L’enseignement privé marocain à la loupe

Le secteur privé a la cote au Maroc. L’école privée sous système marocain attire plus de 1,2 million d’élèves, représentant 15% de la population scolaire. Mais qui se cache derrière ces établissements ? Comment sont-ils encadrés ? Le point.

Longtemps perçu comme une école réservée aux élèves médiocres, l’enseignement privé a su, en quelques années, changer son image. Face aux limites présentées au niveau du public, de nombreux parents se sont tournés vers ce type d’enseignement qui offre une diversité de structures : missions étrangères, écoles bilingues ou internationales, 

Pour l’année scolaire 2023-2024, plus de 1,2 million d’élèves ont fréquenté les 7 564 établissements privés relevant du système marocain, dont 70 % des élèves inscrits au primaire, encadrés par près de 78 500 enseignants, comme relevé auprès du ministère de l’Éducation nationale, du Préscolaire et des Sports (MENPS). Des chiffres impressionnants qui masquent néanmoins un déséquilibre géographique. En effet, les deux-tiers de ces écoles se concentrent dans trois régions (Casablanca-Settat, Rabat-Salé-Kénitra et Fès-Meknès). Pour Mohamed Nedali, auteur de “L’école marocaine, diagnostic d’un ex-enseignant” (Éditions La Croisée des Chemins), ces écoles restent un refuge pour la classe moyenne inférieure et certaines familles modestes qui, pour cela, consentent d’énormes sacrifices financiers, tandis que les ménages aisés se tournent vers les missions étrangères, perçues comme plus prestigieuses  et offrant un meilleur accès à l’international.  Le privé est censé jouer un rôle de soutien au public pour des catégories spécifiques. “À ce jour, ni bourse ni aide financière directe ne sont accordées aux familles scolarisant leurs enfants dans le privé. Pourtant, l’article 13 de la loi-cadre 51.17 stipule que les établissements privés sont tenus de respecter les principes du service public, de contribuer à l’éducation des catégories défavorisées, et de pourvoir aux besoins en personnel qualifié”, indique le département de tutelle  Et de poursuivre : “Dans cette perspective, le ministère prépare actuellement un projet de décret définissant les modalités et le pourcentage de gratuité partielle ou totale que devront assumer les établissements au profit de ces catégories.”

Derrière ces murs

Le secteur de l’enseignement privé est ouvert à tout investisseur, qu’il soit marocain ou étranger, sans condition spécifique, comme le stipule le MENPS. “Le fondateur d’un établissement peut-être une personne physique ou morale, précise Abderrahmane Lahlou, consultant en éducation et directeur général du Groupe Madina Schools. Il n’y a pas de prérequis particuliers, sauf de démontrer la viabilité du projet à travers un Business Plan, et d’une information sur le montant de l’investissement à mettre en œuvre pour sa réalisation” Ainsi ces porteurs de projets peuvent ouvrir des écoles avec une liberté quasi totale: lieu d’implantation, type d’enseignement dispensé, niveaux scolaires… “Ils sont également libres de fixer les frais de scolarité, ces derniers étant régis par le principe du marché (offre et demande)”, ajoute le ministère. Et les enseignants et cadres éducatifs ? “La législation exige que le directeur pédagogique soit titulaire d’une Licence au moins ou d’une équivalence, et qu’il atteste de trois années d’exercice dans l’activité pédagogique”, répond Abderrahmane Lahlou. Quant aux conditions exigées pour les professeurs d’école, elles sont jugées par cet expert de “désuètes” “Elles datent de 2001, date de publication du décret d’application de la loi sur l’enseignement scolaire privé (Loi N° 06-00). Elles ne correspondent plus au niveau ni aux défis pédagogiques réels de l’enseignement d’aujourd’hui”, pointe-t-il du doigt, avant de préciser que les enseignants doivent être titulaire du Baccalauréat pour enseigner en maternelle et dans tout le cycle du primaire ou être titulaire d’un Bac+2 (ancien DEUG) pour enseigner au Collège, et d’une licence pour enseigner au lycée.

Sous contrôle 

Même si les écoles privées détiennent une grande liberté d’exercice, elles sont soumises à un contrôle pédagogique et administratif par le MENPS via ses Académies régionales de l’éducation et de la formation (AREF). Concrètement, des visites d’inspection sont effectuées au moins une fois par an. Dans leurs viseurs, la conformité aux programmes officiels ou à l’usage des manuels et aux équipements éducatifs. Le contrôle administratif concerne l’examen des dossiers de gestion (personnels, élèves) ainsi que la vérification des infrastructures (sanitaires, transport, internats éventuels). Elle est assurée, à chaque rentrée scolaire, par des commissions locales. Pour Abderrahmane Lahlou, c’est un contrôle de forme. “Il est plus administratif qu’autre chose, déplore-t-il. Au stade du développement du Maroc, et compte tenu des défis de l’éducation aujourd’hui, on devrait passer au stade de la régulation du secteur plus que celui du contrôle tatillon. Cette régulation devrait se faire à travers une agence ou une autorité à l’instar de l’Agence Nationale d’Évaluation et d’Assurance Qualité de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique (l’ANEAQ) pour le secteur de l’enseignement supérieur.” 

Répartition Public vs Privé par niveau scolaire 

Entre ascenseur social et acteur stratégique 

Un avis partagé par Mohamed Nedali qui qualifie le suivi pédagogique de limité. “Les inspecteurs pédagogiques qui sont chargés d’assurer ce suivi sont débordés par leurs missions dans le public”, développe-t-il.

Les écoles privées sont souvent perçues comme un tremplin vers l’ascension sociale, ouvrant la voie à des diplômes mieux valorisés et à des carrières plus prestigieuses. Mais cette réussite n’est pas toujours garantie. Comme l’explique Mohamed Nedali, elle dépend bien souvent de la possibilité pour les élèves de poursuivre leurs études dans des universités ou écoles supérieures privées, au Maroc ou à l’étranger. 

De son côté, le ministère de l’Éducation voit dans le privé un partenaire clé pour accompagner la réforme du système. Dans sa Vision stratégique 2015-2030, il attend de ce secteur qu’il participe à la généralisation de l’enseignement, à la diversification de l’offre éducative, à l’amélioration de la qualité et à la promotion de l’excellence, tout en veillant à l’équité et à l’égalité des chances. Des objectifs louables et un défi immense. Car le secteur privé doit ainsi prouver qu’il ne se contente pas d’être un marché lucratif mais qu’il peut réellement contribuer à bâtir une école marocaine plus juste et plus équitable.

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