Ministre de l’Intérieur

Bio express Najat Zarrouk est l'une des rares femmes marocaines à porter le titre de gouverneur, qui sont au nombre total dérisoire de trois, et a passé 30 ans de service au sein du ministère de l'Intérieur. Elle est actuellement directrice de la formation des cadres administratifs et techniques. Grâce à son expérience, elle a été nommée en 2009 par le secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-Moon, en tant que membre du comité des experts de l'administration publique de l'ONU. Elle est aussi membre du conseil d'administration de l'Institut pour le Leadership des Femmes Arabes.

FDM : D’abord, qu’avez-vous pensé du fait qu’on vous fasse une telle proposition ?

Najat Zarrouk : D’emblée, je l’ai trouvée insolite pour ne pas dire osée, mais lorsque je l’ai située dans son contexte, j’ai compris “la frustration” qui continue de nous secouer, nous les Marocaines et les Marocains, suite à la nomination d’une seule femme au sein du gouvernement. Et en plus, sa nomination s’est faite au niveau d’un département social alors qu’on en comptait sept auparavant dans des départements régaliens (les affaires étrangères et la coopération), des départements techniques (énergie et mines et protection de l’environnement) et des départements sociaux (famille, développement social, culture, jeunesse et sports).

En quoi le ministère de l’Intérieur est-il important ?

Le ministère de l’Intérieur est aussi important que le sont les autres départements ministériels que compte le gouvernement. Mais il a pour lui l’histoire, une culture “maison”, son maillage territorial, voire même extra-territorial, ses propres valeurs, sa discipline et ses attributions à cheval sur le maintien de l’ordre public, la protection des personnes et des biens, et la contribution à la promotion de la démocratie et des libertés individuelles et collectives. Il s’occupe notamment de l’organisation des processus électoraux, de l’accompagnement des collectivités locales ainsi que de celui du développement humain, territorial et local.

Est-ce envisageable de voir une femme ministre de l’Intérieur ?

Pourquoi pas ? Dès lors que le contexte y est favorable, qu’elle le mérite, qu’elle réponde aux pré-requis exigés par ce poste et qu’elle prouve qu’elle est digne de cette confiance et reconnaissance. Il faut préciser à cet égard que ce dont nous sommes fiers au Maroc, c’est qu’il n’y a pratiquement plus de secteur qui reste aujourd’hui le monopole des hommes. Autre considération à ne pas négliger, c’est le facteur temps. A titre anecdotique, lorsque les jeunes agents d’autorité lauréats de l’Ecole de Perfectionnement des Cadres de Kénitra étaient affectés, dans les années 70 et 80, à des  commandements ruraux ou montagneux, les notables, les citoyens, les usagers avaient du mal à les reconnaître en tant que tels. Pour eux, un agent d’autorité est une personne qui dépasse la  quarantaine, avec quelques cheveux blancs si possible. Aujourd’hui, ce n’est qu’un souvenir. De même, dans les années 1980, j’ai eu l’occasion de proposer un jour à mon patron d’intégrer cette école, il m’a répondu avec un sourire : “Toi aussi tu veux être caida ?”. Depuis ces quatre dernières années, la femme est présente dans le corps des agents d’autorité et même plus, la première promotion ayant compris que l’élément féminin avait comme major une femme ! Et la femme est gouverneur, au même titre que les hommes.

Qu’est-ce que ça changerait qu’une femme soit à la tête d’un tel département ?

Il faudrait d’abord souligner qu’au ministère de l’Intérieur, on a toujours eu l’honneur et le privilège d’avoir comme ministres de véritables leaders, qui ont laissé leur “trace”. Avoir une femme à la tête d’un tel ministère, cela permettrait peut être d’apporter une touche féminine à un département très “masculin”. J’ai en tête l’image de la ministre de la Défense de l’Espagne, enceinte, qui passe en revue des troupes militaires. C’est sensationnel ! Cela permet de rappeler aux hommes que nous les femmes, qui les portons, qui les mettons au monde, qui les allaitons et les éduquons, nous avons ce don du ciel, cette capacité et aptitude qui nous permettent d’être sur plusieurs fronts à la fois : le défi personnel, le défi familial, le défi sociétal, le défi professionnel et le défi de la responsabilité. C’est lourd à porter, certes, mais on assume la charge de ces défis avec fierté. La femme a aussi le souci du détail : dans sa manière de faire, d’agir et de gérer, elle aura tendance à penser à tout et à ne rien négliger. Elle tend à fédérer les équipes et à leur importer l’impulsion nécessaire. Elle a le sens de la perfection et surtout, elle a tendance à vouloir exceller dans tout ce qu’elle entreprend. Enfin, on s’accorde à penser, au niveau mondial, qu’elle serait “immunisée” contre les pratiques non éthiques. C’est autant de vertus qui peuvent contribuer, à mon sens, à faire progresser la bonne gouvernance, le développement et le progrès.

Avez-vous une vision particulière pour la gestion de ce ministère et quelles pourraient être vos priorités ?

J’ai servi au sein de ce ministère depuis 30 ans et je trouve qu’il a connu une évolution remarquable depuis que Sa Majesté le Roi a préconisé un nouveau concept de l’autorité en 1999, fait de modernisation de ses structures, d’écoute, d’orientation, d’ouverture sur son environnement et d’intégration de l’approche genre. A la lumière de cette évolution, j’aurais tendance à retenir cinq priorités : la coordination entre les différentes structures de ce ministère ; la valorisation et la motivation du capital humain ; l’ancrage de la non-discrimination, surtout entre les hommes et les femmes ; la déconcentration d’une bonne partie de ses attributions vers les services extérieurs ; l’ancrage d’une décentralisation basée sur les principes constitutionnels de la libre administration et de la bonne gouvernance.

Pourquoi n’avez-vous jamais pensé à intégrer un parti politique ?

Pour deux raisons principales. La première est pratiquement “génétique” : je suis la fille d’un militaire et j’ai été l’épouse d’un militaire. Mon “parti politique” à moi est et restera toujours “Dieu, la Patrie, le Roi”. L’autre raison est plutôt professionnelle et tient à ma fonction au sein du ministère de l’Intérieur et à mon statut en tant que gouverneur. Mais cette idée n’est pas complètement en dehors de mes préoccupations personnelles. Qui sait ? Un jour, lorsque ma fille pourra compter sur ellemême, lorsque j’aurai pris ma retraite, je pourrai y réfléchir. Je pourrais peut-être même créer un parti  politique où la présidente serait une femme, où les instances dirigeantes seraient paritaires et non discriminatoires, où il y aurait des valeurs démocratiques, une vision et un programme dignes d’être présentés et défendus côte à côte par les femmes et par les hommes, et surtout où toutes les causes des femmes seraient prises en compte. â–  H.D.

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