Nous et le plus beau pays du monde
Le fait est incontestable : chaque Marocain et Marocaine est attaché (e) à son pays viscéralement.
Des Marocains de souche aux bi- nationaux, en passant par les RME qui y
reviennent régulièrement, on retrouve cette mystérieuse attraction pour une contrée
qui les épuise (quand ils y vivent) et leur manque affreusement (quand ils s’en éloignent).
Une identité partagée qui trouve son socle dans son slogan fondateur : “Dieu, la
patrie et le Roi”, avec la merveilleuse darija qui n’appartient qu’à nous et le mélange de
cultures arabo- berbéro- franco- espagnole qui nous caractérise. En deuxième rang, il y
a aussi le fait d’aimer le couscous et de boire le thé à la menthe, de reconnaître un gendarme
local parce qu’il porte la moustache ou de reporter toujours la faute sur les
autres (ex : ce n’est pas toi qui a raté le train ; c’est lui qui est parti sans toi etc…). On
jouit également d’un espace de modernité ancré dans la tradition qui ne trouve son
équivalent nulle part ailleurs, conduisant à une schizophrénie de comportement que le
Marocain a adoptée comme faisant partie du cours normal des choses. On peut alors
croiser des arrivistes pieux en 4/4, des nouvelles vierges à l’hymen refait ou des parents
arabophones qui ont placé leurs gosses à la Mission.
A l’évidence, dans toute cette cacophonie, se trouver un référent en béton, valable
pour tout le monde, reviendrait à devenir vite fou. Si la question cruciale de l’assimilation
des immigrés, et des musulmans en particulier, a déclenché le débat en France, que
pouvons- nous dire, nous, de notre identité nationale, largement débordée par les différentes
populations maroco-marocaines en lice ? Car, qu’ont finalement, en commun,
les nantis occidentalisés et coupés de la base avec la classe moyenne laborieuse ? Les
islamistes avec les défenseurs de la laïcité ? Ceux qui s’affichent fiers de nos dix siècles
d’histoire avec ceux qui les jugent arriérés et anachroniques avec le présent ? Celles qui
portent le voile et les autres qui les narguent en mini- jupe ? Les fans de Desperate
house wives et les groupies de la chanteuse Haïfa siliconée ? Réponse : pas grand-chose !
Et si la cohabitation ne dérange personne, elle s’effectue pourtant en parallèle.
L’explication : tout ce beau monde a poussé à la va-vite, embrassant les valeurs (ou l’absence
de valeurs parfois) de son milieu qui ne lui a inculqué que la façon d’être et de
penser d’un microcosme donné. Sortis du régionalisme, on a atterri sans crier gare dans
la mondialisation et chacun s’est servi n’importe comment et égoïstement comme
d’habitude. Oubliant que l’identité nationale est aussi à pétrir dans un esprit de citoyenneté…
Quand l’Education nationale est en faillite, que les politiques sont atones et que
le champ social indique tout et son contraire, il est attendu qu’on ne se retourne plus
vers nous-mêmes mais vers l’extérieur (et pas toujours dans ce qu’il a de meilleur). En
terme d’identité nationale, ce sont donc malheureusement les paraboles, les temples
de consommation ou le mimétisme aveugle qui remportent la mise !