Des parents “kafils” témoignent

Aujourd’hui, au Maroc, parler de kafala est encore trop souvent jugé tabou. De peur des réactions de leur entourage, des a priori de la société ou de briser le lourd secret qui les lie à leur enfant, beaucoup de parents “kafils” préfèrent ne pas témoigner de leur expérience.

Amalia, célibataire quadragénaire, future mère “kafila” de Issam, 8 mois

Je ne suis pas mariée et n’ai jamais eu d’enfants. J’ai choisi le Maroc pour adopter car il est vrai que la proximité géographique avec mon pays, l’Espagne, est un gros avantage. Par le biais d’une association espagnole regroupant les parents ayant eu recours à la kafala, j’ai pu me renseigner sur les démarches à suivre et il y a quelques mois, je me suis jetée à l’eau. Je me suis bien entendu convertie à l’Islam et chaque jour, je travaille pour en apprendre un peu sur cette religion mais également sur la culture marocaine. J’ai d’ailleurs commencé à lire et à écrire l’arabe. Je pense qu’il est important que mon enfant soit élevé dans sa culture d’origine.

Une fois ma demande de kafala déposée auprès du juge de tutelle, j’ai eu l’autorisation de me rendre au centre Lalla Meriem à Rabat pour y rencontrer mon futur enfant. Le petit bébé que l’on m’a présenté était alors à peine âgé de 6 mois et il était dans un état de santé désastreux. Né prématurément, il ressemblait à une minuscule crevette. J’ai tout de suite eu le coup de foudre pour lui. Pour le voir le plus possible, je faisais l’aller- retour entre le Maroc et l’Espagne quasiment toutes les semaines. Un jour, alors que j’arrivais à l’orphelinat, le personnel m’a informée qu’il était gravement malade et qu’il avait été admis d’urgence à l’hôpital. Issam était allergique au lait de vache. Je l’ai veillé pendant plusieurs jours et j’achetais moi-même les médicaments dont il avait besoin pour être sûre qu’il ait tout ce qu’il faut. Depuis, deux mois ont passé et il se porte beaucoup mieux. Je suis allée le chercher ce matin à l’orphelinat pour ne plus jamais le quitter car c’est aujourd’hui que l’on va me remettre officiellement sa garde.

Sylvie et Cyril, parents biologiques d’un garçon de 10 ans et candidats à la kafala

L’envie d’adopter un enfant nous est venue il y a quelques années. Nous avons eu la grande chance d’avoir un enfant et nous souhaitons plus que tout pouvoir à nouveau partager ce même bonheur avec un enfant abandonné ou orphelin. Nous avons entrepris les démarches d’adoption en Suisse, notre pays de résidence, il y a plus de deux ans et demi afin de pouvoir prétendre à une adoption internationale. L’année dernière nous avons enfin été reconnus comme des parents  aptes à entreprendre une adoption à l’étranger. Notre choix s’est alors porté sur le Maroc, question de proximité géographique et culturelle. Sans compter que les allers- retours entre la Suisse et le Maroc coûtent moins chers que vers d’autres destinations plus lointaines. Au début de l’année, nous nous sommes convertis à l’Islam, premier critère pour pouvoir entreprendre une kafala. Si Cyril lit beaucoup de livres sur cette religion et essaie de s’en imprégner au maximum, j’avoue avoir un peu plus de mal à m’y mettre. Il est vrai que si nous nous sommes convertis, ce n’est pas par conviction mais pour pouvoir adopter au Maroc. Nous revenons au Maroc aujourd’hui pour la deuxième fois et nous devons rencontrer ce matin le juge de tutelle pour lui présenter notre demande de kafala.

