La protectrice du patrimoine

FDM : Quelles sont les causes qui vous tiennent à coeur et au nom desquelles vous vous engagez ? Badria Ahardane : Du temps où j'étais journaliste à la radio, je me suis beaucoup investie dans le secteur de la santé au Maroc. Comment aurais-je pu faire autrement ? Quand je partais en reportage sur le terrain, j'étais témoin de nombreuses horreurs et j'étais donc bien placée pour savoir à quel point ce secteur était laissé pour compte. C'est d'ailleurs ce qui m'a poussée à créer le magazine "Bien-être & Santé", publié pendant quatre ans. A Médi1, dans les années 80, nous étions aussi les premières à parler du sida, du divorce, de la kafala... Puis, il y a quelques années, grâce à une émission que j'animais à la radio, j'ai découvert l'éc

Pour vous, que signifie être féministe ?

Cela me renvoie à quelque chose qui ne m’appartient pas, dans quoi je ne me reconnais pas. Je ne suis pas une “soixantehuitarde”, j’appartiens à une autre époque. C’est vrai, il faut admettre que grâce au féminisme, nous avons pu obtenir beaucoup de choses, nous les femmes, mais c’est un modèle très occidental qui ne me parle pas. Vous l’aurez compris, je n’aime pas du tout le terme “féministe” et je ne considère pas en être une. Je suis une fervente protectrice de notre patrimoine arabo-usulman, de nos traditions, et je pense qu’il ne faut pas mettre de côté notre “way of life” au profit de la modernité.

Que reprochez-vous à la modernité ?

Aujourd’hui, il faut admettre que le modèle européen et l’image de modernité qu’il véhicule sont en échec. Et en temps de crise, on a tendance à se retourner vers des valeurs refuges. A mon sens, la modernité, ce n’est pas exposer son corps, ce n’est pas s’enivrer ou prendre autre chose en soirée parce que ça fait bien, ce n’est pas non plus accepter ce que l’Europe a fait de la femme en la transformant en produit d’appel dans la pub entre autres. La modernité, c’est une façon d’être, et être moderne, c’est savoir tirer de notre patrimoine, de notre identité personnelle, de notre civilisation les plus belles choses pour les adapter à notre temps. Notre défi aujourd’hui, c’est de trouver un savant dosage entre un modèle importé universel et ce qui nous appartient.

Que pensez-vous du mouvement féministe marocain ?

La question est plutôt : “Y a-t-il un mouvement féministe marocain ?”. A mon sens, il n’y a pas de mouvement, il y a des idées, des gens, des intellectuels qui ont élevé la voix il y a quelques années pour parler de sexualité, d’égalité entre hommes et femmes. Je suis pour la parité des droits entre hommes et femmes, mais je ne suis pas pour l’égalité des sexes. Je considère que nous avons des identités totalement différentes et complémentaires, et je tiens à ma personnalité et à ma féminité. Selon moi, nous avons chacun notre rôle à jouer au sein de la société et de la famille. Toutefois, j’exige d’avoir les mêmes droits que nos hommes ! C’est sur cela qu’il faudra travailler… et ce n’est pas une mince affaire !

Vous êtes à l’origine, sur Facebook, du groupe “Femmes compétentes pour un Maroc meilleur”. Dans quel but l’avez-vous créé ?

A l’origine de ce groupe, il y a un coup de gueule. J’étais hors de moi en découvrant qu’une seule femme avait été nommée au sein du gouvernement de Benkirane, pour qui j’ai pourtant beaucoup de respect. Mais qu’est-ce que ça signifie ? N’avonsnous pas de femmes managers, compétentes, qui ont des idées innovantes, qui ont des choses à dire ? Il y a pourtant tellement de compétences au sein du MP, du PPS et même du PJD ! Malheureusement, faute de pouvoir s’exprimer dans les hautes sphères, prendre des décisions et partager de nouvelles visions, beaucoup de femmes ont opté pour le milieu associatif. Au-delà de l’épanouissement personnel que cela leur apporte, c’est aussi une façon de faire bouger les choses. Aujourd’hui, il n’est plus question de faire l’impasse làdessus.

Ce groupe sur Facebook, c’était donc une manière de taper du poing sur la table et de dire : on est là, on exige d’être écoutées, de faire partie de tout cela, de tout ce qui est en passe d’être mis en oeuvre ; les femmes ont tellement travaillé et porté ces changements opérés dans notre société qu’elles le méritent et qu’elles y ont droit. Oui, c’est une exigence !

Les femmes militent-elles différemment aujourd’hui ?

Oui. Grâce aux réseaux sociaux, des voix s’élèvent, on parle, on découvre des gens d’une grande richesse. Ces réseaux sont incontournables et sont en train de donner naissance à quelque chose de nouveau. Toutefois, il faut que ce phénomène se structure car pour l’instant, j’ai l’impression que chacun milite de son côté avec le peu de moyens dont il dispose. â– 

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