Changer pour lui plaire… mais à quel prix ?

Amoureuse, on veut plaire à son homme. Avide de son admiration, on est prête à jouer au caméléon et à se plier à ses desiderata pour mieux fusionner avec son idéal de femme.

“Il me trouve trop ronde. Je dois le reconnaître, je suis un peu gourmande et quand j’abuse des sucreries, je sens son regard critique me déshabiller. Et comme j’ai envie qu’il continue de me trouver désirable, je multiplie les régimes farfelus qui me détraquent le corps”, témoigne Ghizlane. Quand l’une, pour satisfaire son homme, joue au yoyo avec sa vraie nature, telle autre vire carrément de style vestimentaire. C’est le cas d’Imane, qui a troqué son look sportswear pour un style plus glamour et féminin : “On s’est rencontrés en soirée et j’étais apprêtée, en petite robe noire et stilettos. Très vite, il m’a confié adorer les filles toujours maquillées et tirées à quatre épingles. Le problème, c’est que c’est le contraire de ce que je suis!” La demoiselle, follement éprise, s’est donc empressée de renouveler sa garde-robe, se convertissant à la lingerie fine et oubliant, avec une pointe de regret, ses anciens joggings informes du week-end.
 
L’être et le paraître

Viser la minceur fantasmée, devenir plus féminine… certaines sont prêtes à tous les sacrifices pour trouver grâce aux yeux de leur chéri. Et l’amélioration de leur physique devient un enjeu majeur, car c’est là que siège le talon d’Achille d’une femme souvent jaugée (aimée ?) à l’aune de sa beauté et de ses attributs extérieurs. Mais la donne ne s’arrête pas là, elle englobe aussi comportement et relationnel. Aïda avoue : “Pour ne pas entrer en conflit avec lui, j’ai viré de mon paysage deux bonnes copines qu’il a, à maintes reprises, taxées de pipelettes vulgaires au Q.I. de mouche !” En cherchant à le caresser dans le sens du poil, on s’engonce, parfois à contre-cœur, dans le costume ou rôle social qu’il a taillé pour nous. Et Leïla de rajouter : “C’est presque une mise en conformité avec ce que le Marocain est supposé attendre de son épouse. Par exemple, j’ai une amie nulle en cuisine qui s’est mise, du jour au lendemain, à confectionner des tajines et de bons petits plats pour trouver grâce aux yeux de son homme. Je ne la reconnais plus ! Une autre, encore, est devenue bigote par mimétisme…” Dans un environnement focalisé sur le socialement correct, où un statut prééminent est accordé à l’homme, travestir sa personnalité ou jouer à la fille lisse sous tous les rapports ne choque pas vraiment les mentalités…
 
Couples et concessions

On mentirait en disant que la vie à deux n’est pas faite de compromis et d’ajustements nécessaires. Et l’amour peut même opérer des merveilles de transformations, dixit Nora : “J’étais un peu taciturne et oursonne. À son contact joyeux, je suis sortie de ma réserve, j’ai appris à faire la fête et à partir à l’aventure, un sac accroché au dos”. S’adapter au mode de vie de son compagnon permet donc aussi de se révéler à soi-même et d’évoluer. Mais, la plupart du temps, lorsque l’on parle de concessions, on pointe plutôt les différences de tempérament ou de caractère qui blessent aux entournures. Il est alors bienvenu de corriger le tir et de modifier ces manières d’agir qui froissent l’autre ou ne lui correspondent pas. Najat, l’impatiente hyperactive, a dû se plier au rythme de sa moitié plus dolente : “Je suis moins en mode “pile électrique” et davantage mesurée dans mes réactions et mes décisions. Je sentais bien que ça ne servait à rien de secouer le prunier… Il se braquait et ne voulait plus rien faire.”

Si, structurellement, il n’est pas question de se transformer complètement, on peut toutefois mettre de l’eau dans son jus de raisin. En revanche, la réciprocité doit être de mise. Car, si la couverture est tirée d’un seul côté, la frustration sera fatalement au rendez-vous… Rien n’interdit alors de dealer, de part et d’autre, des choses qui ressemblent à des arrangements win-win pour tout le monde. On arrêtera de parler des heures au téléphone quand lui réduira son temps de connexion sur les réseaux sociaux, le soir. Et toc !
 
Ne jamais se renier…

Changer pour l’autre ? Pourquoi pas, à condition de ne pas se perdre de vue… On ne fait donc pas trembler le socle de son identité ou de ses valeurs. À partir de là, où placer le curseur entre la limite des concessions autorisées et le passage du côté obscur de la force? Clairement, il n’est pas souhaitable de devenir une pâte malléable entre ses mains, en dégommant sa personnalité fantasque ou sa vision de la vie. Et le zozo n’a rien à vous imposer en se livrant à un chantage affectif masqué du style “pour me garder, tu devras…”. Un tel couperet sur la tête inviterait au sacrifice et à une forme de renoncement subi… Amal n’a pu s’y résoudre : “Il ne voulait pas d’enfants et je n’ai pas pu faire le deuil de la maternité. J’ai fini par partir.” Il y a donc des choses non négociables sur lesquelles on n’a pas à céder un pouce de terrain. Car, à aller trop à contre-courant de ses envies profondes, on pourrait, à l’inverse, menacer l’équilibre de son couple : “Je sais qu’il aurait souhaité que j’arrête de travailler quelques années, pour élever nos deux gamins en bas âge. Mais si j’avais cédé, je lui en aurais terriblement voulu par la suite”, témoigne Nezha, la résistante.
 
Cherchez l’erreur !

La différence est donc grande entre une donzelle qui fait des concessions somme toute normales pour son couple, et une femme sous influence. Cette dernière, lestée d’une personnalité aux contours mal définis, en arrive à se mettre la pression toute seule. Dépendante affective, angoissée par l’abandon ou prisonnière de la norme sociale, elle lâche du lest et se fond dans l’autre pour exister. Sans doute ne s’aime-t-elle pas assez pour rester ce qu’elle est, et passer outre un jugement désagréable sur son corps, son attitude ou ses choix de vie. Ce type de profil est d’ailleurs la proie rêvée pour un manipulateur. Si le bureau des réclamations est ouvert en permanence, plutôt que de vous métamorphoser, il serait peut-être plutôt temps de changer de partenaire !

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