Sabrina Hakim, une pro-végétalisation des toits casaouis

Vidéo-reporter et réalisatrice, Sabrina Hakim contribue à la végétalisation urbaine au Maroc. La co-fondatrice de l’association “Toit en Vert” s’est ainsi donné pour mission de faire pousser des espaces verts, jardins et potagers, sur les toits en milieu urbain.

C’était au départ une idée folle : créer un toit potager expérimental de 200 m2 au centre culturel de l’Uzine à Casablanca. C’est aujourd’hui un projet prometteur d’agriculture urbaine au Maroc. L’initiatrice ? Sabrina Hakim, vidéo-reporter et réalisatrice franco-algérienne de 31 ans installée depuis 2012 au Maroc. “À Paris, je ne me préoccupais pas plus que ça du développement durable, confie-t-elle. Je faisais certes le tri sélectif mais je n’avais pas pour autant opté pour un mode de consommation éco-responsable. Mais, même si ma sensibilité à l’environnement n’était pas marquée, j’ai été très vite frappée par la pollution et le manque d’espaces verts lorsque j’ai posé les pieds à Casablanca dans le cadre d’un échange scolaire avec mon école de journalisme ESJ Paris.” Après quelques brefs aller-retour entre la France et le Maroc, la jeune femme pose définitivement ses bagages à Casablanca où elle travaille pour des médias nationaux et internationaux. Dans les sujets développés, les problématiques environnementales sont souvent soulevées aux côtés de questions sociétales. Elle a notamment co-réalisé un documentaire alarmant intitulé “Décharge de Médiouna. Silence, ça tousse” diffusé en juin 2020. Aux côtés de son confrère Amine Belghazi, elle alerte sur un drame écologique et sanitaire causé par la décharge non contrôlée de Médiouna et aggravée par le manque de réactivité des pouvoirs publics. “Vous savez comment est venue l’idée de ce sujet? Un soir, j’ai été réveillée par un odeur nauséabonde, se rappelle-t-elle. Sur les réseaux sociaux, tout le monde pointait du doigt une certaine décharge appelée Médiouna qui se situait à plus de 20 km de chez moi. Je ne connaissais pas les lieux. Alors quelques jours plus tard, j’y suis allée. Ce fut le choc !” Inimaginable, inacceptable, sa colère contre le manque d’actions environnementales se transforma en projet journalistique. Et de poursuivre : “Je n’ai jamais compris pourquoi on pointait toujours du doigt le citoyen car s’il voulait faire le tri sélectif à Casablanca, comment ferait-il ?”

Un pari fou

“L’idée du Toit en Vert a germé lors de la projection du film “ Demain” de Cyril Dion et Mélanie Laurent à l’Uzine située à Aïn Sebaâ, quartier industriel de Casablanca”, explique Sabrina Hakim. Ce documentaire met en avant les initiatives écologiques éparpillées dans le monde luttant contre le changement climatique. “Cela m’a fait penser à un reportage que j’avais vu sur la ville de Détroit aux États-Unis. Ancien fleuron de l’industrie automobile, elle est en train de renaître notamment à travers l’agriculture urbaine, développe-t-elle. Aussi, je me suis dit pourquoi ne pas essayer ici, dans cette métropole de 3,7 millions d’habitants. J’ai alors glissé l’idée à un ami, Soufiane, avant d’en parler dans la foulée à la direction de l’Uzine qui nous a donné son accord sans aucune hésitation.” Sur un simple coup de tête, Sabrina Hakim doit désormais monter un véritable toit végétal de 200 m2 . On est en 2017. “C’était un boulot titanesque”, se souvient-elle, en faisant défiler les photos sur son téléphone montrant l’immense toiture nue. Déterminée, elle se retrousse les manches et part à la recherche des plans de l’Uzine. “L’installation d’un potager urbain en toiture est un réel défi car de nombreuses contraintes doivent être prises en compte comme le poids des éléments porteurs pour installer les bacs potager”, détaille cette jeune femme qui embarque dans son aventure de nombreux amis et passionnés de la nature. Aussi, elle ne lâche rien même si elle n’a pas la main verte. Dès qu’elle trouve un moment, elle se documente et cherche, en parallèle, des fonds. Elle obtient le soutien de la Fondation Heinrich Boll Rabat dans le cadre du programme TransformAfrica. Mais c’est la rencontre avec Ahmed Latouri, jardinier paysagiste, qui marquera un tournant dans son projet. “Il a été riche de propositions, sourit-elle. La permaculture, c’est un art dont il avait le secret. Chaque jour, j’ai appris à ses côtés.” En 2008, le duo réussit à créer une véritable biodiversité sur le toit de l’Uzine. Des légumes (tomates, carottes, courgettes, etc.), des herbes aromatiques ainsi que des fleurs, les couleurs envahissent la toiture. “On a pensé ce système de culture en circuit fermé, précise-t-elle. Dans ce sens, les fleurs plantées vont attirer les insectes pollinisateurs qui joueront un rôle dans la reproduction des végétaux.” En 2018, ce fabuleux projet de toit potager expérimental se transforme alors en association.

Un développement urbain participatif

À partir de 2019, le duo anime des ateliers d’initiation au jardinage urbain et à l’agriculture urbaine. “Nous expliquons à nos participants comment créer ces espaces verts sur leur balcons ou toit”, indique-t-elle, avant d’enchérir : “Outre ses bienfaits environnementaux, le jardinage a beaucoup d’autres avantages : la réduction du stress et des risques cardiovasculaires et un cheminement vers l’adoption d’une meilleure alimentation”. Leurs ateliers a très vite du succès. Sur cet élan, ils organisent la première édition du “Green up”, un événement qui se déroule à l’Uzine où durant un week-end plus de 150 personnes ont assisté à des conférences et débats autour de l’émergence d’une biodiversité en ville. “Nous sommes en train de travailler sur la deuxième édition prévue en novembre 2021”, dévoile Sabrina Hakim qui forme désormais un duo avec Rachid Latouri, le frère d’Ahmed, et président de l’association. “Jusque-là, Rachid n’animait pas trop les ateliers, éclaircit-elle. Il a pris la relève et il assure !” Et d’ajouter: “Pour des raisons personnelles, Ahmed est parti à Dakar. Là-bas, il est en train de faire pousser un Toit en Vert au Sénégal”, se réjouit Sabrina Hakim, avant d’annoncer que l’association a déménagé de l’Uzine pour atterrir dans le quartier Hay Mohammadi. “Nous voulons désormais multiplier les toits végétaux et même les espaces en rez-de-chaussée, appuie-t-elle. Nous trouvons un lieu, nous nous y implantons pour créer un espace végétalisé tout en formant les membres d’une association ou les habitants afin qu’ils prennent le relais à notre départ. Car l’objectif est bel et bien de construire une ville de demain plus verte !”

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