Malika Bellaribi – Le Moal, la diva des quartiers

Une voix enchanteresse, un sourire qui mord la vie à pleines dents, des yeux qui brillent et un rire joyeux pour masquer ses émotions... c'est Malika Bellaribi. Pour son engagement social, Clarins lui a attribué le prix de la femme la plus dynamisante de l'année 2011 ; et pour FDM, la chanteuse lyrique revient sur les temps forts de sa vie digne d'un conte de fée, avec ses joies et ses coups du sort...

FDM : Avec le recul, quel regard portez-vous sur votre enfance ?

Malika Bellaribi – Le Moal : Un regard dans l’ensemble positif. J’ai appris, avec le temps, à comprendre ma mère, qui est décédée il y a quelque temps, ainsi que ma famille. La pauvre femme a fait ce qu’elle a pu avec l’éducation qu’elle a elle-même reçue. Elle a fait ce qu’elle pouvait avec les moyens qu’elle avait, et je ne sais pas si j’aurais fait mieux… Je ne l’envie pas.

En avez-vous voulu à la vie, à vos parents, pour l’enfance que vous avez eue ?

Oui, à un moment donné, j’en ai beaucoup voulu à ma mère, car je vivais très difficilement l’accident. Je me sentais abandonnée par elle qui ne me rendait quasiment jamais visite durant toutes ces années passées à l’hôpital. Mais avec le recul, j’ai compris que le poids des traditions, les conditions de vie de l’époque l’empêchaient de faire autrement. Je lui ai pardonné, je la comprends et je me dis qu’elle m’a aimée avec ses moyens. Elever une famille de dix enfants, ce devait être très dur.

Gardez-vous tout de même de bons souvenirs de votre enfance ?

Oui, absolument ! Ce que j’ai beaucoup aimé, c’est la solidarité au sein de ma famille, ce côté lyrique qui me sert pour l’opéra. Ma mère avait un côté “commedia dell’arte”, dans le sens où elle exagérait toujours les sentiments. C’est cet aspect de ma culture dont je me sers énormément pour l’opéra. C’est sympa, c’est drôle (rires).

Qu’est-ce qui vous a donné la force et l’envie de vous accrocher dans les moments les plus durs de votre vie ? Quel a été votre moteur ?

Je pense que je dois surtout à ma mère le fait d’avoir eu envie de me battre pour vivre après mon accident. C’était une battante, un peu féministe à sa manière, et elle m’a appris que dans la vie, il ne faut pas subir. Elle n’avait pas de métier et pour élever ses dix enfants, à la mort de mon père, elle s’est mise à travailler et a fait tout un tas de petits boulots, de femme de ménage à cantinière. Elle s’est battue de toutes ses forces pour faire en sorte que sa famille ne soit pas éclatée et que ses enfants restent avec elle. Elle aurait très bien pu tous nous abandonner, mais elle ne l’a pas fait… Elle a assumé.

Comment vous découvre-t-on une voix prodigieuse ?

Je pense que le bon Dieu m’a donné un don, mais je l’ai beaucoup travaillé (rires). Honnêtement, je ne savais pas que j’avais ces aptitudes et ce n’est qu’au bout de dix ans d’études de musique que je m’en suis rendue compte, à force d’entendre mes professeurs me répéter que j’étais douée. Aujourd’hui, j’éprouve du plaisir à chanter, mais à l’époque, je n’assumais pas très bien cette voix. Je rêvais d’être une voix colorature, une soprano ; mais en fait, je suis une mezzo soprano, avec des aigus, des graves, un côté très terrien, très émotionnel… Une voix large.

Où trouvez-vous l’inspiration ?

Je la puise dans mon vécu et je la trouve aussi grâce au travail que je mène avec mon association dans les quartiers populaires. Ce qui m’inspire, c’est de faire des choses qui me permettent de rester toujours connectée à la réalité, à la vie.

Que ressentez-vous quand vous chantez ?

Beaucoup d’émotions, de vibrations qui parcourent mon corps. J’ai l’impression que je voyage, que je vole, que personne ne peut m’atteindre. C’est mon monde à moi et j’aime y convier les gens, partager mon imaginaire avec eux. C’est quelque chose pour moi de très tendre, et à la fois de très colérique aussi… Quand je chante, je ressens toute une palette d’émotions.

Pourquoi vous être convertie au catholicisme ?

Quand j’étais à l’hôpital, je ne savais pas si j’allais m’en sortir, et la seule chose que j’avais, c’était de prier Dieu, Marie, Jésus… Ma mère me disait toujours que peu importe son nom, Dieu ou Allah, c’était toujours le même, et que ce qui comptait, c’était d’avoir la foi. J’ai donc grandi avec cette vision oecuménique, avec deux religions pour lesquelles j’ai beaucoup de tendresse… On m’a toujours appris que la religion permet d’avoir un lien avec Dieu et que c’est quelque chose de personnel, que l’on vit à l’intérieur. Le fait de savoir que Dieu me sauvait, c’était pour moi le plus important.

Parlez-nous de votre association “Voix en développement”…

Je l’ai créée il y a une dizaine d’années, quand je me suis rendue compte des gros problèmes qu’il y avait dans les quartiers populaires. Les gens étaient systématiquement confrontés au racisme social, à une stigmatisation de l’étranger, du Maghrébin. On reprochait à ces gens le fait que tout aille mal et on en faisait des boucs émissaires. Un jour, alors que je donnais un concert, on m’a demandé de réfléchir à un projet pédagogique. C’est à ce moment précis que j’ai décidé de travailler avec des enfants, des adolescents et des adultes des quartiers. Ce travail m’a obligée à réfléchir à la pédagogie, à la thérapie, et à comprendre les raisons pour lesquelles les gens sont en situation d’échec. J’ai appris que cela est en fait très lié aux blessures des gens, à la violence, à la précarité, à ce que l’on appelle les accidents de la vie. J’ai trouvé un moyen de les aider en mettant à leur disposition des outils pédagogiques qui leur permettent de retrouver leur autonomie et le plaisir de l’apprentissage. La musique, c’est quelque chose qui nous berce, qui répare… C’est un peu comme une résilience. A travers mon travail dans cette association, je répare également ma propre histoire, je m’explique mes blessures. Aujourd’hui, je donne aux adultes et aux enfants une porte de sortie et je suis en paix.

Qu’avez-vous ressenti lorsque vous avez reçu dernièrement le prix Clarins de la femme la plus dynamisante de l’année ?

Ça m’a beaucoup touchée car je travaillais dans l’ombre depuis pas mal d’années et honnêtement, je ne m’y attendais pas. Tout d’un coup, ce travail a été mis en lumière et on a reconnu que ces nouvelles pédagogies, basées également sur un travail thérapeutique, aidaient énormément les enfants. Ça va vous faire rire, mais je ne connaissais pas vraiment cette marque et je ne l’utilisais pas beaucoup (rires). Je ne pensais pas que ces gens partageaient les mêmes valeurs que moi et j’ai découvert au contraire des personnes porteuses de valeurs humanistes, absolument pas bidons, chose, avouons-le, assez rare dans l’univers du luxe… J’avoue que ça m’a scotchée ! (rires) â– 

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