Hamid Bentaher “Il faut accélérer le développement et la mise en œuvre de la feuille de route”

Le Maroc, une destination incontournable tant pour les voyageurs internationaux que pour les nationaux, offre un mélange fascinant de cultures, de paysages diversifiés et d'hospitalité chaleureuse. Mais en dépit de ses atouts indéniables, le tourisme fait face à des défis, tels que l'amélioration de la qualité de service et la consolidation de sa position en tant que leader continental. Interview de Hamid Bentahar, président de la Confédération nationale du tourisme (CNT).

Comment se porte le secteur du tourisme après la Covid-19 ?

Dans un contexte économique globalement fragile, le secteur du tourisme connaît un rebond plus fort que prévu. La reprise est rapide et l’envie de voyager s’est renforcée. L’interdiction de déplacements et de voyage pendant la pandémie a suscité un désir accru de voyager, un phénomène que l’on appelle le “revenge travel” ou la revanche sur le voyage. Des études montrent que le besoin de voyager, de changer d’air et de vivre de nouvelles expériences est devenu un besoin physiologique essentiel. Ainsi, les dépenses moyennes ont augmenté, car les gens sont prêts à sacrifier des biens matériels pour vivre des expériences uniques. La demande touristique est en nette augmentation par rapport à l’avant pandémie.

Comment se portent les recettes par rapport à la période d’avant la Covid ?

Lorsqu’il y a une forte demande, les gens sont prêts à payer davantage, à condition de recevoir un service de qualité. La satisfaction du client est désormais le critère principal d’évaluation. Ainsi, les dépenses moyennes ont augmenté, car les touristes aspirent à changer d’air. Cette tendance varie selon les différentes catégories d’offres, notamment le segment du luxe, qui a connu une nette augmentation et qui se rétablit en premier. En revanche, le segment des affaires a été plus durement touché, mais il montre également un rétablissement important, en raison des nombreux événements organisés au Maroc.

Que fait le Maroc pour promouvoir son image à l’international ?

Le Maroc a été très actif ces derniers temps dans la promotion de son image à l’international. La campagne “Terre des lumières” de l’Office du tourisme a été déployée dans plus d’une vingtaine de pays simultanément et a été bien accueillie par la clientèle internationale. Le pays est également de plus en plus présent sur le digital et participe à de nombreux salons mondiaux de promotion du tourisme. Les professionnels du secteur et l’Office du tourisme fournissent des efforts importants pour promouvoir le Maroc, ce qui se traduit par une reprise plus rapide par rapport à la moyenne mondiale. De plus, des événements tels que la Coupe du monde, la musique électronique, les compétitions sportives comme le surf et le golf, ainsi que la richesse culturelle, contribuent à attirer une clientèle variée du monde entier. La nouvelle feuille de route touristique du pays met l’accent sur certaines filières prioritaires.

Quels sont les profils des touristes qui choisissent de visiter le Maroc ? Pourquoi à votre avis ?

Il n’y a pas de profil type pour les visiteurs du Maroc, mais plutôt une diversité de profils. Différents segments de marché ont des attentes spécifiques. Grâce aux études réalisées par l’Office du tourisme et aux investissements des grands groupes pour comprendre les attentes des consommateurs, nous disposons de données intéressantes sur les différents segments et les attentes des marchés spécifiques.

Les prix sont-ils attractifs pour les Marocains ou sont-ils uniquement destinés aux étrangers ?

Il est crucial de développer le tourisme national, car cela permet une certaine résilience en période de crise, comme nous l’avons constaté pendant la pandémie. Contrairement à ce qui est parfois véhiculé dans les médias et sur les réseaux sociaux, les Marocains sont également des clients du tourisme marocain. En effet, 35% des nuitées sont réservées par des Marocains, une croissance significative au cours des vingt dernières années. Le tourisme interne a connu un développement important grâce aux infrastructures telles que l’autoroute Casablanca-Marrakech, l’autoroute Casablanca-Agadir et le TGV. Il est essentiel de continuer à développer le tourisme interne, car les Marocains méritent également des vacances de qualité, tout en attirant la clientèle internationale, qui dispose d’un pouvoir d’achat supérieur et contribue à la prospérité de l’économie nationale.

Quel est le classement du Maroc à l’échelle continentale ?

Le Maroc est l’un des leaders africains depuis une dizaine d’années, mais il faut rester vigilant car l’Égypte retrouve également sa force. Il est nécessaire d’accélérer le développement et la mise en oeuvre de la feuille de route et des accords signés. Le leadership du Maroc en Afrique est indéniable grâce à la vision éclairée de SM le Roi Mohammed VI, qui a fait du pays un champion régional et continental. Malgré cela, il reste encore un potentiel à exploiter, notamment en améliorant la connectivité aérienne avec les destinations long-courrier. La connectivité est un enjeu crucial à long terme pour attirer les visiteurs du monde entier.

Le secteur du tourisme marocain rencontre un sérieux problème de qualité de service. Quelle en est la cause selon vous ?

Les ressources humaines dans le secteur du tourisme constituent un défi mondial. Après trois années de Covid-19, de nombreux jeunes ont dû changer de métier ou s’expatrier, ce qui a créé une pénurie de talents. La crise a eu un impact conjoncturel sur la qualité de service. Il est donc nécessaire de mutualiser les efforts pour améliorer l’attractivité du secteur. Le tourisme offre non seulement des emplois, mais aussi des carrières, ce qui en fait l’une des rares industries offrant une réelle mobilité sociale. Il est passionnant et important, mais les conditions de travail doivent être améliorées en termes de flexibilité pour répondre aux besoins de la nouvelle génération. L’image et la perception de la perfection doivent également être réalignées, car elles ne correspondent pas toujours à la réalité. C’est un problème mondial. Cependant, je reste optimiste, car les professionnels du secteur sont conscients de la demande croissante et entreprennent des initiatives pour développer l’attractivité et la performance du tourisme.

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