L’histoire de A à Z
Où êtes-vous né ?
Mustapha Slameur : Dans la belle métro-pole blanche “Casababylone”.
Dans quel quartier avez-vous grandi ?
Dans le quartier mythique de Hay Mohammadi.
Enfant, qu’aimiez-vous ?
La grande statue de Sindibad à Aïn Diab, j’ai toujours cru qu’elle était vivante. Elle était la seule à nous accueillir, habitants des quar-tiers populaires, avec le sourire.
Vous imaginiez-vous un jour artiste ?
Je ne l’imaginais pas, je l’étais… D’ailleurs, tous les enfants sont des artistes, jusqu’à l’âge où ils vont à l’école et deviennent des individus “normaux”.
Quel genre d’enfant étiez-vous ?
Hyperactif… Ma mère m’attachait à une chaise pour s’assurer qu’il ne m’arriverait rien. Je me rappelle encore de ce jour où j’ai bu une bouteille d’essence alors que j’avais à peine trois ans !
Votre madeleine de Proust ?
Le pistolet à eau qu’on m’avait offert à l’occasion d’Achoura, grâce auquel je se-mais une terreur hydraulique sans pareil dans le quartier !
Votre âge ?
Je ne sais plus, il change tout le temps !
Comment l’art est-il apparu en vous ?
Je suis né dans une maison assez spéciale, au sein de laquelle la maman chantait du Sma-hane tout en accomplissant ses corvées quoti-diennes, et le papa swinguait sur des rythmes divers. Même la chambre que je partageais avec mon frangin Samir était inondée de cassettes d’Iron Maiden et de Megadeth, de posters de rock stars… Quelques instruments servaient de décor, et des toiles naïves peintes par ma maman faisaient ma fierté. On peut donc dire que j’ai grandi dans un univers artistique.
Quelle a été la réaction de votre entourage quand l’artiste en vous s’est révélé au grand jour ?
La première réaction de ma maman a été le refus, elle ne voyait ma réussite que par les études. Mais elle a fini par accepter… Mon père était d’accord mais tenait à me rappeler d’assumer mon choix. Mon frère, quant à lui, m’a soutenu et voulait faire de moi une star mondiale ! Moi, dans tout ça, j’entretenais cette nouvelle carrière dans le fun total, sans prise de tête.
Une anecdote ?
Le montant du premier cachet que j’ai obtenu était de 600 DH. Je l’avais partagé avec le rappeur Bigg (on était dans le même band) suite à notre prestation sur scène à Salé, et nous étions rentrés ce jour-là en train, après s’être rempli le ventre… Nous étions les gosses les plus heureux de la planète ! La plus belle époque…
Les premiers à croire en vous ?
Au début, à part mon frère, personne, si ce n’est moi-même ! Hélas, au Maroc, on at-tend ton succès avant de te soutenir…
Ceux qui vous ont mis des bâtons dans les roues ?
Le chaouchdu centre culturel du quartier. Il nous maudissait, nous chassait et nous traitait de tous les noms. Il ne trouvait pas notre art à son goût ! Mais aussi les radios qui ne nous reversaient pas nos royalties, et sur lesquelles notre musique passait en boucle. Pour ne citer qu’eux…
Vos musiques préférées?
Beaucoup m’inspirent… Mais dernièrement, je dévore toutes les nouvelles productions de Damian Marley et Damien Saez.
Vos lectures ?
Je vais être sincère, je n’aime pas lire…
Vos films préférés ?
Au cinéma, ce qui m’intéresse le plus, ce sont les scénarios et les dialogues. Ils ont des messages forts et profonds à nous faire passer, comme dans Matrix, Fight Club, “V” de Vendetta, l’Associé du Diable, Orange mécanique, Las Vegas Parano … â—†
QUOI DE PRÉVU ?
Beaucoup de projets en cours, mais je promets de belles surprises, c’est sûr ! Des indices : le cinéma, le théâtre, la télévision et la formation de nouveaux slameurs
The artist interview
Le ragga & Steph Ragga ManQue représentait le ragga pour vous ?
Une source d’inspiration, un style dans lequel j’étais le seul au Maroc, et qui était inexistant dans le temps.
Où puisiez-vous votre énergie ?
J’étais à fond dans la culture reggae, comme beaucoup de gens. J’appréciais les titres de Bob Marley et j’étais emporté par ces sons importés de Jamaïque. Ainsi, j’ai voulu proposer une version marocaine de ce type de rythmes.
Sans langue de bois, avez-vous de la rancune ou des regrets par rapport à la vie de Steph Ragga Man ?
Je ne regrette absolument rien, mis à part le fait d’avoir été un mauvais gestionnaire. J’ai dépensé tout ce que j’avais gagné des mix-tapes, concerts, tournées, publicités…
Aimeriez-vous… et pourquoi ?
faire du cinéma ?
Oui ! Beaucoup de choses que l’on n’arrive pas à exprimer avec des mots passent nette-ment mieux par le biais de l’image.…
faire de la politique ?
Non… aucunement !
LE SLAM Où puisez-vous …
… l’inspiration ?
Dans mes balades quotidiennes, en observant les gens, en étant sensible aux différentes transformations que subit notre société….
le son ?
Je laisse le soin à mon ingénieur du son, que je surnomme Ali Rguigue le Magicien, d’har-moniser le tout….
les paroles ?
Une avalanche qui s’abat sur moi quand tout le monde plonge dans le sommeil le plus profond….
l’enregistrement ?
Je l’effectue dans les studios Artcoustic. Ils sont sérieux et font un travail de qualité.
En vente où ?
Ma musique n’est pas à vendre, je la propose en téléchargement gratuit. L’essentiel est de la rendre accessible massivement et que tout le monde puisse écouter du slam sans freins d’achat… En plus, il n’existe pas au Maroc une “vraie” industrie musicale.
POUR VOUS…… que représente ?
Le slam ?
Une chance de s’exprimer.
La rue ?
La grande école de la vie.
La joie ?
L’amour, l’argent, les enfants, la santé.
Les femmes ?
Heureusement qu’elles existent parce que sans elles, on serait mal barré !
Les fans ?
Je préfère les nommer auditoire. En fait, je ne suis pas trop dans la logique du star system.
Votre rêve ?
Voir dans mon pays des manifestations ar-tistiques à chaque coin de rue, toutes villes confondues, et qu’elles soient libres de toute censure ou démagogie. â—†