses ?
Je n’ai pas vécu assez longtemps au Maroc pour pouvoir répondre. Je suis sûre que l’entrepreneuriat est très différent. Aux USA, tout est possible, même si le sexisme n’a pas disparu. Je pense que nous avons beaucoup plus de travail à faire au Maroc pour uniformiser les règles du jeu au sein des affaires pour les femmes. C’est pour cette raison que je cherche un partenariat avec des femmes d’affaires marocaines afin d’en savoir davantage sur les défis particuliers qui les touchent et comprendre comment les pousser vers une communauté de femmes qui va à la fois les soutenir mais aussi les aider à se renforcer.