La confiance en soi est un pilier essentiel pour le bien-être et la réussite future des enfants. Selon Mongia Hajri, psychologue et psychothérapeute “la confiance en soi se construit dès la naissance et se développe tout au long de l’enfance. Elle dépend de l’interaction familiale et sociale de l’enfant”. De son côté, le Professeur Rachida Naciri Benali, psychopédagogue et écrivaine estime que “le manque de confiance en soi est un langage qui trouverait ses prémisses dans son histoire ; il est provoqué par des séquelles qui laissent des empreintes sur son parcours de vie”.
Or dès l’adolescence, et parfois bien avant, les enfants sont confrontés à un flot d’images idéalisées sur les plateformes comme Instagram, Snapchat ou TikTok. Ces photos, souvent retouchées grâce à des filtres, transforment non seulement les visages mais aussi les perceptions de ce à quoi chacun “devrait” ressembler. “Les filtres ne sont pas qu’un outil ludique. Ils redéfinissent insidieusement les standards de beauté et créent une distorsion entre l’apparence réelle et l’apparence perçue comme idéale”, explique Mongia Hajri.
Pour contrer ces effets, le rôle des parents est primordial. La première étape consiste à établir un dialogue sincère et ouvert avec son enfant. “Il est essentiel de donner de l’amour et d’aimer son enfant tel qu’il est, d’avoir une sécurité émotionnelle” , recommande la psychologue qui insiste sur la nécessité d’avoir une communication ouverte : “Que ressens-tu? Penses-tu que ces images reflètent la réalité ?” Ces échanges permettent aux enfants de développer un esprit critique face aux contenus qu’ils consomment.
Encourager l’acceptation de soi
Le travail d’acceptation de soi ne commence pas avec l’apparition des premières insécurités, mais bien avant. “La confiance en soi et l’estime de soi vont de pair ! L’estime de soi, c’est connaÎtre ses limites et ses forces, c’est prendre conscience de ce dont on est capable et pour cela, il est nécessaire d’avoir confiance en soi”, souligne la psychologue. Les experts s’accordent sur l’importance de renforcer l’estime de soi dès l’enfance. “Le regard des parents joue un rôle fondamental”, explique Mongia Hajri. “Valoriser les efforts plutôt que le résultat, complimenter les qualités personnelles, plutôt que physiques, responsabiliser l’enfant dès son plus jeune âge sont des attitudes qui nourrissent la confiance en soi.” De son côté, le Professeur Rachida Naciri Benali conseille, “d’adopter une approche multidimensionnelle, c’est-à-dire avoir des approches qui démontrent la genèse de la conscience du Moi et de la confiance en soi. En effet, le développement de la personnalité de l’enfant s’enracine, s’appuie, s’amplifie non seulement dans l’estime de soi, mais aussi dans le besoin de rayonner, de trouver un écho sécurisant dans l’environnement proche,” avant d’ajouter qu’il est important de “dédramatiser l’erreur. En effet, les erreurs et les échecs font partie des succès. Tout enfant doit être capable, à tout âge de tester son environnement direct, prendre des risques, partager ses opinions. Il faut le laisser explorer son environnement et le vivre pleinement, tout en valorisant les succès. Adopter un style éducatif qui évite les comparaisons entre enfants fait partie des conseils pour la construction de l’estime de soi. Enfin tenir compte du mimétisme et du potentiel enfantins aide à la construction de la confiance en soi, car il faut éviter de se comparer aux autres membres de la famille, voisins(es)… Aux parents de prendre les bonnes résolutions ! ils doivent être capables d’apprendre, de désapprendre et de réapprendre : ce qui relève du travail sur soi.” Il est donc capital de construire une relation positive avec l’enfant, de prendre conscience que chaque enfant est unique et le protéger au maximum de l’exposition aux réseaux sociaux qui font des dégâts sur l’estime de soi.
Limiter l’exposition tout en responsabilisant
La régulation de l’utilisation des écrans est également un point central. Sans interdire, il est possible d’encadrer les usages pour réduire l’exposition à ces contenus potentiellement nocifs. Mongia Hajri recommandede fixer des limites claires : instaurer des créneaux horaires dédiés aux écrans et encourager une critique des réseaux sociaux et avoir un contrôle parental continue. “Il faut instaurer une discussion et bien insister sur le fait que ce que l’on voit ne relève pas vraiment de la réalité, que ce sont des images qui sont modifiées,” appuie-t-elle. De son côté, Rachida Naciri Benali alerte sur l’omniprésence et la surconsommation des réseaux sociaux, “beaucoup d’organismes, comme l’Unesco par exemple, décidés à lutter contre les dangers d’une utilisation non surveillée du Web, posent des jalons pour une parentalité à l’ère du digital dans le contexte d’un environnement cybermédiatique de l’enfance. À en croire l’évolution du phénomène, on parle de “la pandémie de ce siècle”. Un enjeu de santé mentale. De multiples études en neuroscience recommandent d’interdire l’accès aux RS avant 14 ans; beaucoup de pays légifèrent en ce sens. Les habitudes de vie ont été bouleversées, et la tendance n’est pas à la baisse.” Face la présence accrue des réseaux sociaux dans la vie des enfants qui disposent de téléphoned et de tablettes dès le plus jeune âge, il incombe aux parents de montrer l’exemple. Ce qui suppose un ferme engagement parental étalé sur plusieurs années afin d’encourager l’enfant à mobiliser tout son potentiel, dans le cadre d’un processus de changement menant à l’autonomie et à la confiance en soi. Au cœur de ce processus, la sensibilisation de l’enfant est primordiale. “Sensibiliser à une réhabilitation adéquate, en encourageant l’enfant dans cette quête dont la responsabilité incombe au milieu familial. Afin de reconstituer sa manière particulière d’aborder autrui. Il faut mettre l’accent sur ses points forts, en lui délivrant le message suivant : “tu peux le faire… le chemin à parcourir est à ta portée” pour pousser l’enfant à se reconfigurer et enfin il est préférable de proposer des réajustements nécessaires pour capitaliser en Savoirs, Savoir-faire, Savoir-être et Savoir-changer: un élément fondamental dont la mise en œuvre permet d’améliorer significativement l’estime de soi”, insiste Rachida Naciri Benali. Sensibiliser les enfants à l’acceptation de soi et à la réalité des filtres est un processus de longue haleine. Il s’agit d’instaurer une réflexion permanente qui les accompagnera bien au-delà de l’enfance. “Leur apprendre à s’aimer, c’est leur offrir une base solide pour affronter un monde où l’apparence est trop souvent érigée en valeur suprême”, résume Mongia Hajri. Les réseaux sociaux continueront d’évoluer, mais avec les bons outils, les enfants peuvent apprendre à y naviguer sans perdre de vue ce qui compte vraiment : être eux-mêmes.