FDM Comment l’idée vous est-elle venue de participer à ce rallye ?
Safae Challal : C’est la première fois que j’y participe et jusque-là, je me contentais de suivre le rallye à la télévision en rêvant d’y être. Ce qui m’intéressait par dessus tout, c’était le fait de vivre une aventure extrême en équipe. Le fait également de participer à un rallye en voiture, moi qui travaille dans l’industrie automobile, faisait sens à mes yeux. J’avais envie de vivre toutes ces difficultés, de me surpasser et de surcroît, dans un environnement que je ne connais absolument pas car le désert, je n’y étais jamais allée ! Mais la simple idée du coût financier que représente la participation à un événement du genre me décourageait d’avance. Puis, la chance m’a souri lorsque Renault, l’entreprise pour laquelle je travaille et qui participe au Rallye Aïcha depuis plusieurs années, nous a donné cette possibilité.
Vous n’avez donc pas eu de difficulté particulière à trouver un sponsor finalement…
Oui, tout à fait ! Mais on a quand même dû passer un concours pour être choisies. Une présélection a été organisée parmi les employés de Renault Maroc qui souhaitaient participer au rallye. Saida et moi nous sommes présentées à ce concours en tant que binôme et nous avons eu la chance d’être sélectionnées parmi 16 duos sur la base de notre CV et d’une lettre de motivation commune. Nous étions trois équipages marocains à être ensuite envoyés en France pour un week-end de préselection au cours duquel concouraient 25 équipages au total, tous employés de Renault à travers le monde. On nous a surtout jugées sur nos conditions physiques et nous avons passé des épreuves de VTT, course, kayak, orientation dans la nuit… Au terme de ce weekend, nous avons eu la chance de faire partie des heureuses élues !
Qu’est-ce qui a fait la différence entre vous et les autres, d’après vous ?
Certes, nos conditions physiques étaient bonnes mais on a aussi été jugées sur l’esprit d’équipe, la solidarité et la complicité au sein du binôme.
Une fois lancée dans le rallye, que découvrez-vous ?
En fait, avant même de commencer le rallye, nous avons suivi un stage de pilotage et de navigation pendant une semaine dans le désert, pour nous mettre en condition. Cela nous a permis de nous familiariser avec l’environnement, le désert, les reliefs et bien entendu… les problèmes qui pouvaient survenir ! Du coup, une fois le rallye commencé, on savait plus ou moins à quoi s’en tenir mais on a aussi fait pour la première fois l’expérience de la difficulté du parcours et surtout, l’épreuve du kilométrage à respecter. Et puis, j’ai découvert l’esprit des gazelles, cet incroyable élan de solidarité ! Si on croise sur son chemin des gazelles en difficulté, on ne se pose pas la question, on s’arrête et on leur donne un coup de main, peu importe si ça nous fait perdre du temps. Cette philosophie m’a vraiment beaucoup marquée.
Quel est votre meilleur souvenir de ces moments intenses dans le désert ?
Le meilleur moment du rallye est à coup sûr l’instant où on découvre enfin une balise à un point de contrôle. A chaque fois, c’est une joie immense ! On saute de joie et on pleure aussi, tant le parcours qu’on a dû faire pour arriver à trouver ce point était éprouvant. Sinon, j’appréciais aussi particulièrement le retour au bivouac le soir, quand on dépose nos affaires et qu’on fait le point avec l’équipe technique. C’était mon petit rituel, chaque jour : me réunir avec l’équipe de mécanos et leur raconter notre journée, les problèmes mécaniques qu’on avait pu rencontrer. C’était en somme mon moment de détente et de rigolade.
Racontez-nous votre plus mauvais souvenir…
C’était précisément à la deuxième étape. On est super contentes, on a enfin trouvé la balise et au moment de s’arrêter, j’enlève ma ceinture pour prendre un document avant de descendre et de me rendre au check point. Et là, grosse claque, on m’annonce que j’ai dix points de pénalité pour avoir roulé sans ceinture ! J’ai beau protester et expliquer que ce n’est pas le cas, sur le moment rien n’y fait. Heureusement, un autre équipage a visiblement subi la même injustice et le lendemain matin, il n’était plus question de pénalité. Mais pour moi, le mal était fait… j’avais le moral dans les chaussettes.
Le rallye, c’est aussi et surtout une aventure intérieure. Qu’avez-vous appris sur vous-même et en ressortezvous changée ?
C’est une aventure pleine d’émotions, et Dieu sait que je n’ai jamais autant ressenti de choses de ma vie. En cinq minutes, on peut passer par tous les états : la joie, le stress, la panique, l’énervement… tout arrive d’un seul coup ! Mais on en apprend beaucoup sur nous-mêmes. Je me souviens particulièrement des moments où on se retrouve bloquées dans le désert, à deux, sans personne qui passe à proximité pour nous donner un coup de main. Cela nous arrivait de pleurer un bon coup et puis de se relever, de reprendre courage et de repartir remotivées à bloc. On a appris à ne pas baisser les bras, à puiser au fond de nous-mêmes pour trouver l’énergie et le courage de continuer. Bref, on apprend à gérer les difficultés et à se gérer en situation de stress, voire de panique.