Partis étudier en France, en Espagne, au Canada, aux États-Unis ou ailleurs, nos jeunes diplômés ne rebroussent pas toujours chemin dès la fin de leurs études. Des enquêtes, diligentées par le Club France Maroc (association promouvant la liaison entre la communauté marocaine des lauréats de l’enseignement supérieur français et le Maroc) et ses partenaires, font ressortir que 75 % des Marocains installés dans l’Hexagone souhaitent revenir au bercail dans une période s’étalant jusqu’à quatre ans après l’obtention de leur diplôme. Ceux-ci déclarent pourtant être sentimentalement attachés à leur pays, à leur famille et même au couscous local (!). Et la plupart d’entre eux ne conçoivent leur projet d’avenir professionnel à long terme que dans leur contrée d’origine. Mais il faut croire que les fondations d’une future carrière prometteuse se bâtissent mieux ailleurs…
Étoffer son C.V.
Alors, qu’est-ce qui fait courir ces jeunes sur les circuits à l’international ? La première motivation consiste à acquérir une solide expérience professionnelle. Beaucoup sont en effet persuadés que les compétences du travailleur junior seront mieux valorisées dans des environnements professionnels plus stimulants et épanouissants. “Je n’avais pas franchement d’échos très favorables sur la possibilité de trouver un poste en adéquation avec mes attentes, et où il y aurait des perspectives d’évolution rapide”, indique Ghalia. Ayant poursuivi son cursus en France, elle décide donc de s’y attarder, le temps de consolider ses acquis.
“Bien m’en a pris, car mes années d’expérience dans la salle des marchés d’une banque française m’ont permis à la fois de m’éclater dans le boulot, et de revenir au Maroc par la grande porte. Aujourd’hui, je suis responsable du service desk au sein de la filiale marocaine”, reprend-elle.
Une montée en puissance qui lui a permis de gagner du temps et de bonifier son niveau de salaire ! Pour Nadia, lauréate d’une école d’aéronautique à Toulouse qui a décroché un C.D.D. d’un an chez un équipementier d’avionneur, le retour au pays a également été un deal win-win. “J’ai été directement recrutée comme chef de projet à la zone franche de Tanger, alors que pour ce poste, cinq années d’expérience minimum sont requises!”, précise-t-elle. Ce démarrage en flèche de sa carrière, elle l’attribue certes à son mérite, mais aussi à des raisons moins avouables. “Les gens qui se sont frottés au monde du travail à l’étranger véhiculent visiblement une sorte d’aura à laquelle les DRH marocains sont très sensibles ! Abu Dhabi, New York, Paris, pour ne citer que ces villes, font fantasmer le marché du travail…”, admet-elle.
La galère marocaine du premier boulot !
Salima, ingénieur en informatique, diplômée d’une université espagnole, a d’abord tenté sa chance au Maroc, pour commencer. Les affres d’une embauche qui tarde à se concrétiser, elle connaît bien. Les propositions n’affluaient pas et le poste sous-payé de responsable informatique dans une PME ne l’a pas vraiment tentée. “Mon diplôme n’ayant pas de visibilité au Maroc, je l’ai complété par une spécialisation en systèmes de gestion intégrés, en France, et je me suis empressée de briguer une place de consultante fonctionnelle dans une multinationale. Au bout de trois ans, à l’occasion d’un forum de jeunes diplômés marocains à Paris, j’ai été approchée par de grandes entreprises nationales. On m’a déroulé le tapis rouge et fait miroiter une rémunération très attractive…”, se souvient-elle. Sa critique à fleurets mouchetés pointe bien le différentiel d’opportunités entre un jeune diplômé et un travailleur émigré, davantage courtisé…
Revenir armé pour monter sa boîte
Une enquête sur la trajectoire des diplômés marocains de l’étranger, réalisée par l’association Maroc Entrepreneurs en 2006 et dont les résultats restent d’actualité, nous apprend que 45 % des lauréats de diplômes étrangers souhaitent revenir s’installer au Maroc pour créer leur propre entreprise. Et dans cette optique, le passage par la case “expatrié professionnel” est une aubaine, pour accumuler confiance et expérience. Najat, qui travaille actuellement pour un cabinet d’avocats d’affaires à Bruxelles, compte bien capitaliser sur cet apprentissage pour, un jour, refaire le trajet en sens inverse. “Si je reviens, c’est pour monter ma structure et passer à mon compte. Pas question de végéter dans un grand groupe avec des conditions de travail beaucoup moins avantageuses qu’en Europe ! D’ailleurs, je fais des pieds et des mains pour obtenir ma nationalité belge, au cas où je venais à changer d’avis”, affirme-t-elle. Boost de carrière ou solution extrême de repli, l’ailleurs qui fait rêver tous les autres reste encore cette carte maîtresse à abattre pour tous ces diplômés qui ont la tête bien sur les épaules !