Khadija Alami Un 7ème art sur mesure

Elle est en charge de presque toutes les productions américaines tournées au Maroc. De consécration en consécration, Khadija Alami est à la hauteur des ambitions cinématographiques du pays. Mais le plus important dans tout ça, c’est qu’elle s’éclate comme pas deux.

Azemmour. Dernier jour de tournage de Tilita A Soulima. L’équipe est rompue de fatigue mais satisfaite. Plus que quelques scènes à caler et le tour sera joué. Khadija Alami donne ses instructions pour les séquences de nuit. Elle sait que dès que les caméras seront en marche, une foule de curieux viendra s’agglutiner autour du site et qu’il faudra alors veiller à ce que personne ne soit déconcentré. Le film s’annonce prometteur, c’est pour cette raison qu’elle a eu envie de s’investir. De son avis, ce court-métrage signé Ayoub Layoussifi marquera les esprits. “Ayoub est comédien à la base mais il planche sur ce projet depuis maintenant trois ans. Son script m’a convaincue alors je me suis engagée à ses côtés”. La productrice a développé un véritable flair. Elle a eu 30 ans pour faire ses preuves et planter sa loge dans un monde essentiellement masculin.

On ne parlera pas de passion ou d’affinités avec le cinéma dans un premier temps mais de hasard. Une rencontre impromptue entre une jeune fille ordonnée et une carrière pleine de fantaisies. “J’étais étudiante en économie et comme tous mes camarades, je me préparais à devenir expert-comptable ou employée de banque. Le destin en a décidé autrement. La phrase en elle-même sonne comme le début d’une fiction. J’avais l’habitude de faire de l’équitation durant mes vacances d’été. Un après-midi, j’arrive au club et je vois ce cheval magnifique. Je demande ce qu’il fait ici et on m’explique qu’il va servir pour le tournage de L’étalon noir. L’homme qui me dit ça ajoute que l’équipe d’un autre film est à la recherche de jeunes stagiaires et m’encourage à postuler. Il s’agissait de Spies like us de John Landis. J’ai suivi ses conseils et j’ai été recrutée.” Première expérience au bas de l’échelle. Elle apporte le café, fait des photocopies, sert d’interprète et accessoirement de chauffeur. Khadija Alami est à mille lieux de se douter qu’un jour, ce sera à son tour de donner des ordres. Pour l’instant, elle débute et ce qu’elle découvre lui plaît suffisamment pour lui donner envie de recommencer.

K.ALAMI.Sife.ElAmine

Reconversion et lucidité

La magie du cinéma opère déjà sur l’étudiante cartésienne. La magie et l’éphémérité aussi : “lorsqu’on finit, on remballe tout comme s’il ne s’était jamais rien passé. Du jour au lendemain, les gens s’en vont, les décors et le matériel disparaissent. C’est frappant.” Juste après L’étalon noir, elle est de nouveau sollicitée comme assistante pour Ishtar, une comédie mêlant Warren Beatty, Dustin Hoffman et Isabelle Adjani. On est en 1986. Elle est toujours aussi grisée par l’ambiance des plateaux mais un évènement familial douloureux l’oblige à faire un break. “Quand j’ai perdu mon père, j’ai pris une claque en comprenant qu’il n’y a pas de place pour l’émotionnel dans ce domaine. Le monde ne s’arrête pas de tourner parce que vous êtes mal ou que l’un de vos proches n’est plus. Vous devez continuer à faire ce que l’on attend de vous et ne surtout pas faillir. J’ai donc pris le large pour panser mes plaies. Il m’a fallu six ans. Six ans durant lesquels j’ai travaillé dans un cabinet d’experts-comptables.” Ce retour aux sources est néanmoins une bonne chose. Grâce à lui, Khadija Alami prend conscience de ce qu’elle veut réellement faire et de comment elle veut le faire.

Le succès au rendez-vous

Elle se dirige à nouveau vers le 7ème art mais en tant que coordinatrice cette fois. Cela lui ressemble davantage. En 1994, alors qu’elle gère le tournage au Maroc de la série Young Indiana Jones, le producteur lui fait une remarque inattendue. “C’est le moment pour toi d’avancer.” Une petite phrase qui a pesé de tout son poids par la suite. Khadija s’engage sur trois projets supplémentaires et cinq ans plus tard, elle crée sa boite de production, K Films. Riche d’une longue expérience et jouissant d’une très bonne réputation, elle devient vite celle à qui l’on fait appel pour les films étrangers tournés dans le Royaume. “C’est un petit milieu où tout se sait très vite. Donnez satisfaction et la nouvelle se répandra comme une trainée de poudre. La règle est valable dans l’autre sens. Mon nom s’est mis à circuler et de plus en plus de gens m’ont contactée”. Elle mise aussi sur la prospection. Ses étés, elle les passe à écumer les grands studios de Los Angeles, New York ou encore Londres, promouvant son entreprise et son pays. Khadija Alami ne laisse rien au hasard. La production n’est pas une affaire de chance, mais de travail acharné et de démarchage.
CV impressionnant (Capitaine Phillips, Honorable Woman, The Night Manager, Our Kind of Traitor…), courts et longs métrages à la pelle, trophée pour l’ensemble de sa carrière lors du FIFM 2014, projets en cours. On ne chôme pas de son côté ! En véritable workaholic, Khadija Alami aime l’effervescence liée à son activité, le rush et les missions impossibles. Généralement, tout cela est ponctué d’anecdotes et de souvenirs marquants, comme ce fameux jour où elle s’est retrouvée à courir sur un tarmac pour décharger les bobines d’un avion. “J’étais encore très jeune à l’époque et un matin, les pilotes qui bossaient pour nous étaient tellement fatigués qu’ils ont refusé de se lever. L’un d’eux m’a tendu les clés du coucou, m’invitant à aller récupérer mes pellicules dans la soute. Je les ai prises avant de foncer tête baissée en direction de l’aéroport. Sur le coup, je n’ai pas réalisé à quel point c’était absurde et dangereux. Heureusement qu’un des agents de sécurité s’est interposé, m’empêchant d’aller plus loin. Dans le feu de l’action, on ne réfléchit plus.” C’est ce que disent tous les grands amoureux pour justifier les folies dont ils sont capables. Seconde nature d’une femme rangée…

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