Siham Benchekroun : “Mon livre est une satire sur le développement personnel”

Médecin psychothérapeute et écrivaine engagée, Siham Benchekroun présente son nouveau roman « J’avais si faim d’amour que je me suis fait des pâtes » (Edition Les Rirosophes) , une satire désopilante des excès et dérives du développement personnel . Entretien.

Pourquoi ce livre ? Et quelle approche avez-vous adopté ?

Ce livre est un roman humoristique qui, à travers les aventures d’une femme naïve et sentimentale, se moque (gentiment) de l’obsession culturelle grandissante pour la quête et l’amour de soi. Celle-ci s’est propagée dans le sillage d’un ensemble de méthodes et d’approches qu’on appelle “le développement personnel”, devenu ultra populaire, et vanté dans le monde entier pour « ses bienfaits ». Cette démarche promet en effet de nous aider à nous épanouir en nous donnant les clefs pour améliorer la qualité de notre vie et réaliser nos aspirations profondes… Sauf que, comme la protagoniste de mon roman, lorsqu’on y entre sans sagesse, on entretient progressivement une sorte de mentalité auto-centrée avec, hélas, des dommages collatéraux. En d’autres termes, on s’enferme dans un égocentrisme stérile au détriment de ses liens aux autres ! Autre point critique : la marchandisation. Certains individus non qualifiés exploitent la vulnérabilité des gens en faisant la promotion de tout et de n’importe quoi.  Ainsi entre le nombrilisme d’un côté et le charlatanisme de l’autre, ces dérives m’ont inspirée l’écriture de ce livre satirique. Je le crois drôle mais pas méchant, plutôt bon enfant. L’humour me paraît une voie royale pour transmettre des messages.

Pour vous, le développement personnel est-il une simple mode ou répond-il à un réel besoin au sein d’un monde sous pression constante ?

Ce serait une vue simpliste de réduire le développement personnel à une simple mode passagère. Dans un monde où les exigences sociales sont fortes, beaucoup parmi nous doivent faire face à un stress continu, des relations compliquées, une concurrence agressive, et à un déséquilibre entre leur vie privée et leur vie professionnelle. C’est pourquoi les outils et les ressources permettant une amélioration de la qualité de vie ont autant d’intérêt et d’attraits. Il n’empêche qu’il y a aussi, très nettement, des mimétismes, des imitations et des effets de mode dans cet engouement…

Alors même que l’essence de ce processus est louable, comment expliquez-vous ses dérives ?

Les excès et les dérives sont inévitables dès qu’on est dans du business. Et c’est le cas ! Il faut bien reconnaitre que le développement personnel a contribué à l’essor d’une véritable « industrie du bien-être ». C’est un marché très lucratif, avec une multitude de produits. Il y a également une invasion de concepts ésotériques ainsi qu’une prolifération des formations (programmes de coaching, certifications de thérapeutes et autres variantes). L’offre y est si pléthorique et la demande si importante que tout le monde semble se mettre à devenir thérapeute, coach, guide, ou mentor… d’ailleurs, souvent, en reconversion professionnelle. Je ne veux pas généraliser pour autant : certaines formations sont très sérieuses, avec un haut niveau d’exigence, mais d’autres sont sommaires et ne peuvent prétendre former des thérapeutes capables de reconnaître et d’accompagner des personnes en profonde souffrance. Les risques de dérive sont également liés aux besoins des clients eux-mêmes. Beaucoup veulent avoir des résultats importants mais rapides et faciles. Rajoutez à cela que nous sommes dans une époque où la quantité d’informations est écrasante. Les conseils en développement personnel abondent avec un simple clic. Comment ne pas se perdre quand on souffre et qu’on n’est pas averti ? Comment avoir du recul, prendre de la hauteur, sortir du groupe quand un discours devient prédominant ? Symi, mon héroïne, se sentait bête et hors-jeu face à ses copines qui avaient fait des stages divers et variés…

Comment se réapproprier son développement personnel ou tout simplement sa rétrospection ? 

Il est indispensable de garder un esprit critique, du bon sens, faisant preuve de discernement dans le choix des ressources et des praticiens du développement personnel.  Il faut également garder pour base des valeurs authentiques. Ne vous focalisez pas sur vous de façon extrême. Souvenez-vous que vous n’êtes rien sans les autres, que personne ne peut pas “s’épanouir” en méprisant son entourage, en rompant avec tous ceux qui nous sont désagréables.  On ne peut pas s’aimer sans, réellement, sincèrement, aimer les autres. C’est le message principal de mon livre. Car bien que le développement personnel implique une croissance individuelle, celle-ci reste illusoire si on néglige les relations interpersonnelles et l’engagement envers la société. Les dérives se produisent lorsqu’il n’y a plus qu’une motivation égocentrique et individualiste, qui ignore autrui  et l’impact sur le monde qui nous entoure.

 

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