En réponse au débat sur la question épineuse de l’héritage, le projet de réforme du Code de la famille propose la priorisation des donations (hiba) pour assurer les droits des filles en absence de fils. Cette disposition permet, d’une certaine manière de contourner, les règles de l’héritage. Les parents peuvent ainsi doter, s’ils le souhaitent équitablement leurs filles et leurs garçons ou de protéger leurs filles en cas d’absence d’un héritier mâle direct, de les prémunir contre la perte de leur héritage au profit d’une parentèle masculine éloignée.
La Moudawana de 2004, fondée sur les principes du droit musulman, prévoit l’héritage par agnation (taâsib). Ce dernier privilégie les descendants mâles et les proches parents du côté paternel. La priorisation des donations permettra-t-elle de garantir une certaine équité ?
“La possibilité de procéder à des donations (hiba)en faveur des filles de leur vivant est une mesure innovante. Si les parts successorales sont fixées dans le Coran (Sourate An-Nisa, 4:11), le droit musulman accorde une certaine flexibilité à travers les donations. Le verset “Et donnez à chacun son dû, aux proches…” (Sourate Al-Isra, 17:26) soutient cette pratique. Cela permet d’instaurer une forme d’équité tout en respectant les préceptes religieux”, souligne Me Abdelhakim El Kadiri Boutchich, juge près la Cour internationale de résolution des différends.
“C’est une approche pragmatique et en adéquation avec les principes de la chariaa. Le système coranique accorde au fils une part équivalente à celle de deux filles (Sourate An-Nisa, 4:11), un principe historiquement basé sur les responsabilités économiques différentes entre les genres. Cependant, les réalités actuelles montrent que les femmes contribuent de manière significative aux charges familiales et économiques. Les donations permettent aux parents d’ajuster cet équilibre de leur vivant. Cette mesure démontre que l’Islam offre des solutions flexibles adaptées aux évolutions sociales, permettant de concilier tradition et modernité. Elle constitue une avancée essentielle pour renforcer la justice sociale tout en respectant les textes sacrés”, conclut Me Abdelhakim El Kadiri Boutchich.