Les pannes sexuelles restent mal comprises car longtemps considérées comme taboues. Or les comprendre reviendrait à mieux les gérer pour, in fine, les dépasser. D’ailleurs, qu’entend-on par panne sexuelle ? “Ce n’est pas un dysfonctionnement. C’est un signal. Un signal que le corps, l’esprit ou la relation essaie de faire passer autrement”, explique Leila El Amrani, psychologue en thérapie cognitive et comportementale spécialisée dans les relations. De son côté, Hafsa Abouelfaraj, psychologue et psychothérapeute, considère que la panne sexuelle peut-être définie comme “une interruption transitoire ou définitive de la réponse sexuelle attendue, Elle peut concerner différentes phases du cycle sexuel, qu’il s’agisse du désir, de l’excitation, de la lubrification, de l’orgasme ou du plaisir”.
Il existe différentes manifestations des pannes sexuelles et les symptômes peuvent varier d’une femme à l’autre. Au niveau du désir, on parle de “l’absence d’initiatives ou d’envie de rapports ou de contacts sexuels même dans un contexte de relations amoureuses satisfaisantes”, fait savoir Hafsa Abouelfaraj. Pour ce qui est de l’excitation, certaines femmes rencontrent des difficultés à “éprouver une montée du plaisir, à lubrifier naturellement ou à se sentir “présente” dans l’expérience sexuelle. Certaines vont même ressentir des douleurs vaginales durant les rapports ou des spasmes involontaires des muscles du périnée, qui interdisent la pénétration”, poursuit-elle. Toutefois, Leila El Amrani, estime que ces situations cachent souvent une histoire. “Celle d’un stress, d’un trop-plein, d’un non-dit, parfois d’un rythme qui ne correspond plus”.
Quand faut-il s’inquiéter ?
Contrairement à une simple baisse de libido passagère, la panne sexuelle devient problématique “lorsqu’elle s’installe durablement, se répète, ou génère de l’angoisse ou de la souffrance chez la personne concernée ou pour le couple”, affirme Hafsa Abouelfaraj. Pour comprendre les causes des pannes sexuelles, il est primordial “d’dopter une approche dite holistique. En effet, loin d’être des anomalies isolées, elles reflètent “une interaction complexe entre le corps, l’esprit et le relation””, juge Leila El Amrani. Certains facteurs psychologiques inhibent sérieusement l’épanouissement sexuel des femmes les cantonnant dans un cercle vicieux duquel elles ont du mal à échapper. Il y a ce qu’on appelle “l’anxiété de performance”, c’est-à-dire la peur de ne pas être à la hauteur; “celle-ci peut altérer le désir et l’excitation de la femme au même titre que le stress et la fatigue”, précise Leila El Amrani. Outre la dépression qui peut engendrer une perte de libido, les traumatismes passés à savoir des expériences sexuelles négatives ou des abus “peuvent laisser des traces durables”, souligne-t-elle.
À l’instar des causes psychologiques des pannes sexuelles, celles physiques agissent de manière significative sur le désir sexuel féminin. En l’occurrence, “les modifications hormonales (notamment suite à une grossesse, un post-partum, une ménopause, une prise ou un arrêt de contraceptifs hormonaux) influent directement sur le désir, la lubrification, la sensibilité. Certaines pathologies gynécologiques (endometriose, fibromes, infections urinaires ou vaginales) peuvent rendre les rapports douloureux et mener à l’évitement de toute activité sexuelle”, détaille la psychologue et psychothérapeute Hafsa Abouelfaraj. Pareillement, les maladies chroniques comme le diabète, les troubles thyroïdiens et toutes les pathologies auto-immunes peuvent également “affecter la réponse sexuelle”. D’un point de vue relationnel, un manque de communication tels que les non-dits ou des incompréhensions “peuvent créer une distance émotionnelle”, dixit Leila El Amrani. Les conflits non résolus et les tensions persistantes causent également une diminution de l’intimité. Considérée comme un tue-l’amour, la routine, soit l’absence de nouveauté, “peut éteindre la flamme du désir”. Aussi, “les blessures passées ou une trahison sont susceptibles de porter préjudice à la connexion sexuelle”, déclare l’experte.
Une sexualité consciente
En vue de surmonter les pannes sexuelles, les femmes concernées peuvent emprunter plusieurs chemins censés les mener vers une sexualité plus épanouie, libre et consciente, à commencer par déculpabiliser. “Une panne sexuelle ne signifie pas que l’on est “anormale” ou “frigide”. C’est souvent une réaction naturelle au déséquilibre intérieur ou extérieur évolutif, c’est quelque chose qui peut arriver à tout le monde, n’importe quand”, insiste Hafsa Abouelfaraj. Ensuite, il est important de se reconnecter à soi-même. “Retrouver sa propre connexion corporelle est la première étape. Cela peut passer par des pratiques de relaxation, méditation, yoga ou découverte sensorielle, mais aussi par l’auto-érotisme, qui permet de mieux se connaître et de savoir ce qui nous fait du bien, et ainsi d’en apprendre plus sur ses désirs, ses zones érogènes, sur le plaisir”, suggère la psy.
Avancer seule, c’est bien mais à deux c’est encore mieux. En effet, la communication avec son partenaire est fondamentale. “Exprimer vos ressentis, vos besoins et vos inquiétudes peut renforcer la complicité et la compréhension mutuelle. Cela permet également de dédramatiser la situation et de chercher ensemble des solutions adaptées”, recommande Leila El Amrani. Si ces difficultés persistent, il peut être bénéfique de consulter un sexologue ou un thérapeute spécialisé. “Ces professionnels peuvent vous aider à identifier les causes sous-jacentes et à mettre en place des stratégies pour retrouver une vie sexuelle épanouie”, ajoute-t-elle.
Comprendre l’origine de ces pannes sexuelles est un pas nécessaire pour apprendre à les surmonter. En plus d’être complexe, la sexualité féminine demeure corrélée à des dimensions émotionnelle, cérébrale et affective. À en croire les spécialistes, se défaire de certains sentiments tels que la honte et le jugement tout en étant à l’écoute des besoins de son corps et ses limites ne peut que se révéler bénéfique.