Petites pannes sous la couette

Jeunes ou moins jeunes, les mâles sans exception connaissent un jour ou l’autre une panne sexuelle. Plusieurs facteurs expliquent cette défaillance passagère. Mais ces messieurs y voient une atteinte grave à leur identité. Explication.

Appelons-le Fouad et donnons-lui la parole : “Après une décennie de mariage, une douloureuse séparation soldée par un divorce, revenu sur le marché des célibataires, ne supportant plus l’abstinence, je décidai de débloquer le compteur. Je me suis retrouvé très vite dans le lit d’une jeune trentenaire friande de la chose. J’ai été très intimidé face à sa hardiesse, je suis rentré dans ma coquille ainsi que mon engin. Je n’ai pas assuré, me suis senti castré. Il m’a fallu beaucoup de temps pour reprendre les rênes. Cette expérience m’a permis de me rendre compte combien j’avais construit ma masculinité autour d’une rigidité organique. Pathétique !»
Les hommes vivent une grande solitude chapitre déboires sexuels. S’ils racontent volontiers leurs prouesses, ils taisent avec douleur leurs défaillances. Les femmes ont leur gynécologue. Elles sont habituées, tôt, dès l’avènement des règles à parler de l’intimité, sans gêne. Les hommes croient qu’ils sont “anormaux” dès qu’une “anomalie” survient.
Je me rappellerai toute ma vie de cet épisode. J’avais démarré ma journée, conquérant, tonique comme d’hab. Au petit matin, j’étais dans mes petits souliers, mon engin aussi. Pour la première fois de ma vie, je n’avais pas assuré. Désir incandescent, concrétisation impossible. C’était comme si ma tête marchait, mais mon corps ne suivait pas. J’étais là, inutile, le sexe mou. Tout s’est embrouillé dans ma tête. Je n’entendais même plus les mots rassurants de ma partenaire. C’était une affaire (triste) entre mon anatomie et moi. J’avais honte, me suis senti un mec au rabais, inutile.” Ainsi s’exprime Kamal (prénom d’emprunt).
Kamal raconte que cet incident s’est renouvelé à quelques reprises. Période durant la quelle ses méninges moulinaient non stop : “Pourquoi moi ? Pourquoi à 42 ans alors que tout se passait bien dans ma vie ? Pour tenter de me rassurer, j’ai visité les sites “hot”. J’ai mis le cap sur la masturbation. Au risque de passer pour un obsédé, j’ai tout essayé. J’avais tellement peur de ne plus pouvoir assurer que j’aurai fait n’importe quoi pour me prouver le contraire. Retrouver la rigidité était vital, indispensable pour ma santé mentale.”

