L’amour du terrain…

Dans "Les ouvrières marocaines en mouvement", Leila Bouasria, à travers les problématiques cruciales de couple, met en exergue de nouveaux modes d'organisation conjugale, plus égalitaires et négociés, oscillant entre tradition et modernité...

FDM : Dans “Les ouvrières marocaines en mouvement”, Leila Bouasria, à travers les problématiques cruciales de couple, met en exergue de nouveaux modes d’organisation conjugale, plus égalitaires et négociés, oscillant entre tradition et modernité…

Leila Bouasria : A travers l’argent, la répartition des tâches ou les conflits se dégage la notion de rôle dans le couple. Pour ce qui est de la gestion de l’argent, on a cherché à savoir qui paie quoi, ainsi que la symbolique des investissements… Aborder l’origine différenciée des ressources dans un couple peut alors mettre l’accent sur un processus d’autonomisation, où la femme gère “son” argent. Sur le deuxième volet de l’ouvrage, le sens donné au partage des tâches indique les représentations sociales que ces ouvrières se font de leur fonction légitime au foyer. Certaines tâches sont devenues “négociables”, comme la cuisine ou la vaisselle ; mais seulement en privé ! Cette nouvelle reconfiguration des rôles permet d’analyser les résistances au changement. Elle intègre aussi la notion de conflit, qui peut surgir de toutes ces transformations, comme manifestation des ambiguïtés qui traversent cette recomposition des rôles.

L’argent rapporté par le salaire de l’ouvrière permet-il de s’orienter vers un mode de gestion plus moderne des dépenses ?

Dans les couples à double revenu, l’étude a révélé que le salaire de l’ouvrière était de plus en plus versé dans l’achat du logement, des meubles et les frais liés aux enfants. Le projet familial est donc de plus en plus porté par l’épouse, qui n’a pas vraiment le choix. Et l’investissement dans le bien immobilier peut être conçu comme un détachement de la dépendance conjugale au profit d’une approche plus individuelle, où le mari ne représente plus une garantie de protection contre un avenir incertain. Néanmoins, certaines vont recourir à une stratégie de dissimulation de l’argent. Ainsi, elles pourront mettre leur argent dans une tontine pour l’épargner, dans le but d’acheter un logement… En reléguant la paie des frais “visibles” au mari, elles évitent de faire circuler leur argent de façon palpable. Autrement dit, les ouvrières n’acceptent ce renversement que s’il est conjoncturel et inévitable, en attendant de rétablir chacun dans sa fonction initiale.

Les ouvrières perçoivent-elles leur travail comme leur conférant un certain pouvoir décisionnel, au sein du couple et de la société ?

La plupart d’entre elles affirment que ce travail est provisoire, en attendant que le mari retrouve un emploi stable. Car il s’agit avant tout d’un travail précaire qui s’exerce dans de mauvaises conditions, et auquel elles ont du mal à s’identifier ; ce qui les pousse à chercher à revenir au foyer, source alternative de légitimation. En définitive, même si le travail leur donne un pouvoir décisionnel dans le couple, elles continuent à prétendre que c’est “l’homme qui décide”, mobilisant plusieurs stratégies pour faire croire ou continuer à vivre dans l’illusion d’une division conventionnelle des rôles. Dans leurs représentations, l’égalité renferme le risque de voir les femmes dominer les hommes. D’un autre côté, si la mainmise sur la gestion financière peut paraître comme signe d’émancipation féminine, elle peut aussi constituer un double piège en augmentant la charge mentale de travail, et en limitant l’accès aux dépenses personnelles. Néanmoins, cette étude a permis de démontrer que, dans la société marocaine, on est de moins en moins dans un schéma de rigidité de statuts prédéfinis à l’avance, et que la tradition se renouvelle, pour intégrer des référents nouveaux de modernité

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