L’école, du rêve à la réalité…

Chaque année, Caftan rime avec générosité. A travers cet événement, Femmes du Maroc soutient le combat du Comité de Soutien de la Scolarisation des Filles Rurales (CSSF) et le rêve de toutes ces filles dont le voeu est simplement... d'aller à l'école. Nous les avons rencontrées dans un centre d'accueil dans la localité de Mograne. Reportage...

Mograne. Une commune rurale comme il en existe tant au Maroc, où rejoindre les bancs de l’école est un luxe, surtout pour les filles. Vous imaginez sûrement cette localité perchée dans le Haut-Atlas ou encore enclavée quelque part dans un Maroc profond. Détrompez-vous ! Car cette commune est située à quelques encablures seulement de la capitale, Rabat. Nous sommes dans la région du Gharb, à une vingtaine de kilomètres à peine de la ville de Kénitra. Et aussi choquant et inadmissible que cela puisse vous paraître ici, le sort des jeunes filles est aussi scellé que dans les campagnes les plus reculées. Contraintes d’abandonner l’école précocement, leurs rêves restent prisonniers des murs de la maison parentale. La seule issue qui se présente à elles est le mariage… et encore !

Rêves en suspens
Leurs histoires se ressemblent tragiquement, comme celle de Rachida, 18 ans. Elle aurait dû décrocher son bac cette année et avoir des rêves plein la tête. Elle aurait pu pousser ses études encore plus loin et se construire un bel avenir. Au lieu de cela, elle se retrouve confinée dans son douar, sans aucune perspective. “J’ai fréquenté l’école jusqu’à l’âge de 12 ans. J’étais brillante et je souhaitais de tout mon coeur aller au collège et ensuite au lycée. Mais cela n’a pas été possible. Le collège est tellement loin de là où j’habite qu’il m’était impossible de poursuivre ma scolarité. Il me fallait parcourir chaque jour une longue piste sur plus de 5 km avant d’atteindre la route nationale. Et de là, je devais encore trouver un moyen de transport pour parcourir dix autres kilomètres avant d’arriver au seul collège du coin, qui se trouve au village de Mograne. J’ai finalement été contrainte d’abandonner”. Rachida rêvait à l’époque de devenir femme-policière. Hélas, elle ne pourra jamais réaliser son rêve. “Mais je suis réconfortée à l’idée que ma soeur pourra peut-être le réaliser à ma place et qu’elle ne subira pas le même sort car elle a la chance de continuer ses études”. Sanaâ, la soeur de Rachida, a eu en effet une chance inouïe. Grâce à un centre d’accueil créé par le CSSF (Comité de Soutien de la Scolarisation des Filles rurales), elle a pu s’accrocher et se consacrer entièrement à ses études.

Lueur d’espoir

Ainsi, parallèlement à de tristes histoires comme celle de Rachida, d’autres destins plus optimistes sont permis grâce à l’engagement de la société civile. Dans la petite localité de Mograne, le centre d’accueil du CSSF fait de la résistanceet s’emploie depuis 2001 à mettre fin à l’hémorragie de déperdition scolaire dans la région. A l’origine de cette initiative, le programme “Une bourse pour réussir” mis au point par le Comité de Soutien de la Scolarisation des Filles Rurales. L’objectif de ce programme est de permettre aux filles rurales de poursuivre l’enseignement du premier cycle du secondairegrâce à l’ouverture d’un foyer d’accueil à proximité des établissements scolaires et à l’octroi d’une bourse mensuellede 350 DH par pensionnaire pour une durée de trois années. Le centre d’accueil de Mograne offre ainsi à une vingtaine de filles la chance que des dizaines d’autres n’ont pas eue. Celle de poursuivre leurs études et de se construire un avenir différent, à la hauteur de leurs ambitions. “Nous aurions aimé accueillir davantage de jeunes filles, mais malheureusement, le centre a une capacité d’accueil très limitée”, tient à préciser d’emblée le responsable du foyer, Mohamed Tabyaoui, lui-même vice-président du CSSF et président de l’Organisation Mohammedia du Scoutisme Marocain, partenaire qui s’occupe de la gestion du centre. C’est à lui, entre autres, que revient la lourde responsabilité de “recruter” les jeunes filles dans les douars alentour. “Selon nos estimations, elles sont chaque année une centaine de filles à devoir quitter l’école à cause de l’éloignement et du manque de structures d’accueil. Nous sommes obligés alors de procéder à une sélection assez rude. Nous les soumettons tout d’abord à des tests. Nous allons ensuite enquêter sur le terrain pour privilégier les filles qui ont le plus de difficultés (liées surtout à l’éloignement) à rejoindre le collège. Nous nous basons enfin sur l’envie des filles elles-mêmes de poursuivre leurs études et la volonté de leurs familles de les accompagner et de les pousser aussi loin que possible”. Une chose est sûre, les jeunes filles accueillies par le centre Mograne ont des rêves de réussite et des ambitions plein la tête. Certaines d’entreelles rêvent déjà de devenir ingénieurs, femmes-policières ou encore médecins.


