Compter jusqu’à huit…

Nous sommes encore loin d'une configuration où le “genre” ne constitue plus un sujet.

Enfin ! Voici venu le fameux jour de l’année où nous pouvons parler des Femmes avec la bénédiction et l’intérêt consciencieux de tous.
Si, nous les femmes, nous avons cette “précieuse” journée qui nous est dédiée, ce n’est certes pas parce que nous n’existons pas le reste de l’année. Si cette journée est toujours célébrée avec « cérémonie » et avec l’engagement politiquement correct ambiant, c’est que nous en avons toujours besoin… Hélas.

Nous sommes encore loin d’une configuration où le « genre » et les innombrables questions qui y sont liées ne constituent plus un sujet.
Les femmes continuent à batailler, presque en vain, pour être payées, à poste égal, au même niveau que les hommes ; une femme divorcée ne peut refaire sa vie sans craindre de se voir retirer systématiquement la garde de ses enfants ; même la femme ayant tout sacrifié pour garder ses enfants à ses côtés ne dispose pas de leur pleine tutelle, le père continuera à être le seul interlocuteur habilité devant les instances légales et administratives…

Dans son dossier spécial 8 mars, Femmes du Maroc a mis en lumière les nombreux freins empêchant encore la femme d’accéder à ses pleins droits et à sa pleine citoyenneté.
Et si aujourd’hui la réforme de différentes lois (principalement Moudawana et code pénal) constituent le premier combat des défenseurs des droits des femmes au Maroc, il nous restera toujours les réformes moins évidentes, plus subtiles. Celles des mentalités et des perceptions, celles liées à un lourd héritage ancestral porteur d’injonctions et de limites à la libération de l’énergie des femmes.

En même temps que nous voulons prendre la pleine possession de nos droits, nous voudrions également vivre dans une société où une femme peut exprimer ses opinions sans recevoir un sourire masculin attendri ou condescendant ; où une femme qui défend ses opinions ne se fait pas traiter de frustrée ou d’hystérique là où un homme gagnerait de l’estime pour “sa personnalité affirmée”.
Passés 30 ans, une femme célibataire est considérée comme une femme qui a échoué à se construire une vie, une femme qui se marie ne doit pas tarder à avoir des enfants sous peine de voir sa féminité questionnée, celle qui s’intéresse à la politique est encore une exception, celle qui “sort le soir” est souvent une fille de petite vertu… Difficile d’énumérer les innombrables exemples qui témoignent d’une triste vérité: la femme cherche encore sa place et son confort au sein de la société.
Au Maroc, un grand nombre de femmes font de toutes ces questions un combat quotidien. Et ce, malgré les vents contraires, soufflés en grande partie par leurs pairs : ces autres femmes qui exercent une misogynie encore plus dévastatrice que celles des hommes… Syndrome de Stockholm, égoïsme conjoncturel, inconscience… les barrières que doit franchir le combat des femmes sont nombreuses.

Nous restons toutefois pleines d’espoir. Le Maroc fait des avancées courageuses en termes de droit de la femme par rapport à plusieurs pays de sa région et de son continent.
Chez nous, les droits de la femme sont une vraie préoccupation portée au plus haut sommet de l’État. C’est certainement ce qui rend les attentes des Marocaines plus grandes.
Et c’est pour cela que nous continuons, tous les ans, à compter jusqu’à huit. 

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