Quelques jours avant la célébration de la Journée internationale des droits de l’enfant, une campagne nationale de sensibilisation a été lancée par le ministère de la Solidarité, du Développement social, de l’Égalité et de la Famille. Objectifs ? Améliorer la prévention et la protection des enfants contre diverses formes d’abus, de violence, d’exploitation et de négligence, y compris la violence numérique. Le spot d’une durée d’un peu plus d’une minute focalise sur les dangers et les violences sexuelles qui guettent les enfants dans l’indifférence générale. Voir un jeune enfant du quartier traîner avec un inconnu, adulte de surcroît n’attire souvent pas l’attention. Une négligence qui peut coûter la vie, comme ce fut le cas en septembre dernier lorsqu’un pédophile a attiré dans ses filets l’enfant Adnane qui a été retrouvé plus tard violé et assassiné.
Trouver les mots appropriés
Évoquer le sujet de la pédophilie nécessite au préalable de parler de la sexualité. Ce sujet semble difficile à aborder par beaucoup de parents qui préfèrent donner des réponses fantaisistes lorsque l’enfant s’intéresse au sujet. Pourtant, les spécialistes conseillent d’entamer l’information sur la sexualité vers l’âge de 2 ans et demi à 3 ans. Cette phase coïncide avec le début du stade œdipien et l’émergence des désirs inconscients de l’enfant envers le parent de sexe opposé, d’où l’intérêt de l’apprentissage au cours de cette période bien précise de l’interdit de l’inceste. Le discours des parents doit ainsi être adapté à l’âge de l’enfant. Quand le petit commence à poser des questions sur la façon dont viennent les bébés, le parent devra, avec des mots clairs, expliquer la différence de sexe entre garçons et filles. Selon l’âge de l’enfant, les parents pourront répondre en choisissant les termes adéquats et en adaptant leur discours au degré de compréhension de l’enfant. Inutile aussi d’entrer dans les détails ou d’apporter des explications trop techniques. Cette question devra aussi permettre aux parents “de préciser que le fait que le papa donne la graine à la maman ne peut se faire que quand le garçon devient un homme et la fille une femme et donc des adultes”, explique Dr Houda Hjiej, pédopsychiatre. Cela va introduire naturellement l’existence de limites entre ce qui est permis et ce qui ne l’est pas. “Ceci nous amène alors à pouvoir expliquer à l’enfant que certains adultes ne respectent pas cette loi et veulent “jouer” à faire les amoureux avec des enfants plutôt qu’avec des adultes, et essayent de se retrouver seuls avec eux pour les toucher dans leur corps ou dans leur sexe”, insiste la pédopsychiatre. Les parents pourront aussi faire comprendre à l’enfant que son corps lui appartient et que personne n’a le droit d’y toucher. Ce sera une sorte d’ébauche à la prévention des abus sexuels et de la pédophilie. Entre 6 et 8 ans, l’information sera plus précise, et s’appuiera sur des événements réels. “Il est impératif de les informer de façon claire et précise sur ce qu’est la pédophilie et comment se protéger des adultes pédophiles”, insiste la pédopsychiatre.
Prévention contre les abus sexuels
Les cas de pédophilie sont légion, et les enfants, touchés dans leur intégrité physique et psychique, mettent parfois beaucoup trop de temps avant d’oser parler des sévices endurés, comme ce fut le cas tout récemment pour une dizaine de jeunes filles qui ont subi, des années durant, les agressions sexuelles du fkih d’une école coranique dans la région de Tanger. Ce n’est qu’une fois adolescentes qu’elles ont pris conscience de ces horreurs et ont dénoncé le fkih pervers. Dans ce contexte, le pédophile est un individu que l’enfant connaît, qui a de l’ascendant sur lui (fkih, instituteur, gardien d’une crèche, femme de ménage, nounou, etc.), qui peut se comporter de façon gentil avec lui, mais qui pourra lui faire mal. En effet, les pédophiles, ces êtres maléfiques qui profitent de l’innocence de petits êtres pour assouvir leurs vils instincts, peuvent se cacher sous les traits de n’importe qui. Aussi est-il important de mettre en garde son enfant, en insistant sur le fait que personne n’a le droit de toucher son corps.
Informer et prévenir
En apprenant à l’enfant les gestes inacceptables d’un adulte, le parent doit aussi conseiller à son enfant de ne jamais suivre un inconnu et de vous parler de toute rencontre avec un adulte, d’éviter de se retrouver avec un autre adulte sans votre présence et de ne pas faire confiance aux gens, y compris les amis de la famille… Ceci n’a pas pour finalité d’installer la peur de tout adulte chez l’enfant, mais plutôt de lui permettre d’être vigilant et de ne jamais se mettre en danger par ignorance du risque encouru. Dans cet ordre d’idées, les spécialistes conseillent de ne pas peindre tous les adultes sous les traits de monstres et de prédateurs afin d’éviter que l’enfant n’ait le sentiment que tout adulte est un danger potentiel. En effet, la plupart des adultes que l’enfant croisera sur sa route ne lui feront jamais de mal, mais il est important d’outiller l’enfant pour qu’il comprenne où se situe le danger, et pouvoir juger de l’attitude à adopter face à l’adulte. La prévention face à la pédophilie passe par l’information car un enfant averti ne se laissera jamais abuser.