Meriem Berrada, L’architecte culturelle

Elle façonne des expositions comme d’autres construisent des maisons. Avec méthode, intuition et exigence. Commissaire d’exposition, curatrice indépendante, mais aussi mère, pédagogue, médiatrice, Meriem Berrada est devenue une figure incontournable de la scène culturelle marocaine et africaine. Portrait.

La rencontre a lieu un matin de juillet, dans les locaux de Femmes du Maroc. Meriem Berrada arrive avec cette élégance sans ostentation qui la distingue. Robe verte, rouge à lèvres éclatant, regard franc. Elle est menue, posée, d’une attention presque immédiate. À peine installée, elle capte l’espace par sa présence calme et sa parole précise. On comprend vite qu’elle choisit ses mots comme on pose des œuvres sur un mur : avec soin et sens. “Je suis très attentive aux détails. C’est mon mode de fonctionnement”, glisse-t-elle.

À 39 ans, Meriem Berrada a déjà conçu nombre d’expositions, dirigé un musée, formé une génération de jeunes opérateurs culturels, et bousculé les codes bien trop lisses du commissariat d’exposition. Pourtant, rien ne la prédestinait à ce parcours. Née à Fès dans une famille éloignée du monde artistique, elle découvre l’art à travers les formes, les matières, les gestes. “À Fès, l’art est partout. Dans les mosaïques, les plafonds, les tissus. On le respire sans même le savoir.” Mais c’est à Paris, devant une œuvre d’Yves Klein, qu’elle ressent pour la première fois le choc de la beauté. “C’était juste du bleu. Et pourtant, j’étais bouleversée. J’ai compris que je n’avais pas besoin de comprendre pour être touchée.”

Vision engagée

Après des études de sociologie, puis de marketing, elle se tourne vers le management culturel. C’est en 2011, de retour au Maroc, que sa carrière prend un tournant concret. Elle intègre la Marrakech Art Fair, collabore avec la CMOOA, puis rejoint la Fondation Alliances. Elle y lance “La Chambre Claire”, un prix dédié à la photographie émergente, et “Passerelles”, un programme de médiation culturelle en périphérie urbaine. “J’ai appris en faisant. Je n’ai pas de formation d’historienne de l’art, mais j’ai toujours su m’entourer. Et surtout poser des questions.” En 2016, elle participe à la conception du MACAAL, le Musée d’art contemporain africain Al Maaden, à Marrakech, dont elle devient la directrice artistique. Elle y construit une vision ouverte, engagée, résolument tournée vers les récits du continent africain. “Je ne crois pas aux expositions hors-sol. Tout doit partir de l’écoute : de l’artiste, du lieu, du contexte.” Elle s’entoure d’artistes comme Amina Agueznay, M’barek Bouhchichi, ou encore Salima Naji, avec lesquels elle construit des dialogues sensibles, exigeants, engagés.

Son travail repose sur trois piliers : la mémoire, la transmission, et l’écosystème. Elle pense le commissariat comme une architecture vivante, où l’on relie les disciplines, les récits, les publics. “Mon rôle, c’est de créer les conditions de la rencontre. Et de permettre aux artistes d’aller là où ils n’avaient pas imaginé aller.” Elle défend aussi une approche éthique, où la scénographie devient langage, et où l’institution ne se résume pas à une façade. “Je veux casser cette idée du musée comme espace élitiste. Il doit être ouvert, traversé, habité.”

Une affaire “d’entre-deux”

Son diagnostic du marché de l’art marocain est sans appel : “On a des artistes extraordinaires, mais peu d’espaces intermédiaires. Soit tu es très coté, soit tu es invisible. Il faut créer des formats accessibles, pour que les jeunes puissent aussi acheter de l’art.” Elle milite pour une meilleure structuration du secteur, plus de formation, plus de ponts entre le monde de l’art et le grand public. C’est ce qui la pousse à lancer le MACAAL Bootcamp, un programme de formation destiné à de jeunes professionnels africains de la culture. “J’aurais rêvé avoir ça à mes débuts. Former, c’est aussi transmettre ce qu’on aurait aimé recevoir.”

Côté perso, Meriem est maman d’un petit garçon de trois ans. Elle ne cache pas les difficultés à jongler entre les projets, les déplacements, et la vie de famille. “Je fais de mon mieux. Mon mari est très présent, on s’organise ensemble. Mais ce n’est pas simple. J’apprends encore à cloisonner.” Elle évoque sans fard les injonctions contradictoires, la pression sociale, la fatigue. “Je crois qu’on est toutes dans le même bateau, quelle que soit notre profession. Et souvent, on ne dit pas à quel point c’est difficile.”

Le yoga, la lecture, la couture sont ses refuges. “Je bricole, je brode, je couds, mais pour moi. Sans enjeu. Juste pour le plaisir.”  Lorsqu’on lui demande si elle a un rêve inavoué, elle sourit. “Pas vraiment. Je n’ai pas de plan. Ce qui me porte, ce sont les projets.” Elle aimerait continuer à voyager dans des lieux préservés, “à l’écart des chaînes mondialisées qui uniformisent les villes.” Elle parle d’archives, de gestes ancestraux, de diversité à préserver. Elle n’a pas besoin de grandes envolées : ses mots, comme ses expositions, tiennent dans une ligne claire. “Je ne rêve pas. Je bâtis.”

Et elle bâtit bien. Avec une constance rare, une humilité touchante, et une exigence de chaque instant.

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