Au printemps 2023, vous avez rejoint le Royal Mansour Marrakech. Comment se passent vos premiers pas ?
Plutôt bien (sourire). Je m’attache chaque jour davantage au Royal Mansour, à Marrakech et au Maroc. J’y découvre une culture culinaire remarquable, une incroyable richesse de fruits et légumes, d’agneau, des poissons et de produits de la mer. Je n’en peux être qu’enchantée !
Quel voyage gustatif proposerez-vous à La Grande Brasserie ?
Je le décrirai ainsi : le plaisir de l’instant présent, la générosité dans l’assiette, le délice des saveurs, la fraîcheur et la saisonnalité des produits, le partage, l’excellence du service… Même si nous faisons de la cuisine française, nous travaillons avec des produits locaux. Le circuit court est primordial à mes yeux. Je me nourris de mes émotions pour cuisiner, qui viennent à la fois de mon éducation, de mes voyages, de mes rencontres, de tout ce qui m’a construit. M
ais quel est le point commun entre une grande brasserie parisienne et un palais des mille et une nuits tel que le Royal Mansour ?
Celui de la dimension théâtrale. Le Royal Mansour offre une splendide scène dans laquelle nous allons jouer notre partition de la Grande Brasserie. Il sera ainsi question de service à la française, découpe en salle, flambage et service au guéridon, chariot à pain, chariot à glaces… Des rituels exécutés avec maestria dans les règles de l’art réjouissant l’œil avant d’être conquis par le contenu des assiettes.
Pour façonner ces concepts, vous vous êtes imprégnée des richesses du Maroc. Quelle rencontre vous a particulièrement marquée ?
Les rencontres sont un peu à chaque coin de rue car nos cultures sont différentes. Je suis assez curieuse également. Je trouve les Marocains très généreux. Je me souviens d’échanges avec un artisan qui tenait un four traditionnel à Marrakech avec lequel j’ai parlé tajine, ou encore une grand-mère dans un douar de l’Atlas avec qui j’ai roulé la semoule pour faire un couscous. Ce sont des moments de partage uniques. Les Marocains donnent énormément et, en retour, j’espère en donner autant.
Quel est votre secret pour être arrivée où vous êtes aujourd’hui, à savoir cheffe 6 étoiles, jury de l’émission Top chef ou encore élue “Meilleure Femme Cheffe du Monde” dans le classement The World’s 50 Best Restaurants en 2015…
Je n’en ai pas. Je suis juste une personne passionnée qui adore son métier et qui a la chance d’être entourée de collaborateurs loyaux. Ces derniers travaillent à mes côtés depuis des années. Ils sont d’un grand support pour moi. Sans eux, je ne pourrais pas faire ce que je fais.
Malgré ce magnifique palmarès, vous aimez vous présenter comme cuisinière. Pourquoi ? Êtes-vous victime du syndrome de l’imposteur ?
Je suis une cuisinière étoilée (sourire). Je n’aime pas le mot “chef”. Il donne un côté un peu militaire à notre métier. C’est une perception très personnelle, sans fondement et peut-être idiote de ma part mais je préfère qu’on me décrive en tant que cuisinière. Une cuisinière entourée de cuisiniers, travaillant ensemble pour rendre les gens heureux. Après, suis-je victime du syndrome de l’imposteur ? Je ne pense pas. Je crois qu’aujourd’hui, je suis à l’aise avec moi-même. J’ai une place légitime, là où je suis.
La place de la femme dans le milieu évolue… À vos yeux, assez rapidement ? Quels en sont encore les freins ?
Assez rapidement ? C’est sûr que non. Je n’ai jamais été optimiste à ce sujet. Les freins sont à plusieurs niveaux car c’est un métier qui demande de faire des choix qui ne sont pas faciles pour les femmes. Ce n’est pas aussi simple de se dire qu’on peut être une maman autrement, avoir une vie de famille différente. Vous savez, j’ai décidé d’être maman à 40 ans car je n’avais pas encore construit l’équipe qui pourrait me relayer. Il faut aussi penser au coût financier, qui n’est pas des moindres, de la nounou. Pour moi, peut-être, est-ce mon petit univers qui est ainsi, les freins sont aujourd’hui de cet ordre-là. Autour de moi, il y a toujours eu beaucoup de respect envers les femmes.
Encadré : » Hélène Darroze partage notre vision »
« Le Royal Mansour Marrakech met tout en œuvre pour incarner une destination culinaire d’excellence, avec des expériences uniques dans tous les styles. Hélène Darroze partage notre vision et lui donne une force de séduction gourmande unique, déjà à La Grande Brasserie et très prochainement à notre restaurant de gastronomie marocaine », appuie Jean-Claude Messant, Directeur Général du Royal Mansour Marrakech.