Hicham benohoud son corps son combat

Hicham Benohoud n'en finit pas de s'exposer. Après "Identity", où le visage de l'artiste est son propre modèle, le voilà qui expose son corps et nous étonne par des peintures à l'huile hyperréalistes. "Utopia", à voir absolument à l'Atelier 21 jusqu'au 3 mai.

FDM Pour la deuxième fois, vous orientez votre exposition vers la peinture. Serait-ce un changement d’ère pour le photographe que vous êtes ?

Hicham Benohoud : J’ai plus de 20 ans de photographie derrière moi, et jusqu’en 2010, il est vrai que je n’avais encore jamais réalisé d’exposition de peintures. Il y a trois ans, quand on m’a invité à exposer à la galerie l’Atelier 21, j’ai souhaité proposer autre chose que de la photo. Là, pour le coup, j’étais décidé à utiliser ce médium pour la première fois. J’ai donc réalisé des portraits à la peinture à l’huile. Et comme j’étais encore très épris de photo, j’ai souhaité préserver ce lien en étant mon propre modèle. Je suis parti d’un cliché de moi en noir et blanc que j’ai essayé de reproduire tel quel. Cette exposition s’articulait autour du thème très fort de l’identité. Un thème dont j’use depuis que j’ai commencé à m’exprimer.

Pourquoi ce besoin d’expérimenter la peinture ?

Ce qu’il faut savoir, c’est que j’avais appris la technique quand j’avais 20 ans, mais que je l’avais depuis laissée de côté. Je voulais savoir si j’avais les capacités techniques et intellectuelles de peindre comme un occidental. Mais une fois la technique maîtrisée, je me suis tourné vers la photo et j’ai laissé la peinture de côté. Quand j’ai réalisé ma première exposition de peintures pour la galerie l’Atelier 21, j’ai repris la même technique, mais différemment. Pas d’une manière orientale ou classique, mais d’une façon hyperréaliste.

Quelle a été votre démarche pour l’exposition l’actuelle ?

Pour cette exposition, la question s’est posée sur ce que je pouvais proposer après celle de 2010. Après le portait, je suis passé au corps à travers lequel j’explore encore plus en profondeur la thématique de l’identité. Car pour moi, l’identité ne se limite pas qu’au visage. Cette fois-ci, sur tous les tableaux, on ne voit absolument pas mon visage, mais juste ce corps omniprésent, comme une forme d’identité. On comprend à travers l’attitude cette individualité à laquelle je ne veux pas renoncer.

De quelle utopie est-il question ?

Le thème de l’exposition, “Utopia”, est en rapport avec notre société que je vois comme étant une utopie. J’y fais référence dans certains tableaux à travers quelques éléments architecturaux plus ou moins reconnaissables de la ville de Casablanca. Pour moi, qui suis natif de Marrakech et qui ai vécu sept ans en France, les contradictions de cette ville sont flagrantes au quotidien. En France, tout est structuré, cadré. Alors qu’ici, les choses me paraissent explosives. C’est la folie ! Finalement, la société marocaine ne peut être qu’une utopie. On a beau initier de grands chantiers comme le tramway ou le Morocco Mall, le quotidien est toujours immuable. Cette exposition est une façon de dire que cette société à laquelle j’aspire ne sera pas au rendez-vous.

Vous êtes toujours collé à votre personnage. N’envisagez-vous pas de vous tourner plus vers l’actualité ?

En fait, je ne fais que résister ! Ce n’est pas facile pour moi non plus de rester centré sur mon personnage. Maintenant, c’est vrai que j’ai noté beaucoup de recherches par rapport au printemps arabe, à la politique… Mais j’essaie de me débarrasser de tout ça et d’aller à l’essentiel. Je vous avouerai même que ce travail, dans lequel j’introduis des éléments architecturaux, est un exploit pour moi ! Sortir du portrait pour explorer un autre univers signifie pour moi m’éloigner de moi-même. Ce n’est ni narcissique ni égoïste de ma part. Je dirais que c’est plutôt égocentrique. C’est un travail autobiographique où je pars de moi pour examiner le monde qui m’entoure.

Le public est-il sensible à votre univers ?

Non, pas du tout ! D’après ce que je ressens, les gens ne s’intéressent pas à mon travail photographique. La preuve : j’ai fait toute ma carrière en France et j’ai tous mes réseaux en Europe. J’ai fait des expositions de New York à Tokyo, mais très peu ici. Mes deux expositions phares au Maroc sont celles de la galerie l’Atelier 21. Donc, par rapport à ma présence à l’étranger, ce que j’ai exposé au Maroc est peu de choses. Il n’y a pas encore de public marocain pour la photographie. Par rapport à mes peintures, les gens sont certes épatés, voire bluffés par ma technique, mais de là à franchir le pas et à acquérir, c’est une autre histoire. Ce genre de sujet ne correspond pas tout à fait à leurs attentes. Ils préfèrent un beau paysage ou encore de l’abstraction.

Est-ce votre côté audacieux et un brin provocateur qui serait en cause ?

C’est vous qui le dites (rires) ! Mais le seul travail que je ne peux toujours pas montrer, ce sont des nus. Ce travail, que j’avais intitulé “Half Couple”, a été réalisé à Paris en 2004. A l’époque, j’ai été contacté par une personne qui voulait monter une exposition d’artistes de la diaspora marocaine. Je lui ai montré ce travail et il n’a pas été choqué du tout. On a exposé à Amiens. Mais comme cette expo devait être montrée au Maroc, on a refusé d’accrocher mes clichés sous peine d’avoir à faire face à des émeutes ! Là, je suis en train de préparer une monographie où il est question de ce travail. C’est un livre important pour moi et j’espère qu’il pourra être commercialisé au Maroc.

Quels sont vos projets à venir ?

En parlant de la série “Half Couple”, elle sera montrée dans un centre d’art contemporain en Suisse dans le cadre d’une exposition internationale autour du portrait. Je suis également invité au Musée d’art contemporain de Marseille. J’expose aussi à Milan et à Liverpool dans les semaines à venir. Une dizaine d’expositions sont prévues cette année. Sinon, j’ai un projet que je n’ai pas encore montré et qui s’intitule “Âne-situ”, où je photographie des ânes chez les gens. J’essaie d’imaginer à chaque fois une mise en scène différente à travers des structures que je fais fabriquer. J’installe le dispositif dans lequel je mets le ou les ânes, sans aucune présence humaine.

Qu’est-ce qui vous a inspiré ce travail ?

C’est un travail qui m’a été inspiré par ma vie à Casablanca. J’habite dans le quartier populaire de l’Oulfa, et quand je sors de chez moi, je trouve souvent des ânes qui traversent tranquillement. C’est surréaliste ! Autre chose qui m’a beaucoup marqué : ce sont ces contradictions frappantes qui coexistent : les riches et les pauvres, les limousines et les charrettes… et ce qui me frappe encore plus, c’est que cela fasse partie du paysage et que ça ne surprenne plus personne. Mais rassurez-vous, ce n’est que l’une de mes perceptions de la ville de Casablanca !

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