Tout avait si bien commencé…
Chronique ordinaire d’un jeune couple batifolant sous les sunlight de la passion naissante : tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil. Côté nana, la fleur bleue qui sommeille en nous affectionne cette idée d’avoir trouvé sa moitié d’orange parfaite et on a tôt fait de se visser de belles œillères au coin des yeux. Clairement, un sondage d’opinion, à cet instant précis, propulserait notre cher et tendre directement au deuxième tour. Puis les semaines passent et quelques frictions s’amorcent : malentendus, négligences, frustrations. L’horizon serein s’entache de nuages. Un beau matin, l’orage éclate et la tempête emporte tout sur son passage. La miss lénifiante s’est muée en Cruella têtue qui refuse de transiger sur certains principes essentiels de relation. “Quand un garçon qui semblait follement entiché se met à jouer au chat et à la souris avec moi, à disparaître des jours durant sans donner de nouvelles ni d’explication plausible, je baisse le rideau brutalement !”, rapporte une Sara excédée. Si les hommes viennent de Mars et les femmes de Vénus, et bien, que le Jules d’opérette retourne sur sa planète d’origine. Bon vent…
Des indignées qui en ont gros sur la patate
Leïla, 30 ans : “J’ai découvert qu’il flirtait avec mes copines en faisant son charmeur. Je ne suis pas une jalouse intrinsèquement mais certains comportements très ambigus me sont restés en travers de la gorge. Les hommes à femmes, très peu pour moi !”
Mounia, 35 ans : “Ma ligne rouge, c’est quand ma liberté est menacée. Je ne peux supporter d’un homme qu’il me dicte comment je dois me comporter devant sa famille ou ses amis, m’habiller ou même rire. Ce genre d’intrusion dans ma bulle vitale me fait renoncer à tout le reste.”
Abla, 28 ans : “Un jour que j’étais très mal dans ma peau et que je sanglotais, mon ex n’a rien trouvé de mieux à me dire que : “Arrête de pleurnicher ou rentre chez toi”. Je l’ai vécu comme une infamie et l’ai pris au mot. À quoi sert d’avoir un amoureux si ce dernier n’est même pas capable de te consoler ?”
Houda, 32 ans : “Le radin avec des oursins dans les poches qui déploie des tas d’astuces pour ne pas t’inviter ou te laisser payer, il peut vite aller se rhabiller. Une fois détecté, je le passe à la trappe sans même l’en informer.”
Hind, 43 ans : “Mon dernier prétendant en date me mentait pour aller faire des petits plans “beuverie”, incognito, avec ses copains. Parce qu’il n’assumait pas ! Or, pour moi, le mensonge dans le couple, c’est le Titanic des sentiments. Exit !”
Tolérance zéro, explication de texte
“Je ne peux pas, je ne peux plus. Je largue les amarres sans préavis” : la posture de celle qui quitte le navire est claire, nette et souvent unilatérale. Ballotée au gré des humeurs du partenaire, chosifiée ou froissée par son manque de considération pour sa petite personne, peu importe les raisons, le diagnostic est sans appel. La ligne rouge franchie signe l’irréversibilité du process, et au passage, indique des choses sur notre chaos intérieur. Pour Boutaina Raissi Filali, psychologue clinicienne et addictologue à Casablanca, le conflit amoureux réveillerait des blessures narcissiques et des fragilités dans l’édifice identitaire : “Chacun arrive avec son empreinte éducative, ses idéaux, ses représentations, ses projections et ses zones d’ombre. Eros flirte avec Thanatos”. Il suffit donc que le partenaire titille des démons tapis pour que tout l’équilibre s’effondre comme un château de cartes. “Les représentations de soi et d’autrui, en lien avec le style d’attachement de l’enfance, colorent notre vision du couple. Les personnes dont l’attachement est insécure peuvent éprouver des difficultés à s’investir dans la relation amoureuse, craignant la dépendance affective, tandis que d’autres peuvent remettre en question sincérité et réciprocité des sentiments. Perçu comme risque de rupture imminente, le conflit menacerait leur équilibre psychologique”, reprend la spécialiste. Pour comprendre ce qui se joue dans notre petite tête, il faut donc remonter le cours de son histoire personnelle, en y incluant le lot des expériences traumatisantes antérieures. Introspection rapide : notre sentiment d’abandon est-il ravivé par un chéri trop indépendant ? Le macho qui nous hérisse le poil ressemble- t-il à un premier amour cauchemardesque ? Revoyons- nous, dans les traits de notre cher et tendre, un paternel trop près de ses sous ?
Un peu de com’ ne serait pas de trop
Pssshhh. Pour une impulsive prompte à la gâchette, une parole ou une attitude malheureuse peut faire avorter le duo. Sans compter que l’époque “kleenex” abonde aussi dans le sens du non-recyclage des disputes. Stop. Le décret “jeter le (grand) bébé avec l’eau du bain” ne doit pas être signé avant une confrontation à tête reposée. Pour Boutaina Raissi, les non-dits étouffent les relations en friche : “Une fois la parole libérée, on a l’occasion de vérifier si nos besoins ont été peu ou mal exprimés ou si nos attentes sont irréalistes ou non réciproques.” Passé, donc, les premiers instants irrationnels de vertige amoureux, les grincements de gonds sont inévitables et nécessitent de revoir la copie, au masculin comme au féminin. “La relation amoureuse gagnerait à se construire sur un rapport d’altérité, dans le respect des valeurs et de la différence de l’autre”, souligne la psy. En gros, il n’est sans doute pas à l’image de ce que vous attendiez, mais votre côté soupe au lait (et vas-y que je t’inonde de reproches pour incompétence) a encore accentué ses tares… Trop dure avec lui, vous ne lui avez peut être pas laissé le temps de prendre ses marques ou de rectifier le tir. Ça, c’est pour la partie défense d’un accusé, pressenti pour une deuxième session de repêchage. Pour ce qui est du zigoto flanqué de défauts irrécupérables, il se démasque très vite, tout seul, en répétant les comportements qui fâchent. Sur cette mauvaise graine d’amant, le couperet peut s’abattre sans états d’âme : retrait définitif du permis d’aimer.