Le signe avant-coureur d’une pathologie

Un beau jour, sans savoir pourquoi, les troubles de Kamal ont disparu comme ils sont apparus : sans crier gare ! Il a retrouvé ses moyens et repris sa vie d’avant ! S’il tient à témoigner c’est pour dire son désespoir d’alors et rassurer ses pairs : un mâle dans toute sa puissance n’est jamais à l’abri d’un coup de mou. C’est la mauvaise nouvelle. La bonne : cette défaillance ne fait souffrir que lorsqu’on ignore qu’elle peut advenir !! Un sexe averti en vaut deux !
Les urologues et sexologues sont unanimes : les défaillances sexuelles ne sont pas rares. Elles sont souvent passagères. Et elles présentent rarement une gravité. Il faudrait les ranger dans le même tiroir que les maux de tête. Personne ne s’alarme quand un coup de pompe frappe. Un inconfort sexuel passager doit être appréhendé comme un inconfort sur le plan digestif, musculaire ou intellectuel. Evidemment, si les problèmes persistent et que, même occasionnelles, les pannes se produisent régulièrement pendant plus d’un trimestre, il est bon de consulter un spécialiste. Il ne faut pas laisser un trouble sexuel s’installer. Il peut être le signe avant-coureur d’une pathologie hormonale, vasculaire, neurologique etc. Mais, il existe des médicaments qui permettent de résoudre le problème de l’impuissance surtout s’ils sont accompagnés par une bonne hygiène de vie.
Après cette parenthèse de prévention sanitaire, revenons au vif de l’érection. Elle est souvent aussi anodine qu’une migraine passagère. Le “big” problème est que la panne sexuelle marque davantage les hommes qu’un mal de tête ! De nombreux facteurs peuvent être à l’origine d’un coup de mou : la fatigue, un climat conflictuel au boulot, un désaccord avec sa conjointe, un bébé qui pleure au mauvais moment, des médicaments, ou encore l’émotivité. L’émotivité n’est pas réservée aux ados néophytes qui découvrent pour la première fois un corps de femme. L’émotivité frappe également les mâles matures pour diverses raisons. Une chose est certaine : l’anxiété fait augmenter l’adrénaline qui fait chuter…l’érection ! Quand l’anxiété passe, la machine se redresse.
Les mâles découvrent au fur et à mesure que la vie déploie ses travers, et combien leur corps est sensible aux événements extérieurs. “Je pensais que rien ne pouvait m’empêcher d’honorer une femme, commente Fouad, mais j’avais tort. Depuis, je me sens vulnérable. J’ai l’impression de ne plus pouvoir compter sur la seule chose dont un homme soit certain : sa puissance naturelle, c’est-à-dire sa capacité érectile. Tous les matins, je guette mes réactions : l’érection matinale me rassure.

L’âge ne tue pas le sexe

Difficile d’avoir des confidences mâles sur les coups de mou. Mais la littérature comble ce déficit. Elle regorge de héros racontant leur désarroi face à la panne ; leur hantise de l’horloge qui tourne : ils craignent l’épée de Damoclès qui s’abattra sur leur virilité car le jour où “ça” arrive, le mâle se sent fini, vieux, bon à rien. Un homme peut être moche, chauve, ridé, trop gros ou trop maigre, tout va tant qu’il peut prouver sa “fohoula” (un terme encore plus fort que virilité) au lit. La sexologie, nous apprend que l’âge ne tue pas le sexe. Les hommes peuvent avoir des relations jusqu’à la fin de leur vie (de jeunes papas nonagénaires, on en connaît). L’incidence de l’âge impacte la rapidité et la durée de l’érection. Il faut le savoir pour ne plus s’affoler. Passé un certain âge, les érections sont plus difficiles à obtenir, certains vieux mâles ont du mal à l’accepter d’où anxiété, l’adrénaline qui monte et l’engin qui pique du nez. L’éducation et la culture de notre société présentent encore souvent la virilité comme la capacité à avoir un sexe fort et érigé. Et plusieurs mâles tombent dans le panneau. Jeunes et moins jeunes auraient grand intérêt à consommer de l’érotique plutôt que du porno. Il existe de beaux textes érotiques qui racontent comment un éjaculateur précoce et même un impuissant peut être un excellent amant s’il soigne les marges au lieu de viser trop vite ce qu’il prend pour un trou. La recette pour sortir du cercle vicieux qui ajoute l’angoisse de la performance à une défaillance physique passagère ou à un ralentissement d’activité dû à l’âge est de jeter un autre regard sur la sexualité. Une sexualité réussie n’a rien à voir avec une acrobatie génitalité réclamant une rigidité d’enfer !
La pornographie a tout faux quand elle réduit la sexualité à une montée de désir suivie d’un assouvissement instantané de l’élan animal primaire. La sexualité n’a pas grand-chose à voir avec la pornographie. Avoir une relation sexuelle avec l’autre ne se réduit pas à ses organes génitaux, mais c’est une relation avec le corps de l’autre, sa pudeur, son histoire. C’est une relation à l’autre, à travers soi. Car, ce n’est pas parce que l’on a raté un set que le match est per

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