Fadila El Gadi Moroccan touch à Paris

La fashion designer Fadila El Gadi vient d'ouvrir son showroom dans l'un des plus prestigieux quartiers parisiens. Elle y expose des collections contemporaines, portant toutes un cachet marocain reconnaissable entre mille. Rencontre avec une styliste qui a su imposer sa signature dans le milieu de la haute couture.

FDM : Vous venez d’inaugurer votre showroom à Paris. Pourquoi cette ouverture dans la capitale de la mode ?

Fadila El Gadi : J’avoue que cette ouverture parisienne est le résultat d’un vieux rêve que j’ai finalement réussi à concrétiser. Après l’ouverture de mon principal showroom à Marrakech, puis de ma boutique de Tanger qui n’ouvre que l’été, j’ai lancé mon nouvel espace parisien en décembre dernier. Il est situé au 8 bis, avenue Percier, dans le 8ème arrondissement. J’y reçois une clientèle assez sélective et discrète, qui vient sur rendez-vous et aime bien les pièces uniques.

 

D’où vient cette envie de partager vos créations avec une clientèle occidentale ?

Mes créations ont eu beaucoup de succès auprès des étrangers, notamment la clientèle française de passage à Marrakech. Beaucoup de ces femmes sont devenues des habituées. Depuis, j’ai toujours nourri le rêve de les suivre à Paris, dans un contexte de mode vraiment parisienne. En ouvrant mon showroom là-bas, je n’ai fait que me rapprocher d’elles finalement. 

 

Quel style de clientèle est attiré par vos créations ?

Des femmes du monde cosmopolite qui voyagent et qui sont curieuses des autres cultures. Pour mon showroom parisien, ma clientèle, hommes et femmes, est autant composée de Français qui aiment le Maroc, que de Marocains qui aiment Paris.

 

Y a-t-il des célébrités qui s’intéressent à cette touche marocaine ?

Je ne peux pas toutes les citer car j’ai un devoir de réserve. Mais je peux vous dévoiler quelques noms comme l’actrice et chanteuse Arielle Dombasle, la comédienne Marisa Berenson, le chanteur Marc Lavoine. Dernièrement, j’ai eu la surprise de recevoir la visite de la grande Barbara Streisand, qui a fait une razzia. J’ai aussi le plaisir d’avoir comme cliente régulière la réalisatrice marocaine Narjiss Nejjar, qui me fait le bonheur de porter mes créations en toutes circonstances.

 

Les créations inspirées du caftan attirent donc les occidentales…

Cela dépend de ce qu’on appelle “caftan”. Le caftan makhzani, comme je l’aime, est un vêtement qui est et restera marocain. En revanche, il ne faut pas oublier que dans les années 60 et 70, le caftan simplifié a aussi été exporté. Elizabeth Taylor en a d’ailleurs beaucoup portés. Une couturière comme Zina Guessous, dont le travail reste méconnu par la nouvelle génération, a habillé la reine Beatrix de Hollande en caftan.

 

Quelle est la particularité des créations que vous exposez à Paris ?

Ce sont les mêmes que celles que j’expose au Maroc. Comme vous le savez peut-être, ma marque de fabrique est d’allier le travail artisanal marocain à une vision internationale du vêtement. Ça marche partout.

 

Comment peut-on définir votre style ?

Je ne suis pas du genre à m’enfermer dans un carcan. Disons que j’aime particulièrement les matières, jouer des contrastes et actualiser l’héritage artisanal marocain.

 

Votre style coupe-t-il les ponts avec le caftan ou s’en inspire-t-il ?

Je ne travaille pas sur le caftan. J’ai d’ailleurs un seul et unique modèle qui s’en inspire et qui est devenu un classique. C’est un caftan droit en khrib, qui se porte systématiquement ouvert, comme un manteau sur un habit du soir. Mais la place de l’artisanat marocain dans mes créations est centrale. Je n’imagine pas un vêtement sans broderie ni passementerie. Sans cet artisanat et le savoir-faire de mes brodeurs marocains, mon travail n’aurait pas la même valeur, ni le même “éclat”.

 

Qu’est-ce qui vous pousse à mettre en avant le savoir-faire de ces artisans ?

A Salé, dans ma famille, on envoyait les petites filles apprendre la broderie chez les maâlmates. J’ai grandi dedans, et c’est tout naturellement que j’utilise aujourd’hui ce que j’ai appris hier. L’avantage

de la broderie est qu’elle peut orner tout type de vêtement, même le plus contemporain. Et par ces temps d’industrialisation massive, le fait main est très recherché dans le monde entier. Notre pays a la chance d’avoir conservé des savoir-faire ancestraux exceptionnels, et il est du devoir de tout designer marocain de mettre en valeur cette richesse. J’ai la chance de travailler avec une équipe aux compétences multiples dans mon atelier. On fait aussi bien r’batie que slaoui, le point de Fès ou chbika, sans compter le travail du maâlem.

 

Quelles sont vos sources d’inspiration ?

Ce qui m’inspire principalement, ce sont les voyages et le cinéma. Par exemple, au Vietnam, j’ai trouvé des broderies anciennes qui rappellent étrangement le point de Fès. Un autre grand souvenir est la visite du musée des arts islamiques à Doha, au Qatar, où j’ai vu de magnifiques bijoux arabes d’antan. A Istanbul, j’ai trouvé une sorte d’antiquaire qui vendait des tenues anciennes traditionnelles d’Asie centrale extraordinaires de beauté, de simplicité et d’élégance… Je voyage aussi à travers les livres… La broderie française du 18ème siècle me touche. Il ne faut pas oublier que les tissus utilisés dans les vieux caftans marocains étaient des brocarts lyonnais. Finalement, je m’inspire autant des détails ethniques que de la grande tradition citadine française ou ottomane. Quant au cinéma, cela concerne plutôt la coupe de certains modèles, comme par exemple les robes que portait Ismahane. J’adore aussi la période “Givenchy/Audrey Hepburn”. Il m’arrive d’avoir une sorte de flash lorsque je flâne dans le souk de Salé à la recherche de sabra. Une autre voie de création chez moi est de réfléchir avec des artistes de domaines différents pour créer, comme par exemple avec les artistes plasticiens Mohamed El Baz et Chourouk Hriech, avec qui je prépare quelque chose pour fin juin…

 

Que pensez-vous de l’évolution du caftan et du travail qu’effectuent les stylistes actuellement ?

Contrairement à ce qu’on croit, le caftan a toujours évolué. Il suffit de regarder les photos de nos mères et grandsmères. Dans les années 50 et 60, par exemple, le caftan répondait aux normes internationales. Il était cintré et se portait avec des manches troisquarts, le tout porté avec un chignon haut. Il est donc naturel que le caftan épouse l’ère du temps. Mais je vous avouerais que je reste réservée sur les extravagances qu’on voit trop souvent défiler sur nos podiums après une certaine folie de ces dernières années. Je pense, mais ça n’engage que moi, qu’on devrait revenir à plus de pureté dans la ligne et utiliser sa capacité créative au niveau du choix des matières, des broderies et de la passementerie.

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