Sihame Allali : « Notre ambition est de créer un réseau féminin puissant au Maroc »

C’est une femme d’affaires inspirante, engagée et très active. Sihame Allali est à la fois CEO et fondatrice de PGT Group, une société spécialisée dans la technologie, membre de la délégation française du G20 YEA 2024 des Jeunes entrepreneurs et présidente de Women of Influence, un réseau de femmes leaders. Entretien.

Comment avez-vous réussi à vous imposer dans le domaine de la tech ?
Mon parcours a été marqué par la passion, la résilience, et une vision claire de ce que je voulais accomplir. En tant que CEO et fondatrice de PGT Group, j’ai commencé en identifiant des opportunités dans la transformation numérique et en bâtissant une équipe autour de cette vision. Mon engagement dans des initiatives comme le G20 YEA et la présidence de Women of Influence découle de ma volonté de créer des espaces où la diversité et le leadership féminin sont au centre. Ce qui m’a permis de m’imposer, c’est cette conviction profonde que l’innovation ne peut être réalisée qu’en incluant des voix et des perspectives variées. En m’entourant de personnes talentueuses et en étant constamment à la recherche de nouvelles solutions, j’ai su naviguer dans cet univers, tout en gardant une ouverture d’esprit et un engagement fort pour l’inclusion.

Et aujourd’hui, vous voulez vous investir au Maroc en ouvrant une antenne de PGT Group à Rabat tout en développant le réseau Women of Influence dans le Royaume. Pourquoi ?
Ma double identité est ma force. Le Maroc est mon pays d’origine, et j’ai une appartenance extrêmement forte à cette terre. Ce sentiment profond me pousse à m’investir pleinement pour le développement et le rayonnement du Maroc, tout en bâtissant des ponts entre la France et le Royaume. Le Maroc connaît aujourd’hui une belle dynamique dans le secteur de la Tech, où la présence des femmes est significative. Il est d’ailleurs à noter que le ministère de la Transition numérique est dirigé par des femmes depuis sa création en 2021. Pour renforcer la visibilité et le leadership féminin, différents cercles et réseaux ont été créés par les femmes. J’ai donc voulu apporter ma contribution à cette dynamique.

L’association Women of Influence réunit des femmes influentes autour d’une même vision : construire un monde où le pouvoir n’est plus une question de genre. Un magnifique projet mais quel est votre “plan d’action” ?
Le plan d’action de Women of Influence repose sur trois piliers essentiels : la visibilité, le soutien, et la formation. Premièrement, nous travaillons à rendre visibles les femmes leaders en les mettant en avant lors d’événements et de conférences à l’international ainsi qu’à travers les médias. Ensuite, nous fournissons un soutien concret via des programmes de mentoring et de coaching, afin d’aider les femmes à gravir les échelons dans leurs carrières. Enfin, la formation est cruciale : nous organisons des ateliers sur des sujets tels que l’IA, la cybersécurité, et la transformation digitale pour armer les femmes de compétences techniques de pointe. Nous voulons non seulement que les femmes aient accès aux postes de décision, mais qu’elles puissent y exceller, avec une vision forte et des compétences solides. Notre ambition est de créer un réseau puissant, où l’entraide et l’excellence permettent de redéfinir le leadership au-delà des questions de genre.

Vous le savez, la parité dans les domaines de gouvernance est un enjeu crucial. Aussi, comment accélérer la féminisation des instances de direction ?  

Accélérer la féminisation des instances de direction nécessite une action concertée à plusieurs niveaux. D’abord, il est essentiel d’instaurer des politiques de quotas dans les conseils d’administration et les postes de direction, afin de garantir une présence féminine significative. Mais au-delà des quotas, il est crucial de changer les mentalités au sein des entreprises et des conseils d’administration pour qu’ils reconnaissent la valeur ajoutée qu’apportent les femmes en termes de leadership, de diversité de pensée et de performance. Ensuite, il faut favoriser la formation et l’accompagnement des femmes dans des domaines stratégiques, tels que la gestion, la finance, et la technologie, afin qu’elles soient prêtes à assumer ces rôles. Le mentoring est également un outil puissant : permettre aux femmes de se connecter avec des modèles de réussite féminins leur donne la confiance nécessaire pour se projeter dans des rôles de leadership. Enfin, il faut encourager les entreprises à adopter une culture d’inclusion qui valorise non seulement la diversité des genres, mais aussi celle des parcours et des idées.

Vous êtes une spécialiste de l’innovation technologique et de la transformation digitale. Quel regard portez-vous sur l’évolution de la place des femmes dans le monde de la Tech ?
Il y a eu des progrès, mais le chemin reste long. Les femmes commencent à avoir une place plus visible dans la Tech, et les initiatives pour les attirer dans les métiers technologiques se multiplient. Cependant, elles demeurent sous-représentées, surtout dans les rôles de leadership et les domaines de pointe comme l’intelligence artificielle, la cybersécurité, et la blockchain. Les stéréotypes et le manque de modèles féminins freinent encore la parité. Il est crucial de renforcer la visibilité des femmes, de favoriser des programmes de formation adaptés et de créer des réseaux de soutien pour une diversité plus tangible. 

De façon plus explicite, comment faire de la digitalisation un moteur d’égalité entre les femmes et les hommes ?  

La digitalisation peut être un véritable levier d’égalité entre les femmes et les hommes si elle est utilisée de manière inclusive et stratégique. Premièrement, elle permet de démocratiser l’accès à la formation. Grâce aux plateformes en ligne, les femmes, où qu’elles se trouvent, peuvent accéder à des ressources pour développer des compétences dans des domaines critiques comme l’intelligence artificielle, la cybersécurité, ou le cloud computing. Cela aide à combler le fossé des compétences technologiques. De plus, la digitalisation permet de créer des environnements de travail plus flexibles, comme le télétravail ou les horaires aménagés, qui favorisent un meilleur équilibre vie professionnelle-vie personnelle, souvent un obstacle pour les femmes dans des carrières à responsabilités. Enfin, en intégrant des technologies comme l’intelligence artificielle et la data, nous pouvons éliminer les biais inconscients dans les processus de recrutement et de promotion. Cela permet de garantir que les femmes et les hommes sont évalués de manière équitable, sur la base de leurs compétences et performances, et non sur des stéréotypes ou des préjugés. La transformation digitale peut ainsi devenir un moteur de changement structurel pour l’égalité.

 

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