FF Chronique : Un fniounesque calvaire!

Mille milliards de mille fliflates ! Face au miroir, j'ai juré comme un charretier lorsque j'ai découvert sur mon menton un magnifique bourgeon, annonçant la belle saison.

Dans la réalité moins poétique, il s’agissait d’un gros bouton affreux, témoin de mes excès de Kinder et de burgers. En poussant l’inspection, j’ai aussi remarqué, sur mes cuisses gondolées, l’équivalent des peaux d’oranges exportées par le Maroc. Mes démons intérieurs se sont alors réveillés, tels des animaux émergeant de leur hibernation, un peu hagards, après une longue parenthèse froide. La partie saine de Fniouna s’est mise à réclamer d’urgence d’ouvrir les fenêtres et de s’aérer pour un grand nettoyage de printemps. J’ai inspiré, telle une condamnée, ma dernière bouffée de monoxyde de carbone spécial teint gris et j’ai sauté dans ma nouvelle peau toute rose. Le programme meurtrier ainsi concocté était digne de la future ascète que j’entendais devenir : zéro viande; zéro gras ; zéro sucre ; mille calories par jour ; une heure de sport à 6h du matin, en plein air ; un forfait de vingt massages amincissants pour le mois ; une séance de méditation toutes les quatre heures ; un coucher militaire à vingt et une heure… Le dalaï-lama n’a qu’à bien se tenir !

Lundi, 6h : si mon corps n’attendait que d’être purifié, visiblement, il aurait sans doute préféré l’être après une bonne grasse matinée. Hyper énervée, j’ai failli casser le réveil qui sonnait jusque dans ma tête ! Mais au lieu de cela, les cheveux en pétard, ayant oublié mes lentilles de contact, j’ai enfilé mon jogging. Après une heure de petites foulées “à l’aveugle” sur le boulevard Abdelmoumen, je me suis fait la réflexion que si je n’allais plus mourir de la clope, je ne réchapperai certainement pas de la pollution des tuyaux d’échappement de “Casatchernobyl” ! Pour être diététiquement au poil, j’ai ensuite avalé un café sans sucre, une misérable tranche de pain complet sans beurre et un yaourt sans matières grasses. A ce moment précis, j’ai commencé à saisir la différence entre une vie “avec” et une vie “sans”.

Lundi, 10h : dans l’open space du bureau, ma posture de lotus avec les mains devant les yeux a commencé à intriguer tout le monde. J’ai prétendu m’être convertie à la méditation tantrique depuis quelque temps, histoire de mieux me concentrer sur mon travail. En réalité, avec mes mains, je m’efforçais de ne pas voir la magnifique tarte au citron que ma voisine avait sorti de son sac. Equation à cent sous : comment se remplir de nourriture spirituelle quand l’exercice de contemplation intérieure vogue obstinément sur des terrains meringués ?

Lundi, 13h : la lutte contre mes instincts de primate épicurienne se poursuit à la cantine. Torturée mais férocement volontaire, j’ai attaqué ma salade verte, mes trois haricots et mes deux carottes en salivant, comme si c’était le Ramadan, sur l’entrecôte du jour.

Lundi, 18h : je peux dire que je n’ai plus d’amis parmi mes collègues. Et pour cause ! Le peu d’énergie qui me restait s’est transformé en haine sauvage à l’encontre mon prochain. Frustrée jusqu’à l’os : oui. Zen : non !

Lundi, 19h : mon ventre vibre de concert avec le Power Plate. Mes cuisses agonisent au passage du Starvac et mon bourreau des rondeurs persiste à s’acharner sur ma chair décharnée. Je pense avoir fait le plein de courbatures jusqu’en 2014 !

Lundi, 20h : lorsque Gibrilou m’invite, comme à son habitude, à terminer ses frites, je ne peux plus dire “non”. Je jette l’éponge, nous autorise à regarder ensemble “Alice au pays des merveilles” jusqu’à une heure indue, retrouve le sourire et l’élargis encore en m’enfilant une fournée de cacahuètes salées. Si j’ai encore un bouton demain, ce sera la floraison du printemps…

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