Je lui ai laissé la garde des enfants

Assia, mère de deux jeunes garçons, a choisi de renoncer à son droit de garde en faveur du papa. Envers et contre tous. Exposée aux critiques de toutes parts, elle a tenu bon. Mais si en surface elle assume, elle reconnaît que ce n’est pas facile tous les jours...

“J’e sais que j’ai nourri les conversations de salons et entretenu bien des médisances à mon égard. Je ne suis pas de bois et certaines attaques, je ne vais pas me mentir, m’ont profondément atteinte. Malheureusement, les gens ne perçoivent que l’aspect superficiel des choses et ont tôt fait d’émettre des jugements à l’emporte-pièce.

À l’époque, j’étais mariée depuis douze ans avec Rachid et mon couple traversait une grosse tempête. Mon mari s’était lassé de moi et nous baignions dans un quotidien routinier et sans saveur. Nos rares échanges dégénéraient systématiquement en reproches et en éclats de voix. La liste de mes griefs le faisait sortir de ses gonds. À bout, je ne supportais plus que Rachid travaille jusqu’à pas d’heure en me laissant égoïstement me battre sur tous les fronts. Notre vie intime était réduite à peau de chagrin et les marques de tendresse étaient devenues inexistantes. Tout cela semblait lui passer au-dessus de la tête… Sa nomination récente à un nouveau poste semblait l’accaparer au point que nous n’existions plus à ses yeux. Ni moi, ni mon travail, ni nos enfants. C’est ce que je pensais fort naïvement.

Pour ne rien arranger, mon aîné s’est mis à avoir des problèmes de discipline à l’école. Il chahutait en classe, me mentait sur les devoirs à rendre, dérobait des affaires à ses camarades. En conflit ouvert avec lui, j’avais peur qu’il ne contamine à son tour le plus jeune. Ce dernier, par mimétisme, commençait à me répondre avec arrogance et à traîner des pieds pour obéir. Or je ne trouvais guère de soutien auprès de leur paternel. Mon mari, auparavant entouré d’une certaine aura d’autorité, avait déserté la barque.

Èpuisée mentalement et physiquement, je me sentais déconfite : ce couple auquel j’avais tant cru au départ était en train de se déliter. Je ne prenais plus soin de ma personne, ne me maquillais plus et enfilais des vêtements informes pour masquer ma prise de poids récente. Ma vie de robot était ponctuée des mêmes étapes immuables : travail, courses, transport, devoirs, dîner…

C’est dans ces conditions que j’ai atterri chez un psychiatre qui m’a administré des antidépresseurs. Les médicaments ont anesthésié la douleur mais elle était toujours là, latente. Un soir, une fois les enfants couchés, Rachid a souhaité me parler. La démarche m’a tellement étonnée que j’ai ressenti une onde de joie me parcourir. Elle fut de courte durée. Il a enchaîné sur nos divergences irréconciliables et son souhait de divorcer à l’amiable. J’aurai la garde des enfants avec toutes les compensations financières et chacun aurait la paix. Amen. Le cœur brisé, je n’ai pas opposé de résistance. Dans un état presque second, j’ai passé les tentatives de conciliation avec le juge de la Famille. Mon ex-futur mari a, du reste, convenu de nous reloger ailleurs avec les enfants.

Et puis, patatras ! J’apprends par une amie de la famille que monsieur fréquente une demoiselle depuis un certain temps et qu’il envisage de lui passer la bague au doigt aussitôt le divorce prononcé. L’explication à son comportement devenait claire. Mon ego en a pris un sacré coup. Je les ai pistés discrètement pour en avoir le cœur net : elle était bien entendu belle, jeune et radieuse.

Un désir fou de vengeance m’a saisie. C’était la goutte d’eau qui faisait déborder le vase. La petite phrase prononcée par mon frère : «Et pourquoi tu ne lui laisserais pas la garde des enfants ?», a commencé à résonner dans ma tête. Déjà déprimée et dépassée par les évènements, je ne voyais pas comment j’allais m’en sortir avec deux garçons difficiles à tenir. Soit, il voulait refaire sa vie. Mais pas à mes dépens et en étant gagnant sur toute la ligne. J’ai donc opté pour “tanazoul” (abandon de la garde au profit du père).

Une fois ma décision prise, j’en ai informé mes garçons, en leur expliquant qu’il valait mieux qu’ils habitent avec leur père dans leur environnement familier, mais que nous continuerions à nous voir très souvent. J’ai parlé de ma grande fatigue et de mon amour pour eux qui restait intact. Le premier est demeuré silencieux, tandis que le deuxième a fondu en larmes.

En guise de contre-attaque, Rachid a dépêché un tas d’émissaires pour tenter de me faire changer d’avis. Belle-mère, oncles, amis de la famille, tous m’assénaient le même argument : une vraie mère ne peut abandonner ses enfants. Je me rendais coupable de la destruction de la symbolique de la maternité. Je me sentais prise au piège, culpabilisée au maximum par l’entourage et les collègues horrifiées. Mais à ce moment-là, je ne pensais qu’à une chose : sauver ma peau. Dormir. Voyager loin quelque temps. M’extraire de la tourmente sociale et personnelle où j’étais. C’était une question de vie ou de mort. 

J’ai envoyé un long mail à Rachid en le priant de ne pas envenimer la situation et de privilégier l’intérêt des enfants en se gardant de me “charger” ou de parler de moi en de mauvais termes. Par ailleurs, j’étais tranquille au moins sur un point : le connaissant, il ne me priverait pas de la possibilité de les voir, indépendamment des droits de visite autorisés par la loi. Le plus bizarre est qu’il ait réussi malgré tout à convaincre sa dulcinée de l’épouser en dépit de la nouvelle configuration. Les garçons, qui me rapportaient quelques bribes du foyer recomposé, la trouvaient plutôt sympathique et ne se mêlant pas de leurs rapports avec leur père. J’avais un poids en moins sur la conscience.

Quant à moi, j’avais besoin de me reconstruire et d’être entourée. Je suis repartie habiter chez ma mère quelque temps. Dorlotée comme une petite fille qui a un gros chagrin… Peu à peu, j’ai remonté la pente et j’ai pardonné à mon ex. J’ai réorganisé ma vie, j’ai recommencé à me soucier de moi en reprenant le sport et les sorties simples. Un jour sur deux, je vais chercher les enfants à l’école et je les fais goûter avant de les ramener à la maison. Par miracle, ils ne m’ont pas tenu rigueur de la situation. Ils m’appellent à tout bout de champ, que ce soit pour résoudre une équation de maths ou pour bavasser de façon décousue. Mon temps de présence physique a beau être réduit, le volet affectif y est. Je ne me préoccupe plus de coller à l’étiquette de la mère parfaite, à partir du moment où mes enfants trouvent leur équilibre. La question qu’on me pose le plus est si je regrette ma décision. Je réponds avec philosophie qu’un divorce perturbe de toutes façons les enfants et que mon lien avec eux est indestructible. Après tout, je n’habite qu’à cinq cent mètres de chez eux… 

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