j’ai mis fin aux achats compulsifs

Après l’échec d’une énième psychothérapie destinée à mettre fin à son addiction, Nadia a puisé au fond de son être l’énergie nécessaire pour guérir des pulsions qui la poussent à procéder à des achats compulsifs. Récit.

Je ne sais pas quand ce mal m’a frappée pour la première fois, mais je situe exactement le moment où le processus de guérison s’est enclenché : le 15 décembre 2013. Je venais d’entasser mes achats dans le coffre de ma voiture et en claquant la porte, j’ai été prise de nausées qui ne m’ont pas lâchée tout le long du trajet.

Une fois de plus, j’ai succombé à la frénésie de la consommation en achetant beaucoup de choses, trop vite, sans discernement.

Une fois de plus, j’ai glissé dans cet état grisant de perte de contrôle qui m’a conduite, il y a quelques années, à consulter un psychologue pour comprendre les mécanismes sous-jacents de ma conduite addictive.

Consciencieusement, en suivant le protocole mis en place par la spécialiste, j’ai essayé de trouver l’origine de mon mal dans une défaillance originelle remontant à mon enfance.

Une défaillance qui, dixit ma psy, “aurait empêché l’élaboration du processus d’autonomie, lequel induit une relation addictive à la figure de la mère.” Toujours d’après elle, l’adulte que je suis devenue est “psychiquement contrainte à chercher un objet-substitut dans le monde extérieur.” Chacun son addiction pour apaiser son angoisse.

La mienne, c’est l’achat compulsif de fringues. C’est certes moins nocif pour la santé que l’alcool ou les drogues dures, mais c’est une pathologie qui implique une souffrance lancinante qui n’induit aucune marque de sympathie ou d’empathie de la part d’autrui.

On peut avoir de la compassion pour un alcoolique ou un accro aux jeux de hasard, mais comment en avoir pour une quadra nantie, gâtée par la providence ? Je ne peux pas expliquer à mes proches le vide atroce que j’éprouve quand je ne succombe pas aux achats.

Comment leur faire comprendre le manque, qui va jusqu’au vertige physique ? On a honte d’en parler, d’évoquer cette spirale du rituel jouissif qui consiste à claquer un maximum de fric pour des emplettes inutiles.

Parce que mes achats compulsifs ne répondent à aucun besoin. Ils assouvissent une pulsion incontrôlable. Souvent, je ne porte pas mes achats. Parfois, je ne les essaie même pas.

D’après ma psy, je serais la candidate parfaite aux achats compulsifs qui seraient le seul espace où je m’autoriserais un lâcher-prise… pathologique ! Car aucun interstice dans mon emploi du temps de chef de division n’échappe à une programmation rigoureuse. Ma vie d’épouse et de mère est réglée comme du papier à musique.

Ma psy a probablement raison. Mais des mois de thérapie comportementale cognitive et d’autres dédiés à une psychanalyse ne m’ont pas sevrée. Et j’en étais là, ce fameux dimanche 15 décembre 2013.

Ce jour-là, arrivée à la maison, j’ai décidé d’effectuer un check-up de ma garde-robe.

Mon dressing débordait de fringues achetées à la va-vite. Une colère noire m’a envahie, laquelle m’a dicté l’abstinence. Mes psychothérapies ayant été des échecs, j’ai décidé de me soigner à ma façon. Je suis du signe de la balance, je crois au juste milieu.

J’ai décidé de ne plus acheter de vêtements jusqu’à épuisement de mon stock, d’affronter l’hiver et l’été avec le contenu épuré de mon dressing. J’ai mis un mois à faire le tri.

À chaque crise, au lieu de faire les magasins, je mettais de l’ordre dans mon armoire. Un profond sentiment de honte m’envahissait à chaque fois que je tombais sur le même article décliné en plusieurs couleurs.

Comment ai-je succombé à cette folie ? Moi qui gère tous les aspects de ma vie, de mon quotidien depuis mes 17 ans, depuis l’obtention de mon bac et mon départ en France pour suivre un cursus universitaire sans la moindre faute de parcours.

Moi, la divisionnaire connue et admirée pour sa maîtrise parfaite des événements… Comment en suis-je arrivée à subir la fringale d’achats compulsifs de vêtements ? Comment expliquer que je sois incapable de résister à des morceaux de tissu alors qu’à la moindre incartade lors de repas d’affaires, par exemple, je n’hésite pas, dès le lendemain, à me lever avant le soleil pour aligner plusieurs kilomètres de jogging afin de garder la ligne? Qui est cet autre moi-même, ce double qui succombe à la fébrilité de fouiller dans les bacs, de courir les boutiques pour ramener des vêtements, de la lingerie, des chaussures qui ne correspondaient pas toujours à mes goûts mais qui assouvissaient ce désir de décharge d’adrénaline? Je n’ai pas fini de sonder les tréfonds de cet autre moi.

La vie est courte, la psychanalyse trop longue, j’ai décidé de guérir à ma façon, de me désintoxiquer par la manière forte : me sevrer en remplaçant la décharge d’adrénaline due à mes achats par la quête d’un défi, celui de la préparation des semi-marathons et marathons auxquels des amies sont fidèles.

Courir au sens propre au lieu de courir les boutiques. Une foulée après l’autre pour remplacer les reflexes de consommatrice frénétique par d’autres. L’oxygène des grands espaces, la chlorophylle pour me désintoxiquer.

Courir est un beau défi pour me prouver que je pouvais, si je le voulais, avec acharnement, reprendre le contrôle de ma vie.

Un challenge que j’ai su relever. Nous sommes à la veille du nouvel an. Et hormis des articles de lingerie indispensables, je n’ai rien acheté depuis mon sevrage. Je rends visite régulièrement à mon couturier qui effectue des ajustements de mes ensembles, car depuis que je cours régulièrement, je perds graduellement du poids.

J’essaie cependant de ne jamais glisser dans l’excès et de ne surtout pas faire du jogging une autre pratique addictive ! Je suis retournée vers ma généraliste qui me connaît depuis des décennies.

Je lui ai raconté mon calvaire. Et à chaque fois que je vais lui demander un certificat médical pour participer à un semi-marathon ou à un marathon, on fait le point. On évoque ensemble les aspects physiques et psychologiques de ma nouvelle lubie. Cela me rassure et m’aide à persévérer. Et je suis fière du chemin parcouru.

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