Carpet of Life, le projet qui transforme la vie des femmes de M’Hamid El Ghizlane

Carpet of Life est la marque de tapis Boucharouette, née d’une rencontre en 2012 entre deux sœurs belges et quatre femmes habitant M’Hamid El Ghizlane, dans la province de Zagora. Aujourd’hui, ce projet emploie 61 femmes qui ont vu leur quotidien littéralement bouleversé.

C’est à l’occasion du festival Taragalte, organisé du 27 au 29 octobre 2017 à M’Hamid El Ghizlane, que la rencontre a eu lieu. Ce rendez-vous au cœur du désert marocain a mis à l’honneur les femmes africaines, notamment sahraouies. Il était donc impensable pour les organisateurs, les frères Sbai, de ne pas inviter les femmes de Carpet of Life, une marque de tapis Boucharouette. Sa particularité ? Un projet maroco-belge qui soutient les femmes, l’économie locale et un savoir-faire ancestral, comme l’ont mis en avant les initiatrices du projet, les deux sœurs Marion et Hendrikje, âgées respectivement de 27 et 29 ans, accompagnées de leur quatre coordinatrices locales appelées aussi “Project leader”, Zineb, Meryem, Nazha et Zahra. Concrètement, la marque est basée à Gand en Belgique tandis que la production est réalisée à M’Hamid El Ghizlane et ses environs. C’est dans cette oasis, à l’entrée du désert, que les tapis Boucharouette sont fabriqués à partir de vieux vêtements déchirés et autres chiffons recyclés. “Nous avons démarré en 2012 avec seulement quatre femmes dont Zineb”, se remémore Marion. Aujourd’hui, au regard du succès engendré, l’équipe s’est agrandie. Désormais, 61 femmes y travaillent, dont 57 qui se consacrent au tissage.

Un savoir-faire enfin rémunéré

Ce travail est une aubaine pour ces femmes habitant dans la province de Zagora où le taux de chômage reste élevé (16,3% dont 44,2% pour les femmes d’après le Recensement général de la population et de l’habitat de 2014). Un chiffre important qui contraint certaines familles ou hommes à l’exode rural. “Quand nous sommes venues pour la première fois à M’hamid El Ghizlane et que nous avons vu ces femmes fabriquer des tapis en utilisant un tel savoir-faire, transmis de génération en génération, nous avons été estomaquées. Et notre étonnement a été encore plus grand, lorsque nous avons appris qu’au final, elles ne gagnaient presque rien”, raconte Marion. Les deux sœurs ont alors voulu y remédier. “Nous avons chercher à connaître le revenu gagné par les intermédiaires qui vendent les tapis à Marrakech, afin de doubler cette somme pour nos artisanes”, développe-t-elle. Résultat : chacune touche entre 300 et 500 DH par tapis vendu (taille moyenne), sachant qu’elles sont quatre à y travailler. “Lorsque nous avons une commande, elles sont à l’atelier près de 4h par jour, tient à préciser Zineb. Car elles s’occupent aussi du ménage dans leur foyer, des repas, des enfants, et font également de la cueillette ou cultivent des parcelles de terre.” En bref, ces femmes n’arrêtent pas, et surtout ne se plaignent jamais, tout comme les coordinatrices locales, qui, elles, perçoivent un salaire de 1.200 DH par mois. Zineb, Meryem, Nazha et Zahra gèrent chacune un petit groupe de femmes et sont à même de résoudre le moindre problème sur place. En effet, au fil des mois, ces trentenaires ont pris de l’assurance, au point qu’aujourd’hui, rien ne semble les effrayer.

Des Superwomen reconnues

Au sein de leur foyer, les femmes de Carpet of Life ont automatiquement pris du poids. “C’est moi qui subviens aux besoins de ma famille, lâche Zahra, 30 ans. Mon père est décédé il y a quelques années. Depuis, mes quatre sœurs et moi vivons seules avec notre mère. Seule Najat, ma sœur aînée, a quitté le foyer. Elle s’est mariée et a rejoint son époux à Marrakech. Elle était l’une des coordinatrices de Carpet of Life, et lorsqu’elle est partie, j’ai pris la relève.” Pour Zahra et les siens, grâce à Carpet of Life, les angoisses des fins de mois ne sont plus que de mauvais souvenirs. “Nous pouvons nous acheter davantage de nourriture et de vêtements”, assure-t-elle. Quant à Zineb, son salaire lui permet d’aider sa mère malade. “Je peux lui acheter des médicaments et lui payer son séjour à l’hôpital à Marrakech prévu tous les six mois pour y effectuer une série d’examens, explique cette jeune mariée de 34 ans, alors qu’avant, c’était un véritable casse-tête.” Même si Zineb est la seule des quatre coordinatrices locales à être mère, toutes épargnent pour que leurs futurs enfants aient un meilleur avenir que le leur. “Nous avons dû arrêter les études faute de moyens”, souffle Meryem, 29 ans, qui a effectué deux ans d’études d’anglais à l’université. Des propos qui résonnent pour les autres femmes qui hochent spontanément la tête. Mais, elles ne regrettent pas, pour autant, leur vie d’aujourd’hui. Loin de là. “Mon avenir, je le vois avec Carpet of Life, lâche Zineb. J’aimerais bien voyager en Europe pour partir à la rencontre de potentiels clients, et faire du marketing.” Et Marion d’en profiter pour enchaîner : “Ma sœur et moi, nous ne pouvons pas être systématiquement au Maroc pour faire la promotion du projet. Les quatre coordinatrices locales sont là pour prendre le relais. Et elles s’en sortent à merveille ! Elles ne sont pas stressées et répondent facilement aux questions posées. Leur empowerment est incroyable !” Depuis le début, Marion et Hendrikje ont souhaité que Carpet of Life ait un impact, social et économique, d’envergure au sein de la communauté féminine de M’Hamid El Ghizlane. Le pari est incontestablement gagné, et l’aventure va monter en puissance. “On souhaite que Carpet of Life se développe. On veut élargir notre collection, en collaborant notamment avec des magasins qui misent sur le recyclage”, prévient Marion qui compte, en fait, investir dans l’avenir d’un nombre plus élevé de femmes. 

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