Alexandra Montant : “Les femmes veulent incarner un leadership plus inclusif”

À la tête de ReKrute.com, Alexandra Montant observe de près les évolutions du marché de l’emploi au Maroc au cours de ces deux dernières décennies. Pour elle, le défi ne se joue plus sur la parité, mais sur la manière de diriger et de faire confiance. Elle plaide pour une révolution managériale fondée sur l’écoute, la bienveillance et l’inclusion : seules voies possibles vers un monde du travail plus équitable et épanouissant pour les femmes. Interview.

Le taux d’activité des femmes reste inférieur à 20 %. Que révèle, selon vous, ce chiffre sur la réalité du marché du travail marocain ?

Ce taux traduit un déséquilibre structurel. Le Maroc n’est pas une exception : dans la plupart des pays, les femmes restent sous-représentées, surtout à mesure que l’on monte dans la hiérarchie. Mais ici, ce fossé est plus marqué. Il suffit de regarder le nombre de dirigeantes pour mesurer à quel point les postes à responsabilité restent majoritairement masculins. Pourtant, la demande pour les talents féminins existe bel et bien. Dans la finance, la communication ou la gestion, les entreprises recherchent activement des femmes pour leur engagement et leur rigueur. Le véritable frein n’est pas professionnel mais culturel : les mentalités évoluent lentement, et les conditions d’accompagnement telles que les structures de garde ou encore le partage des responsabilités domestiques restent limitées.
En réalité, les femmes ne manquent ni d’ambition ni de compétence, mais d’un environnement qui leur permet d’exprimer pleinement leur potentiel.

Ces freins culturels sont-ils les seuls à expliquer le décrochage des femmes dans la vie active ?

Non, le problème est aussi organisationnel. Beaucoup d’entreprises fonctionnent encore avec des schémas hérités d’une époque où l’on valorisait la présence plutôt que la performance. Or, le monde du travail a changé : on ne mesure plus la valeur d’un collaborateur au temps passé au bureau, mais à la qualité de ses résultats. Les femmes ne quittent pas leur emploi par manque d’ambition, mais parce qu’elles se heurtent à un système trop rigide. L’entreprise doit donc revoir ses modes de fonctionnement, introduire plus de souplesse, et surtout faire évoluer ses critères d’évaluation. Quand on mise sur la confiance et sur les résultats, on permet aux femmes, et plus largement à tous les collaborateurs, de mieux s’épanouir.

Comment faire évoluer la culture managériale pour qu’elle soit adaptée aux réalités d’aujourd’hui ?

Changer la culture d’entreprise, c’est d’abord changer de regard. Tant que la femme active sera perçue comme une exception, rien ne bougera. Les managers doivent apprendre à piloter autrement, à valoriser la responsabilité plutôt que le contrôle. La confiance devient alors un véritable levier de performance. Ce que les femmes demandent, ce n’est pas un traitement de faveur, mais un cadre de travail plus humain, plus souple et plus respectueux des contraintes réelles. Les entreprises qui ont intégré cette logique, celles qui pratiquent un management basé sur la responsabilisation, l’autonomie et l’écoute, sont aussi celles qui affichent les meilleurs taux de fidélisation et d’engagement.

Observez-vous déjà une évolution de ces pratiques sur le marché marocain ?

Oui, et c’est encourageant. Certaines entreprises commencent à comprendre que la diversité n’est pas un slogan, mais un facteur de performance. De plus en plus de recruteurs valorisent les profils féminins, non pas par simple volonté de parité, mais parce qu’ils y voient une manière d’enrichir la culture de travail. Les femmes apportent un mode de management différent, plus collaboratif et orienté sur le long terme. En revanche, un frein subsiste : le manque de confiance en soi. Beaucoup hésitent encore à postuler à des postes à responsabilité tant qu’elles ne remplissent pas tous les critères. Les entreprises ont donc un rôle essentiel à jouer : accompagner, encourager, et faire émerger ces talents.

Au-delà de la parité, les femmes recherchent du sens et du bien-être dans leur travail. Comment les entreprises peuvent-elles répondre à ces attentes ?

La quête de sens et d’équilibre n’est plus un luxe, c’est une exigence. Les collaborateurs, hommes comme femmes, veulent rejoindre des entreprises qui leur offrent une expérience professionnelle épanouissante; où ils peuvent apprendre, évoluer et se sentir utiles. Les femmes, en particulier, accordent beaucoup d’importance à la qualité du management et à l’ambiance interne. Elles veulent être reconnues, entendues et accompagnées. C’est pour répondre à ces attentes que nous avons lancé “Love my job”, une enquête qui permet aux entreprises d’évaluer le bien-être de leurs équipes sur plusieurs dimensions : climat social, leadership, équilibre vie pro-vie perso, perspectives d’évolution… Les résultats montrent qu’un management humain, attentif et transparent, attire et fidélise davantage les talents. L’entreprise performante de demain sera celle qui sait conjuguer exigence et bienveillance.

Cette recherche d’équilibre peut-elle freiner l’accès des femmes aux postes de direction ?

Pas forcément. Le problème vient surtout du modèle de leadership encore dominant. Beaucoup de femmes ne se reconnaissent pas dans une culture du pouvoir fondée sur la disponibilité permanente ou la compétition. Ce n’est pas qu’elles manquent d’ambition, c’est qu’elles aspirent à diriger autrement. Elles veulent incarner un leadership plus inclusif, plus collaboratif, qui laisse une place à la vie personnelle sans être perçu comme un signe de faiblesse. Aujourd’hui, de nombreuses entreprises commencent à comprendre cette évolution et adaptent leurs modes de gouvernance. C’est une transformation lente, mais réelle. Le jour où l’on valorisera la compétence, la vision et la capacité d’écoute autant que la présence et la disponibilité, on aura franchi un vrai cap dans l’égalité professionnelle.

Quels leviers concrets permettraient de renforcer la place des femmes dans l’économie marocaine ?

Je crois à trois leviers essentiels : le leadership inclusif, le mentorat et la visibilité. Le premier vise à ouvrir les espaces de décision à davantage de diversité pour permettre aux femmes d’influencer les politiques RH et managériales. Le second, le mentorat, est tout aussi crucial : les femmes qui ont réussi doivent accompagner celles qui montent, partager leurs expériences et encourager la relève. Enfin, la visibilité reste déterminante : il faut parler des femmes dirigeantes, valoriser leurs parcours et normaliser leurs réussites. Le changement ne viendra pas seulement des entreprises, mais aussi de la façon dont la société perçoit le succès féminin. Créer un environnement de travail sain et respectueux n’est pas une faveur : c’est un investissement durable dans la performance et l’équilibre collectif.

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