Inès Tazi : “J’ai grandi dans une famille où les femmes tenaient le leadership”

Féministe convaincue et entrepreneuse à la présence inspirante sur les réseaux sociaux, Inès Tazi incarne à merveille cette nouvelle génération de jeunes femmes qui n’hésitent pas à relever de multiples défis, à aller au bout de leurs passions et à briller à tous les coups. Entretien à cœur ouvert avec une femme bien dans sa peau.

Tout d’abord, pourriez-vous vous présenter en quelques mots ?
Je m’appelle Inès Tazi, j’ai 29 ans. Je suis entrepreneuse et créatrice de contenu. Je travaille dans les médias au sens large : entrepreneuriat, écriture, télévision… Mais une grande partie de mon travail aujourd’hui, c’est la création de contenu, souvent rythmée par le calendrier de la mode et les Fashion Weekstablie. En 2017, j’ai réalisé mon premier téléfilm.

Vous portez plusieurs casquettes, mais comment aimeriez-vous que l’on vous définisse ?
Aujourd’hui et plus que jamais, les industries créatives sont interdépendantes et très complémentaires. Donc avoir plusieurs casquettes et être pluriel, c’est quelque chose de beaucoup plus accepté, voire normal. Et puis de manière générale, j’aime bien l’idée qu’on puisse cocher plusieurs cases sans s’enfermer dans une en particulier.

Veste en flanelle de laine, Bottega Veneta. Chemise en popeline, Vivienne Westwood. Cravate vintage (collection privée). Jupe en crêpe, Balenciaga. Chaussures en cuir, Saint Laurent.

De la géopolitique aux apparitions Netflix, peut-on dire qu’il n’y a qu’un pas ?
(Rires) Pas vraiment un pas… disons un chemin plein de détours. À mes 12 ans, j’ai su que je voulais étudier les sciences politiques. J’avais envie d’avoir un métier à impact, de défendre des convictions fortes, notamment concernant le droit des femmes. Je me suis donc plongée dans la géopolitique, puis l’entrepreneuriat, et finalement j’ai fini par tourner des shows pour Netflix. Ça m’est tombé dessus par hasard, sans chercher de casting. C’est une opportunité que j’ai saisie et que j’ai voulu transformer, et l’inscrire dans un projet à plus long terme qui me ressemble le mieux. Même si tout cela peut sembler décousu, pour moi le fil rouge a fini par être plutôt clair : trouver la meilleure manière de communiquer ce qui compte pour moi.

Vous vous êtes fait connaître grâce à l’édition française de l’émission “The Circle Game”. Racontez-nous cette aventure ? Qu’en avez-vous tiré comme enseignement ?
C’était une expérience sociale grandeur nature qui mettait en avant la différence entre une identité virtuelle et la réalité. Ça me rappelle la phrase de Jean Baudrillard qui dit : “Le virtuel finit par devenir plus réel que le réel.” Même si c’est un jeu d’entertainment, je pense que le fond du message a beaucoup de sens.

Veste en flanelle de laine, Bottega Veneta. Chemise en popeline, Vivienne Westwood. Cravate vintage (collection privée). Jupe en crêpe, Balenciaga. Chaussures en cuir, Saint Laurent.

Vous travaillez également sur des documentaires. Que pourriez-vous nous en dire ?
Je travaille depuis un an et demi sur un projet d’écriture. C’est un docu-série, mais c’est une première pour moi car je n’avais jamais écrit ni produit par le passé. Je me suis entourée de scénaristes et de gens beaucoup plus expérimentés. Pour l’instant, c’est encore préliminaire, donc je reste discrète.

Peut-on vous qualifier de féministe ?
Oui complètement. Pour moi, être féministe, c’est avant tout du bon sens. Mais ce n’est pas venu uniquement de lectures ou de théories : j’ai grandi dans une famille où les femmes tenaient le leadership. Ma grand-mère, mes grands-tantes… elles ont toujours travaillé, elles ont guidé la famille avec autant de force que d’élégance, avec du charisme, de l’empathie et un vrai sens de l’autorité naturelle. J’ai grandi en voyant des femmes fortes qui menaient la danse, et ça a façonné ma vision du féminisme : quelque chose de très concret, très vécu. Ce n’est pas un sujet exclusivement féminin, c’est aussi un sujet profondément masculin. Dans toutes les civilisations, la plus belle vertu de l’homme a toujours été de protéger sa patrie, son foyer et sa famille. Je ne vois pas en quoi le féminisme serait différent. C’est un projet de société commun où chacun et chacune ont un rôle à jouer.

Tailleur en laine froide, Givenchy. Boucles d’oreilles Trinity, bracelet Clash, bracelet Juste un Clou et montre Santos, Cartier.

Quels sont vos combats et engagements ?
Mon engagement principal, c’est auprès des mères célibataires au Maroc, à travers l’association INSAF, avec laquelle je travaille depuis mes 15 ans. C’est une cause qui me bouleverse : une naissance, qui devrait être une joie, se transforme en condamnation sociale. Ces femmes se retrouvent rejetées de partout: famille, travail, société. C’est profondément injuste. J’invite n’importe quelle personne à agir à son échelle. Ça peut être aussi simple que de prioriser à l’embauche des personnes marginalisées – mères célibataires, personnes en situation de handicap… Je pense vraiment que c’est la responsabilité de la société civile de créer des ponts et d’aider celles et ceux qui en ont le plus besoin. On peut changer concrètement la vie d’une femme et d’un enfant avec simplement un e-mail. 

