L’équipe nationale féminine qui a remporté récemment à Tunis le tournoi de l’Union Nord Africaine de Football a été reçue par le Président de la Fédération le 25 février au complexe Mohammed VI à Salé, pour célébrer ce sacre. Faut-il y voir un signe ? Assurément. Signe de l’intérêt grandissant et de plus en plus prononcé, que porte le Maroc au développement du foot féminin.
Et nous nous en réjouissons ! Parce qu’il est aujourd’hui mondialement admis que le football est un terrain propice et favorable à l’égalité des genres. Quoi de mieux, en effet, qu’un match de football féminin pour tacler les stéréotypes, marquer des buts contre les inégalités et s’affranchir des codes qui confinent les filles et les femmes dans des rôles qu’elles n’ont pas forcément choisis ?
Dès leur plus jeune âge, les filles sont confrontées à l’idée que certains sports ne sont faits que pour les garçons. À la maison, dans les cours de récréation et dans l’espace public, on a toujours voulu leur faire croire qu’elles étaient nées pour être épouses et mères seulement et donc on les excluait de toutes les activités sportives qui compromettraient et mettraient en danger ces fonctions, sans même leur demander leur avis. Sous le poids de ces stéréotypes, les filles n’ont pas osé investir les terrains de peur d’être jugées. Mais au fur et à mesure que les mentalités ont évolué, elles ont fait tomber ces barrières et ont bravé les traditions pour s’affirmer d’abord au sein de la famille, puis dans la société en quête d’épanouissement, voire même en quête d’exploits sportifs.
les valeurs d’égalité et d’équité
C’est ainsi que des jeunes filles ont chaussé leurs crampons et ont rejoint des clubs et des associations sportives pour y pratiquer le sport longtemps réservé aux garçons, créant une pépinière de joueuses qui peuvent prétendre désormais jouer les premiers rôles dans les compétitions régionales. Dimanche 23 février, l’équipe des U17 a atterri à Gaborone au Botswana pour y disputer un match comptant pour les éliminatoires de la Coupe du Monde dans cette catégorie, qui aura lieu en Inde l’été prochain. “Notre ambition est de nous qualifier pour représenter le Maroc à cette compétition mondiale”, nous confie la coach Lamia Boumehdi, ancienne joueuse de football qui a commencé à taper dans un ballon dans la rue avec les enfants de son quartier à Berrechid pour ensuite faire carrière dans le foot au Maroc et dans d’autres pays, comme la Norvège et le Liban. Une blessure aux ligaments l’éloignera des terrains, mais elle y reviendra en tant qu’entraîneur après avoir fait une formation à la Faculté des sciences du sport à Leipzig en Allemagne et obtenu des licences. Aujourd’hui elle fait partie du staff de la Fédération et elle est en charge des U17. “Ce sont généralement des filles qui font partie du programme sport/études. Elles sont au Centre du lundi au vendredi et en fin de semaine, les plus jeunes vont dans leurs familles tandis que les autres vont retrouver leurs clubs”, explique Lamia qui estime que cela renforce la cohésion d’équipe et permet surtout à des jeunes filles qui ont été déscolarisées pendant une année ou deux de retrouver les bancs de l’école. “Toutes n’iront pas jusqu’au bout d’une carrière dans le sport, et avec ce système, elles sont assurées d’avoir un avenir.” Ces jeunes filles vont dans des écoles privées qui ont accepté d’aménager leurs horaires pour qu’elles puissent également s’entraîner. Elles bénéficient également de cours de soutien pour rattraper les retards dans certaines matières comme les langues par exemple. De même qu’une convention a été signée avec l’office de la Formation Professionnelle (OFPPT) pour celles qui ne suivent pas à l’école. “Depuis l’arrivée de Faouzi Lekjaa à la tête de la fédération, le football féminin a évolué. Il en a fait un chantier prioritaire”, affirme coach Boumehdi qui ajoute que ces efforts doivent être soutenus par les clubs, le secteur privé et les médias pour maintenir cette dynamique en faveur du football pratiqué par les filles. Mettre en lumière ces joueuses de Casablanca, Rabat, Khénifra, Azrou, Laâyoune, Tanger, c’est créer des modèles de réussite et montrer que c’est possible, que les terrains de foot sont ouverts aux filles, que les règles du jeu sont les mêmes. C’est par conséquent le meilleur moyen de lutter contre les clichés et les stéréotypes. Une fille qui joue au foot gagne en autonomie, en estime de soi, en confiance et ouvre des perspectives devant des milliers d’autres jeunes filles qui la regarderont jouer et c’est comme cela que l’on parviendra à accélérer la cadence de la féminisation du sport.
Le bénéfice de cet engagement, s’il est d’abord sportif, il est aussi social. Ce n’est pas pour rien qu’en juin dernier la FIFA, instance dirigeante du football mondial et ONU Femmes, l’organe des Nations Unies pour l’Egalité des sexes et l’Autonomisation des Femmes ont signé un protocole d’accord pour œuvrer ensemble pour élaborer des politiques sportives qui consacrent les valeurs d’égalité et d’équité.
©FRMF Ahmed Belmekki