Le premier ouvrage d’érotologie connu dans le monde arabe remonte au XVème siècle. Écrit par un érudit du nom de Cheikh Nefzaoui, l’ouvrage intitulé “La Prairie parfumée” ou encore “Le Jardin parfumé pour le plaisir des cœurs” traite de la sexualité sous ses multiples facettes. Cette anthologie du plaisir amoureux, de la volupté est un hymne à l’amour courtois mais aussi charnel, à la passion qui jette les amoureux dans des ébats jouissifs. “Louange à Dieu qui a mis le plus grand plaisir des hommes dans les parties naturelles des femmes et qui a fait consister celui des femmes dans les parties naturelles des hommes”, note l’honorable Cheikh. L’acte de chair est délicieusement codifié, et le corps féminin est assimilé à une sorte de paradis terrestre. “L’amour charnel est une bénédiction, an-nikah ishsân, reconnaît la tradition de l’Islam qui considère tout amateur de chair comme un être aimé par Dieu et favorisé par la nature. C’est ici que le Kama-Sutra arabe se confond littéralement avec le Kama-Sutra du sage indien Vatsayana [IVème siècle]. Quand le jouir devient une vénération, l’acte de chair ne peut être que son rosaire”, écrit pour sa part Malek Chebel dans un ouvrage publié en 2006 aux éditions Pauvert et intitulé “Le Kama-Sutra arabe”.
L’objet de cet article n’est point de parler des intégristes qui diabolisent la sexualité, mais plutôt de l’acte charnel qui invite les époux à l’épanouissement sexuel, selon les recommandations de l’islam. “Une fois qu’il a satisfait son plaisir, l’homme doit patienter jusqu’à ce que son épouse satisfasse son appétit également. Si l’homme se retire, cela peut décupler le désir inassouvi de la femme, ce qui constitue un tort à son encontre. La non-coïncidence temporelle des orgasmes impose à l’homme de se retenir, aussi précoce soit-il”, explique le plus sérieusement du monde Cheikh Youssef Al-Qaradawi, président de l’Union mondiale des oulémas musulmans.
Les aphrodisiaques naturels
Faire l’amour est donc un devoir sacré, et aboutir à la jouissance en est le but ultime. Pour y parvenir, les aphrodisiaques se révèlent d’une aide précieuse, et ce n’est donc point étonnant si Cheikh Nefzaoui y consacre près du tiers de son ouvrage. Les herbes et les plantes censées décupler le plaisir sexuel, l’entretenir, l’intensifier et le faire durer ont suscité l’intérêt de l’être humain depuis la nuit des temps. Et dans nos souks, les marchands continuent à ce jour à vendre ces potions magiques garants de puissance sexuelle et des remèdes à même de donner force et vigueur à une sexualité virile agonisante. Le “viagra” marocain est exposé sur les étals des herboristes, et a pour nom ginseng, bois bandé, gingembre, noix de galle, feuilles de myrte, grenadier ou encore cérat… Les femmes ne sont pas en reste, et certains produits aphrodisiaques naturels leur sont particulièrement destinés comme el gouza sahraouia… En outre, la consommation de certains aliments peut aider à améliorer la libido. C’est le cas des jus de légumes crus et frais, des graines germées, des huîtres, connues pour leur richesse en zinc ou encore des algues, riches en minéraux et oligo-éléments. À cet égard, une alimentation saine et équilibrée favorisera la production des hormones sexuelles (testostérone / oestrogènes) et permettra une meilleure gestion de sa libido et de sa sphère intime.
Jouer sur les sens avec des odeurs, des senteurs et des huiles essentielles (comme le ylang-ylang, une huile féminine et sensuelle ou le bois de Siam dont l’odeur peut émoustiller les sens de ces messieurs). La lingerie sexy est également un formidable booster du désir. L’excitation visuelle, olfactive (l’odeur subtile secrétée par les glandes sudoripares apocrines) verbale (les mots doux ou salaces échangés par les amoureux pendant l’union) ont le pouvoir de stimuler tous les sens.
Objets coquins
Pour booster la libido et faire chavirer les corps, certains couples ont recours à des objets coquins, comme les sextoys. Interdits à la vente dans le pays, ces objets de plaisir sont souvent introduits sous le manteau. “Les sex toys ou jouets sexuels existent depuis plus de 3000 ans, en Grèce et en Asie Mineure”, rappelle la sociologue Soumaya Naamane Guessous. Prescrits plus tard pour un usage médical, puisqu’ils servent au XIXème siècle à “soigner les femmes de certaines perturbations psychologiques, telles l’hystérie et la névrose, considérées depuis l’antiquité comme résultant du manque de satisfaction sexuelle”, souligne la sociologue. Le vibromasseur devient un objet banal de la révolution sexuelle et un moyen d’émancipation des femmes dans les années 60 en France. Dans cette panoplie d’objets pour stimuler le désir, on trouve également les lubrifiants et les stimulants sexuels aux odeurs enivrantes ou même les films X visionnés durant les ébats.
Utilisés à petites doses, ces stimulants augmentent l’intensité du plaisir. Mais gare à l’accoutumance qui conduit à l’addiction et à la dépendance.
Par Shéhérazade Tamime