Vous êtes très active sur les réseaux sociaux. Ces médias  peuvent-ils, à votre avis, être des vecteurs de messages pour des changements positifs ?
Oui, clairement. Les réseaux sont des outils incroyables : ils peuvent donner confiance, inspirer, créer du lien. Mais ils peuvent aussi être contre-productifs. On est noyés d’informations – sur la nutrition, le bien-être, la productivité – et à force de se comparer, on ne sait plus quoi en faire. Il faut être conscient et avoir une discipline dans la manière dont on interagit avec ce surplus d’informations.

Tailleur en laine froide, Givenchy. Boucles d’oreilles Trinity, bracelet Clash, bracelet Juste un Clou et montre Santos, Cartier.

Vous êtes entrepreneuse, et vous avez lancé plusieurs boîtes. Pourriez-vous nous donner plus de détails sur vos projets ? 
En effet, j’ai lancé plusieurs projets entrepreneuriaux et autres. Certains sont en stand-by, parce qu’avec les tournages et d’autres impératifs, il a fallu que je choisisse mes priorités. Aujourd’hui, le vrai centre de gravité de mon travail, ce sont mes réseaux sociaux. Je les gère comme un média à part entière, avec une équipe interne plutôt qu’une agence. Ça me donne plus d’agilité et de précision, et ça me permet de choisir mon entourage. En gros, c’est comme diriger un magazine : il y a des éditos, des collaborations, des partenariats… sauf que tout se joue en digital. Et ça demande de l’instantané, des micro-projets tous les jours.

Quel est le projet qui vous tient à cœur et que vous n’avez pas encore réalisé ?
J’aimerais tourner dans une fiction. Le théâtre m’a toujours attirée, que ce soit comme actrice ou à la mise en scène. Ce que j’aime, c’est le côté collectif : travailler longtemps sur une œuvre avec une équipe, construire quelque chose ensemble. C’est très différent des réseaux, qui demandent de l’instantanéité. Une pièce ou un film, c’est un projet long terme, profond, collectif. Et ça, c’est un rêve que j’aimerais réaliser un jour. C’est un projet que j’essaie de concrétiser : je prends du temps pour faire des stages, des entraînements, des castings. J’essaie de progresser, d’apprendre, pour, je l’espère, arriver à le réaliser un jour.

Full look en tartan et mocassins en cuir, Gucci.

Quelle empreinte aimeriez-vous laisser à la postérité ?
J’aimerais incarner une nouvelle génération de femmes qui réconcilient : tradition et modernité, ambition et douceur, féminité et indépendance. Montrer qu’on peut être tout ça à la fois. En somme, créer des ponts entre des univers, des cultures, des façons de vivre. Mais je suis au début de mon parcours. Pour l’instant, mon but est à la fois de pérenniser cette entreprise, mais aussi de pouvoir aller au bout de mes ambitions créatives (mais qui sont malheureusement souvent moins lucratives). J’essaie de trouver la discipline nécessaire pour concilier les deux.

Quel est votre rapport à la mode ?
Vivienne Westwood disait que la mode traduit notre rapport à nous-mêmes et au monde. Je suis totalement d’accord. Depuis mes 15 ans, j’ai trouvé mon style : un smoky eye et des pièces fortes, souvent structurées – un blazer masculin, ou au contraire une robe féminine corsetée. J’aime ces contrastes. L’essence de mon style reste la même, mais il peut évoluer selon les saisons, les voyages, le lieu où je vis. La mode, c’est un petit peu comme un langage que j’utilise pour jouer, pour affirmer ou parfois contredire.

Chemise en popeline, Off-White. Pantalon denim, Fendi. Chaussures en cuir, Aeyde Paris.

Racontez-nous une journée-type de Inès Tazi ?
Il n’y en a pas, et c’est ce qui me plaît. Un jour je suis en brainstorming, le lendemain en shooting, le surlendemain en voyage ou en montage. C’est un métier qui demande d’endosser beaucoup de rôles différents. La seule vraie constante, c’est que mes journées sont longues et intenses. Et je crois que je suis devenue un peu addicte à ce rythme.

Quel message aimeriez-vous adresser aux femmes du Maroc ?
Je crois qu’une des raisons pour lesquelles le Maroc rayonne autant dans le monde tient à sa culture, à son artisanat et à sa créativité. Et tout cela est largement porté par les femmes, partout dans le pays. Nous en sommes les héritières, mais aussi les garantes. Il ne faut jamais sous-estimer la force, la résilience, la beauté et le charme de la femme marocaine. On mérite toute la lumière que l’on doit prendre.­ 

 

Direction artistique et stylisme Anas Yassine

Photographe Nada Satté

Make-up Souha salah 

Coiffure Sef Nour

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