Lamia Bazir : “Dans le Maroc rural, chaque fille est un acteur social et économique incontournable”

Qui est aujourd’hui la jeunesse féminine au Maroc ? Discrète mais travailleuse, elle représente la force-vive du pays, s’acharnant, avec droiture, à réajuster la société en s’engageant dans l’entrepreneuriat et en s’imposant sur le terrain du patriarcat. Une source de richesse porteuse d’espoir à découvrir. Nous donnons la voix à de jeunes femmes volontaires et déterminées qui, chacune dans son domaine, oeuvre pour un Maroc fort, ambitieux et juste.

Leadership féminin en milieu rural
Lamia Bazir, 30 ans, fondatrice d’Empowering Women in the Atlas.

“Pour avoir focalisé mes études et ma carrière sur le développement, mais surtout pour avoir rencontré, côtoyé, noué des amitiés profondes avec des femmes du Moyen Atlas, je sais que d’énormes progrès ont été et continuent d’être réalisés. Pas suffisants certes, pas assez rapides non plus, mais mes amies sont aujourd’hui fières de voir leurs filles poursuivre leurs études au collège – un rêve dont elles avaient été privé -. Je me souviens encore comment ma rencontre, en 2010, avec mes amies du village d’Adghagh, Khadija, Idrissia, Aicha et d’autres, avait été un tournant dans ma carrière et dans ma vie. Leur résilience m’inspire à ce jour et leur vécu a complètement changé ma perception du développement et de la pauvreté : je découvrais que la pauvreté des conditions ne pouvait occulter la richesse des êtres. J’apprenais que peu importe où l’on naît, peu importe les conditions géographiques, sociales, économiques, chaque être humain, et donc chaque fille et chaque femme, a un talent, un potentiel, un rêve, une valeur à apporter à ce monde et mérite sa chance, mérite les conditions matérielles et cognitives de se réaliser et de contribuer à l’avancée de sa communauté et de sa nation.

J’ai alors décidé de faire de l’égalité des chances mon combat, mais aussi et surtout le cœur de ma passion. Dans le Maroc rural, chaque jeune fille, chaque femme est un acteur social et économique incontournable. Trop tôt, elles accomplissent de nombreuses responsabilités que le statut social ne reconnaît pas toujours, mais que ni la terre ni l’histoire ne peuvent nier. En 2020, la crise de la Covid-19 met en péril de nombreux acquis. Et nous devons -autant dans la gestion de cette crise que dans nos plans de relance – y prêter une attention toute particulière. L’importance de l’école et l’équité de son accès doivent continuer à être un combat, notre combat. Les alternatives aux mariages d’enfants par l’éducation et la formation doivent être défendues, coûte que coûte. Les perspectives de femmes entrepreneurs à la tête de coopératives, et leaders en tant qu’élues doivent être soutenues. Pour le présent et pour l’avenir, je souhaite que, par le levier de nouveaux modèles de femmes rurales authentiques, autonomes, formées et inspirantes, on puisse briser le cycle de la pauvreté. Je souhaite que toutes ces jeunes filles et femmes soient intégrées à des visions, à des plans de développement sur la base de leur réalité, de leur vécu et de leurs propres espérances. Le Maroc de demain est un Maroc authentique, ambitieux et moderne, un Maroc où aucun potentiel n’est perdu, un Maroc où les rêves et capacités de chacun (e) de nous – dans le rural et dans l’urbain- sont reconnus, soutenus, promus, et mobilisés pour et vers l’avenir, notre avenir.”

Prochain article :  Asmae El Hajji, fondatrice de Moor Learning initiative

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