Naïma, 45 ans, mère “kafila” d’un petit garçon et bientôt d’une petite fille

Je suis mariée depuis 19 ans et mon mari et moi n’avons malheureusement jamais pu avoir d’enfants. J’ai souffert de cette situation pendant de nombreuses années jusqu’au jour où nous avons décidé de prendre en charge un enfant. Il y a deux ans, nous sommes tombés fous amoureux de notre fils qui était à peine âgé de 3 moisquand il nous a été présenté. Mon mari qui n’a jamais été très porté sur les enfants en est littéralement gaga. Il n’a qu’une seule hantise, c’est qu’on nous le prenne. Il se méfie de tout le monde. Cet enfant a réellement fait notre bonheur et ma peine de ne pas pouvoir enfanter s’est volatilisée. Il est tellement beau, intelligent, sensible et chose étrange, il ressemble de plus en plus à son père ! Quand nous l’avons recueilli, sa peau et ses cheveux étaient sombres alors que nous sommes très blancs de peau. Aujourd’hui, ses cheveux se sont éclaircis et sa peau est plus claire que la nôtre. C’est étrange, j’ai déjà constaté ce phénomène chez d’autres parents “kafils”… leurs enfants leur ressemblent de plus en plus au fil du temps. Nous avons décidé il y a quelques mois de donner une petite sœur à notre fils et nous sommes en pleines démarches pour obtenir sa garde. C’est une petite fille de 3 mois. Je viens la voir autant que possible en attendant qu’elle nous soit confiée. Sa chambre est déjà prête et son frère l’attend. Je ne veux pas que mes enfants aient à souffrir un jour en raison de leurs origines et je préfère leur dire la vérité très tôt. Ainsi, j’ai déjà commencé à préparer mon fils. Je lui explique que certaines mamans  portent leur enfant dans leur ventre avant de le mettre au monde et que d’autres sont des mamans de cœur qui n’accouchent pas de leur bébé. Il sait donc qu’il n’est pas sorti de mon ventre mais que je suis sa maman de cœur.

Youssef et Angeles, 45 ans, parents “kafils” d’un petit garçon

Nous avions envie d’adopter un enfant depuis de nombreuses années et ce souhait s’est concrétisé au Maroc. Le hasard a fait que c’est grâce à une erreur que nous avons rencontré pour la première fois notre fils. Nous avions entamé les premières démarches de kafala auprès de l’orphelinat puis est venu le jour où un enfant devait nous être présenté. Le petit garçon qu’on nous a amené n’était pas le bon et alors que la direction s’apprêtait à aller chercher l’autre petit garçon, nous avons refusé, c’était ce premier petit garçon que nous voulions. Si le hasard avait ainsi fait les choses, c’est qu’il y avait une bonne raison à cela. On nous a expliqué que son jugement d’abandon n’avait pas encore été prononcé et que les procédures de kafala prendraient donc beaucoup de temps. Mais peu nous importait, nous attendions déjà depuis tellement d’années ce jour, nous pouvions bien encore attendre pour lui, maintenant que nous l’avions enfin rencontré ! Nous avons entamé les procédures d’adoption au mois de juin mais durant 4 mois, nous avons vécu un véritable enfer. A aucun moment nous n’avons eu l’impression d’être aidés. Tout semblait jouer contre nous et en particulier les lenteurs administratives. Nous avons consacré nos journées entières à entreprendre les démarches pour obtenir la garde de notre fils et rien n’était possible sans pot de vin. Nous sommes vraiment dégoûtés par ce système. C’est à n’y rien comprendre. Les orphelinats au Maroc sont bondés d’enfants qui n’attendent qu’une chose : être aimés au sein d’une famille d’accueil. Mais les autorités semblent voir les choses différemment et font exprès de tout compliquer. La prochaine fois que nous adopterons, ce ne sera certainement pas au Maroc car cette situation nous a beaucoup fait souffrir. C’est malheureux à dire car ces enfants sont tellement attachants. Ils ne méritent pas cela. Depuis deux semaines, nous avons enfin obtenu la kafala provisoire de notre fils de deux ans qui vit désormais avec nous en attendant la kafala définitive. Il est fantastique et tellement intelligent.

 

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