Zoubida fait souffler un vent de fraîcheur sur l’artisanat marocain. Sa fondatrice, trentenaire franco-marocaine installée à Londres, a troqué les couloirs feutrés de Chanel, Alexander McQueen et Burberry pour les ateliers des maâlems. Son credo ? « Créer du sens, pas juste du style ».

Après 15 ans passés dans les maisons les plus prestigieuses, Sophia Kacimi connaît le « burn-out du beau ». Pour retrouver son énergie, elle part se réfugier au Maroc d’où est originaire son papa. « Depuis toute petite, j’y vais régulièrement », raconte-t-elle. Aussi, quand tout s’effondre, elle part s’y ressourcer. Très vite, une idée émerge : organiser des « retraites d’art » afin qu’étrangers et artisans locaux échangent. « J’avais ce besoin de mettre en valeur les artisans qu’on ne voit malheureusement pas à leur juste valeur », explique-t-elle.
Rapidement, un autre projet s’impose : Zoubida. « J’ai tout d’abord fait une veste pour moi, qui a tapé dans l’œil de beaucoup d’amis, avant de penser à créer une ligne et lancer ma marque », sourit-elle. Sa particularité ? Célébrer les maâlems tout en réinventant les codes. Son idée audacieuse : transformer les tissus d’ameublement en jacquard – vous savez, ceux de nos canapés – en vestes, robes ou babouches ultra-stylées. « Ce que font les maâlems, c’est de l’art, pas de l’artisanat qu’on range au grenier ! » martèle la créatrice qui travaille entre Rabat, Fès et Londres. « L’humain est au cœur de mon travail, ajoute Sophia Kacimi qui a pour bras-droit, son papa. Nous travaillons avec les mêmes artisans depuis maintenant 4 ans. »
La styliste propose une approche alternative de la mode. « Nous confectionnons des pièces intemporelles, décorrélée du rythme des saisons, et nous travaillons sur des demandes sur-mesures, la quintessence d’une marque raisonnée », lâche joliment la créatrice qui a été remarquée par la presse internationale telle que Libération, Financial Times ou encore AD Middle East.
Depuis, la lauréate de la bourse Artisanat et Engagement de la Maison Mode Méditerranée (MMM), multiplie les expérimentations entre mode, artisanat et art. En effet, l’art s’invite au cœur de sa démarche : ses créations deviennent des objets hybrides, à mi-chemin entre vêtement et installation. « L’art m’aide à raconter ce que la couture seule ne peut pas dire », confie-t-elle. Son projet Play On Craft en est la preuve : un jeu d’échecs géant en jacquard, conçu main dans la main avec des artisans marocains, où chaque pion rend hommage au geste artisanal. L’œuvre a été exposée à la Foire africaine d’art contemporain 1-54 à Londres et au Victoria & Albert Museum.
Aujourd’hui, Sophia Kacimi continue ses expérimentations dans la mode pour le plus grand plaisir de ses clients. « J’essaie désormais d’intégrer des détails anciens dans mes collections », confie-t-elle. Un vrai défi, mais surtout un bonheur pour celle qui adore créer l’inattendu !
@zoubida.official
Crédits photos : Guy Bolongaro, Osama Ahdi, Alexandre Desmidt et Philippine Antoine
