Dahab Benkirane, designer haute couture

Installée à Dubaï depuis quelques mois à peine, la jeune Dahab, 26 ans, ne cache pas son ambition : perpétuer l’héritage familial. Alerte et objective, cette jeune entrepreneuse se bat pour gagner la confiance et la fidélité d’une clientèle pleine d’a priori, constituée à 20 % d’Emiraties et à 80 % de Marocaines mariées à des locaux…

Quel a été votre parcours avant votre installation aux émirats ?

J’ai fais HEC Bruxelles avant d’obtenir un master en marketing à Paris XII. Mais j’ai grandi au milieu d’étoffes et de machines à coudre… et j’ai décidé de  m’orienter vers ce domaine et de reprendre le business familial tout en y apportant une touche personnelle.

être marocaine, c’est un atout dans la pratique de votre métier ?

Bien au contraire. Même si les clients recherchent la qualité de travail et l’expertise marocaine, il y a toujours cet a priori envers ma nationalité. Depuis le premier défilé que j’ai présenté à Dubaï, je suis régulièrement contactée via les réseaux sociaux pour des partenariats ou des sponsorings avec des sous-entendus qui me mettent mal à l’aise.

Comment justifiez-vous ce comportement ?

Je comprends parfaitement ce genre d’attitude. Si, aujourd’hui, les femmes marocaines qui s’expatrient au Moyen-Orient ont pour vocation d’embrasser de brillantes carrières, ce n’est pas le cas de la première vague d’immigration, qui avait pour but affiché de se trouver des maris. La plupart de mes clientes sont des femmes marocaines qui sont les deuxièmes épouses de locaux et sont considérées comme des  voleuses de mari.

Mais cette réputation est-elle vraiment toujours d’actualité ?

Non ! Car d’une part, la mentalité des femmes marocaines a changé, elles travaillent à la sueur de leur front, et le mythe du prince saoudien avec ses millions de dollars ne fait plus rêver… D’autre part, celle des jeunes hommes émiratis a également évolué. Ils ne sont plus tentés par ces belles maghrébines qui en veulent à leur argent et surtout, ils sont fortement conseillés par leurs mères, qui les dissuadent de suivre le chemin de leurs aînés. à présent, ce sont les Syriennes qui , de par le conflit qui gangrène leur pays, constituent des cibles de choix. C’est une sorte de mercato avec ses tendances.

A votre avis, comment changer les mentalités ?

Il faudrait commencer par sensibiliser à la source. Dire à nos femmes que nous avons “lkhir f’bladna” ! Ici, celles mariées à leur riche époux vivent dans des prisons dorées. Les familles et les autorités marocaines doivent “éduquer” nos filles, afin de leur montrer d’autres alternatives. Je connais ici des femmes complètement malheureuses, sous antidépresseurs. Elles sont coiffeuses, danseuses, chanteuses ou tout simplement femmes de riches locaux, mais si leurs comptes en banque ne se ressemblent pas, elles sont toutes dans le même bateau de la misère affective et sociale.

www.dahabdesign.com

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