Plus qu’un simple foyer
Et si aujourd’hui elles y croient aussi fermement, c’est qu’elles ont reçu un soutien en béton. Car le centre ne sert pas seulement à héberger ces collégiennes, comme dans un internat par exemple, puisqu’il s’implique également dans la construction de leur personnalité. “Nous insistons beaucoup sur l’éducation civique des pensionnaires. Celles-ci ont une occasion unique de partir en colonie de vacances, de faire des excursions, de participer à des colloques… Notre objectif est que ces filles deviennent actrices de développement dans leur propre environnement. Il y en a qui proposent des cours de soutien aux

“LES AUTRES FILLES N’ONT QUE LE MARIAGE EN PERSPECTIVE ; MOI JE POURRAI RÉALISER PLEIN DE CHOSES !”

enfants de leur douar. D’autres font un travail de sensibilisation (hygiène, santé, maladies sexuellement transmissibles,…) auprès de leurs mères, de leurs soeurs, de leurs cousines ou de leurs voisines. L’essentiel est qu’elles fassent profiter tout leur entourage de leurs connaissances”, tient à préciser Mohamed Tabyaoui. Le centre organise par ailleurs des ateliers créatifs qui servent à développer les aptitudes de ces filles et à participer à leur éducation au sens le plus large. Plusieurs de leurs “créations” sont d’ailleurs fièrement exposées à l’entrée du foyer. Et, parlons du foyer. Localisé de manière stratégique, il est situé au coeur de la commune de Mograne, à proximité du collège et de l’hôpital. Un petit “chez-soi” constitué d’une maison sur un étage composée de trois chambres, d’une pièce commune qui sert à la fois de salle à manger, de salle d’études et d’espace de loisirs, d’une cuisine, de sanitaires et d’un petit jardin. L’essentiel est là puisque grâce à ce foyer, les filles ont la chance de continuer à aller à l’école. On met tout à leur disposition : deux encadrantes veillent sur elles et une aide leur prépare les repas. Elles consacrent tout leur temps aux études. “Nous avons fait appel à deux encadrantes. Des professeurs de physique, de mathématique et de langue française viennent régulièrement donner des cours de soutien à nos étudiantes”, indique M. Tabyaoui.

Société en mutation
Et les résultats sont visibles : 100% des filles ont réussi en première et en deuxième années de collège. Les responsables du centre sont confiants pour les résultats de cette troisième et dernière année. Les anciennes pensionnaires continuent quant à elles leur bonhomme de chemin. Plusieurs d’entre elles poursuivent des études universitaires et certaines ont même pu accéder à de grandes écoles d’ingénieurs. Les habitants de la région sont très fiers d’elles. Une mutation est en train de s’opérer, doucement mais sûrement, dans les mentalités. De plus en plus de familles regrettent de ne pas avoir envoyé leurs filles à l’école. Les mères rêvent de voir leurs filles vivre autrement et devenir “quelqu’un”. Elles se disent alors prêtes à supporter seules toutes les corvées domestiques pourvu que leurs filles puissent aller à l’école. “Grâce aux médias notamment, ces communautés ont pu voir l’évolution de la situation de la femme au Maroc. Elles ne sont plus étonnées de voir des femmes exercer certains métiers et accéder à certains postes de responsabilité. Elles se disent que leurs filles auront peut-être pareille chance si elles arrivent à pousser leurs études assez loin”, explique Mohamed Tabyaoui. Selon ce dernier, certaines familles vont même jusqu’à s’endetter pour permettre à leurs filles, et à leurs enfants en général, de poursuivre leurs études. Ce qui est certain, c’est que la demande est très forte et que peut-être pour la première fois, les parents voient une chance de donner à leurs enfants un avenir meilleur. Le chemin sera long, mais il en vaut la peine.

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