Sur la plage d’Agadir, à quelques pas de la marina, des lumières multicolores attirent la foule. Sur place, une importante concentration humaine se déhanche sur les sonorités rythmiques des quelques morceaux house mixés par Djette Mam’s. L’air pur de la perle du sud sous le ciel étoilé plonge la masse dans
une ambiance bon enfant. Des préadolescents sont vêtus comme leurs idoles, et femmes et hommes dansent pieds nus sur le sable fin et frais. Pour les Gadiris et les quelques mélomanes venus des quatre coins du Maroc, le concert pour la Tolérance n’est pas qu’un simple défouloir. C’est en effet un événement chargé de principes, défendant une cause noble et indissociable de la vie de tous les jours.
“Je ne rate aucune occasion d’assister au concert pour la Tolérance. D’abord grâce au show qu’il nous procure, mais également parce que je défends bec et ongles le principe de la tolérance qui est, malheureusement, absent dans les sociétés contemporaines”, nous lance Hatim, emporté par l’euphorie du moment. Le concert est certes une occasion annuelle pour se remettre en question et s’ouvrir aux autres, mais il permet surtout au public de s’extasier en live devant les performances de ses vedettes favorites. Les organisateurs placent la barre de plus en plus haut en invitant une pléiade de chanteurs connus et reconnus sur la scène musicale nationale et internationale. Des artistes comme AhmedSoultan, azagan, Vigon, Cheb Khaled, Enrico Macias, Garou, Corneille, Jenifer, Matt Pokora… ont défilé le temps ’une chanson ou deux, en l’honneur de la tolérance et du respect d’autrui.
Un hymne à la joie et à la bonne humeur
Il a suffit de peu de temps pour remplir la scène gadirie de près de 200.000 spectateurs. Les yeux rivés sur l’estrade, chacun attendait l’entrée de son artiste préféré. C’est finalement Cheb Khaled, vêtu tout en noir satiné, qui a ouvert le bal avec son tube du moment signé par notre RedOne national : “C’est la vie”. Les rythmes saccadés du morceau ont plongé la foule dans une allégresse instantanée. Les organisateursont décidément bien fait de débuter le show avec cet artiste dont la popularité n’est plus à démontrer ! Tout au long de la soirée, les artistes de variété française se sont succédés pour interpréter leurs singles les plus notoires, au grand bonheur d’un public fidèle à sa réputation de connaisseur en matière de musique. En effet, la foule hétéroclite s’adaptait avec beaucoup d’aisance et de naturel à tous les registres musicaux. Tout au long de la soirée, les fans n’ont cessé de fredonner les refrains des tubes à succès repris par les artistes. Et parce qu’un message est plus facile à faire passer en musique, les chanteurs de diverses nationalités avaient le souci de sensibiliser le public au respect des différences,à l’ouverture sur l’autre et au partage. Pari gagné, à en croire l’afflux massif qu’a connu ce concert !
Duos d’enfer
Le point commun entre Vigon et Garou ? Ceux auxquels “The Voice” est venu à l’esprit n’ont toujours pas trouvé la bonne réponse. En effet, leurs voix graves et leur timbre rock’n’roll font d’eux des artistes hors pair au talent singulier. Mettez- les en duo et vous obtiendrez un cocktail explosif garantissant dynamisme et bonne humeur. C’était la première fois que Vigon participait au concert pour la Tolérance dans la ville où il s’est forgé une carrière musicale à petite échelle, et où il a conçu une grande partie de son répertoire musical. Les organisateurs lui ont donné une occasion bien méritée de renouer avec son public d’antan. Cette soirée de festivités et de partage nous a fait vivre des moments de profonde émotion, notamment à travers d’autres duos d’envergure. C’est sous un tonnerre d’applaudissements que les deux natifs d’Oran, Cheb Khaled et Enrico Macias, ont entraîné le public dans un joyeux voyage en chantant “L’oriental” en parfaite symbiose et en complète synergie. Et pour la dose de fraîcheur et de pop, les spectateurs pouvaient compter sur Corneille et sa partenaire sur scène : Kristina Maria. Le chanteur d’origine rwandaise a repris la version francophone de “Co-pilote”, dont l’originale anglophone est interprétée par Laza Morgan. “La chanson raconte mon vécu, mes expériences personnelles et les choses que j’ai apprises tout au long de ces dernières années”, affirme Kristina Maria. Unis pour la bonne cause Si quelques artistes participent pour la première fois à cette manifestation culturelle,d’autres en ont fait un rendezvous annuel. En effet, certains sont des habitués du concert pour la Tolérance et prennent fréquemment part à l’événement pour soutenir cette cause. Et ce n’est pas la star du raï Cheb Khaled qui dira le contraire. “C’est très important d’être là ce soir. Il faut accepter la différence de l’autre et vivre avec amour. C’est la vie”, lance-t-il. Pour d’autres, le concept de la tolérance dépasse le simple fait d’accepter les autres, mais plutôt d’aller vers eux, de les comprendre et d’apprendre à vivre en communion. Pour Corneille, connu notamment pour ses chansons profondes et chargées de bon sens, “on ne pourra jamais vivre dans un monde taillé sur mesure et spécifique à nos envies. Nous vivons dans un univers désormais hétéroclite où réside une grande diversité de religions, de croyances et d’ethnies. Pour vivre heureux, il faut apprendre à vivre en communauté ; abstraction faite des différences”. Participant au concert pour la Tolérance à titre bénévole, les artistes sont certes engagés, mais aussi concernés. La chanteuse française Louisy Joseph – qui a commencé sa carrière en solo depuis 2008 après avoir fait partie pendant sept ans du groupe L5 – se sent particulièrement concernée par la notion de la tolérance, ayant elle-même quelquefois souffert des jugements d’autrui. “J’ai grandi dans la banlieue de Lyon, je suis martiniquaise, et donc une femme de couleur. J’ai moi-même été l’objet d’intolérance quand certains me parlaient de ma couleur de peau, mi-brune, mi-blanche. Ils ne se rendaient pourtant pas compte que cela m’affectait et me mettait mal à l’aise. J’ai donc évolué sous ces regards malveillants”, raconte la jeune femme avec émoi avant d’ajouter : “Il est très important d’accepter les valeurs qu’on ne partage pas forcément. L’humilité est la clé du bonheur. En étant tolérant, on se rend d’abord service à soi-même”.
Mission accomplie
Pour sa 7ème édition, l’événement illustre la richesse multiculturelle dont regorge le Maroc. Si Agadir est une destination touristique et balnéaire, c’est aussi, indéniablement, une ville placée sous le signe de la générosité, du partage et de la culture dans toute sa diversité. Organisé en 2005 à Hammamet en Tunisie, le concert a été transporté à Agadir dès 2006, avec l’appui majeur de l’Association pour la Tolérance. Produit cette année par Electron Libre, l’événement bénéficie pour la première fois du soutien du groupe France Télévisions. Sur le plan national, c’est la deuxième chaîne qui accompagne le spectacle, notamment sur le plan technique et humain. Le concert sera diffusé en prime time sur les chaînes de télévision France 2, France Ô, TV5 Monde et 2M.