Zakaria Aït Wakrim et les portes de la perception

Dunes roses et lagons bleutés, noir et blanc brut ou infrarouge irréel : Zakaria Aït Wakrim n’est pas un photographe comme les autres. étudiant en école d’ingénieur spécialisé dans l’optique, il a déjà à son actif de nombreuses séries de photographies déroutantes. Rencontre avec un œil plein d’avenir.

Vous n’avez pas étudié la photographie mais l’ingénierie de l’optique. Comment avez-vous commencé cette incroyable aventure photo ?

Zakaria Aït Wakrim : Faire de la photographie m’a été salutaire. Durant mon cursus d’ingénieur, je me suis rendu compte que devoir être toujours très rigoureux, systématique, carré, était source d’angoisse. Je sentais que mon moral se détériorait rapidement et qu’il me fallait une compensation. J’avais un besoin vital de m’exprimer en dehors des cadres. C’est lors de mes cours d’optique que j’ai eu l’idée de me lancer dans la photo et de m’intéresser au langage visuel.

Comment avez-vous introduit ce langage visuel dans votre art photographique ?

C’est grâce à mes amis étudiants en psychologie que je me suis penché sur ce langage non verbal, celui transmis par les images et les énergies et qui rassemble tout ce qui n’est pas objectif. Personne n’a un œil objectif : nous regardons tous à travers le prisme de notre culture, de notre éducation, de notre vécu, de notre conscience. Ceci est très abstrait, presque philosophique. Je voulais vraiment aborder et comprendre les barrières de la perception humaine en commençant ce travail photographique. Quand j’entends des gens dire qu’une couleur est “naturelle” par exemple, cela m’embête. Naturelle pour qui ? Pour eux? C’est faire preuve d’arrogance que de croire que tous les êtres vivants voient la même chose, les mêmes couleurs et ont la même perception au même instant.

Pourquoi avoir voulu modifier totalement cette perception “normale” ?

En cours d’optique, on pouvait travailler avec des spectres chromatiques aussi “naturels” que celui de la lumière blanche. Grâce à ce travail, j’ai pu me rendre compte que l’on pouvait “voir” des objets très différemment à travers ces différents spectres. D’ailleurs, certains animaux n’ont pas le même spectre de vision que les humains, notamment les serpents. J’ai donc choisi le spectre infra-rouge pour son lien avec la température et l’esthétisme de son rendu.

Est-ce compliqué à réaliser ?

Sur le plan technique, j’ai remplacé le filtre infrarouge (IR) de mon appareil par un filtre qui fait disparaître certaines couleurs. Je ne retouche jamais mes photos mais je les édite parfois en enlevant un peu de rouge.

Ce n’est pas de la photo classique. Comment définiriez-vous votre art dans la série “Irology” ?

C’est une sorte de sculpture photographique. J’aime ces résultats un peu fantasmagoriques, irréels mais finalement réels aussi. Je voulais ainsi créer un choc “chromatique”. Qui peut dire ce qu’est la réalité visuelle ? Personne ! C’est juste une autre manière de regarder les choses. J’ai souhaité la montrer à travers  des paysages marocains très épurés comme le désert. Là-bas, avec le climat très sec, on peut presque sentir la lumière sur la peau.

Avez-vous eu des difficultés techniques ?

Bien sûr : le désert est un milieu difficile à photographier car la photo peut basculer en un instant à cause du vent, du sable ou d’une moins bonne lumière. Il faut parfois rester plusieurs heures au même endroit pour prendre une bonne photo. D’ailleurs, j’ai souvent besoin de cinq prises pour en avoir une bonne. Mais lorsque cela réussit, le résultat est probant. Parfois, je pense avoir pris un cliché avec une certaine lumière ou un certain effet mais lorsque je regarde mes photos le soir, ce n’est pas du tout ce que j’attendais. Avec l’expérience, j’ai appris à introduire des paramètres différents ou à travailler l’ouverture du diaphragme de l’appareil…

Y a-t-il un photographe qui vous a inspiré cette méthode de travail ?

Un jour, je suis tombé sur une série de Richard Mosse réalisée au Congo avec le spectre infrarouge. La différence majeure, c’est que ses photos relataient un conflit de guerre. J’ai trouvé que le spectre rendait le conflit encore plus dramatique, plus poignant et plus saisissant.

Après l’étonnante série “Irology”, quel est votre prochain projet ?

Je réfléchis à une série sur le thème de la maladie. Depuis qu’on a diagnostiqué un cancer à mon père, je m’interroge beaucoup sur la question de l’identité du malade et sur la signification de cette phrase : “Je suis malade.” Elle contient une dimension temporaire et identitaire. Comment les patients se (re)construisent-ils avec, puis sans la maladie ? Ce sont des questions que j’aborderai à travers des portraits de patients.

Sur votre site, vous parlez de la lumière comme de la clé des émotions, du témoin de l’existence, du lien direct avec le divin. Pourquoi vous fascine-t-elle autant?

Elle est, selon moi, à la base de tout. On admire le scintillement des étoiles ou la lumière qui émane de quelqu’un. Nos consciences la transforment en émotions et en humeurs. La photo n’est que le témoin de ce rendu, instantané de lumière, onde d’énergies et de particules qui fait que nous sommes ce que nous sommes. éclairer un paysage, un objet ou une personne, c’est les rendre “perceptibles” grâce à la lumière et durant un temps très court. Dans l’art lyrique de la photographie, on revient à l’essence de l’existence. On entre “dans” les choses et les personnes durant un tout petit instant.

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