Imad et Swel Noury Le talent démultiplié

En signant la troisième partie de la saga "Elle est diabétique, hypertendue et elle refuse de crever", Imad et Swel Noury reprennent le flambeau de leur père et nous livrent une comédie décapante agrémentée de gags et de quiproquos croustillants. Bienvenue dans l'univers appâtant de nos "Cohen brothers" nationaux...

Laissé sur sa faim après le succès phénoménal de la première et deuxième partie de la saga “Fiha Lmelha w sekkar wmabghatch tmout”, le public s’attendait à une suite logique : la continuité de la double vie que Najib est contraint de mener entre son épouse et sa maîtresse. A notre grande surprise, les Noury brothers n’ont pas été du même avis. Résultat : un produit déjanté, des mises en scène farfelues et des interprètes plus décoincés que jamais. L’histoire loufoque et le contexte burlesque y sont pour beaucoup. Les scènes se déroulent dans un somptueux complexe hôtelier où Lhajja Fakhita, toujours aussi despote et d’humeur massacrante, décide de s’offrir un séjour détente, escortée par son major d’homme Brahim. Sur place, elle tombe sous le charme de Kamal, un énigmatique trafiquant de drogue séjournant à l’hôtel dans le dessein d’y réaliser une transaction. Petit bémol, ce dernier n’a d’yeux que pour la  pulpeuse Leila qui, ironie du sort, n’est autre que la maîtresse de Najib, le gendre de Lhajja Fakhita. Jusque-là, tout va bien. Mais la situation se complique quand un incident de taille s’invite à cette amourette triangulaire : par un pur hasard, la mamie râleuse se retrouve en possession d’un sac rempli de cocaïne appartenant au dealer ! Commence alors une série de rebondissements hilarants dans un univers digne d’une bande dessiné. Dans cette troisième partie, les frères Noury ont abandonné leur registre habituellement sombre et ténébreux pour nous livrer une comédie mise en scène dans une identité visuelle bariolée, tout en ne ménageant aucun effet pour amuser la galerie. Une recette qui semble ne pas faire  l’unanimité, à en croire l’accueil défavorable que le film a reçu de la part des critiques. Pour Mohammed Bakrim, critique de cinéma,  “Imad et Swel sont de vrais cinéastes, très doués et très professionnels, mais l’entrée par la comédie ne leur a pas été une voie salutaire. Une occasion ratée comme ailleurs, dans d’autres domaines… Les frères Noury rate cette comédie comme un Messi rate un penalty.” Du côté du public, la perception de cette comédie reste assez mitigée. Entre ceux qui adhèrent et ceux qui n’accrochent pas, les deux clans font match nul. Au cinéma depuis fin septembre, “Elle est diabétique, hypertendue et elle refuse de crever 3” continuebde faire parler. Une étape de taille,bcomme diraient les optimistes, dans toute aventure cinématographique.

FDM : Après la première et deuxième partie de la saga “Elle est diabétique, hypertendue et elle refuse de crever”, votre père, Hakim Noury, vous passe le flambeau. Est-ce que cela vous a mis la pression ?
Swel et Imad : Pas du tout. Déjà, il ne s’agit d’aucun flambeau mais d’un challenge. Nous nous mettons nous-mêmes la pression et essayons de sortir le meilleur de nous dans la mesure où nous sommes très perfectionnistes. On a toujours été comme ça et on se sent confortables dans ce genre de situations. La saga est importante dans l’histoire du cinéma marocain et pour notre père. Il nous a donc juste offert la possibilité de le faire en nous accordant toute sa confiance.

Le film est tourné dans un style coloré et dans un univers décalé. Comment vous êtes-vous exprimés dans ce nouvel opus ?
Le film est très coloré, en effet, mais aussi très contrasté et avec une touche de bande dessinée. Depuis le début, il a été conçu comme une BD, que ce soit au niveau de l’image, des personnages ou des effets sonores. Tout est renforcé. C’était l’approche que l’on voulait donner au film, et que nous trouvons propice. De toute façon, il a toujours été nécessaire de nous exprimer à travers le visuel et pas uniquement via le scénario. On y croit fort et ce n’est pas près de changer. S’il existe des moyens techniques pour filmer, pourquoi ne pas les exploiter ? Ce qui ne veut pas dire que l’on n’aime pas d’autres types de film, bien au contraire.

Vous travaillez habituellement sur des registres sombres et sérieux. Pourquoi ce changement de cap ?
Disons que nous sommes des gens heureux qui adorons les registres sérieux et sombres, voire même très sombres. On se sent à l’aise dans le drame, et il est clair qu’on y reviendra. Et parce qu’on aime trop le cinéma pour dévaloriser d’autres genres, on a voulu toucher un autre terrain, et on en touchera probablement d’autres dans de prochains films…

Vous êtes-vous rapidement retrouvés dans la comédie ?
Oui. Beaucoup de nos films favoris sont des comédies. On les aime surtout lorsqu’elles sont noires et absurdes ; mais on adore aussi celles du genre “American Pie”. Du coup, ce n’est pas comme si on s’attaquait à une chose qui nous  st totalement étrangère. Avant tout, on fait un film. Quel film, ça, c’est une autre histoire ! Beaucoup de gens pensent que la comédie est plus facile que le reste, mais elle est bien plus complexe qu’elle n’y paraît…

Pourquoi votre père est-il présent dans tous vos films ?
Tout simplement parce qu’on adore ce qu’il dégage, qu’il est bon et que c’est un plaisir de travailler avec lui. Depuis notre premier court-métrage en 1999, il est présent dans nos films. Il a l’intelligence suffisante pour se laisser diriger et en plus, il est réalisateur c’est-à-dire qu’à l’heure de travailler, il sait rester à sa place ; ce qu’on ne retrouve malheureusement pas chez tous les acteurs ! On compte le reprendre pour le prochain film d’ailleurs.

Avoir un père réalisateur et une mère productrice, ça aide à percer ?
Pas du tout. Ça peut aider à rentrer dans le milieu, et encore… Mais entre rentrer et percer, il y a une très grande différence. Comme pour tout, il y a des avantages, mais aussi des inconvénients. Il s’agit avant tout d’une famille comme  une autre.

On s’attendait à revoir Rachid El Ouali, le personnage principal de la saga. Pourquoi ne fait-il pas partie du casting ?
Tout simplement parce qu’il n’y avait pas son personnage dans cette histoire et que l’héroïne est sans aucun doute Lhajja, interprétée par Amina Rachid.

Le film reçoit un accueil assez mitigé de la part du public et des critiques. Cela ne vous inquiète pas ?
Non, parce que faire un film, c’est recevoir des avis divers ! Ce qui compte, c’est de le faire avec le coeur et à 600 % pour ne pas avoir ensuite à regretter le manque d’efforts. On fait un film, on le finit et dès lors, il appartient au public. Ça fait partie du jeu, qu’il plaise ou passe inaperçu. Pour ce qui est de la critique, elle fait son travail.

Quels sont les cinéastes qui vous ont influencés ?
Tous ! Soit pour nous inspirer, soit pour nous souffler ce qu’il ne fallait surtout pas faire !

Quels sont vos projets ?

D’autres films, des expositions de photos et des expériences musicales…

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