Milouda a 33 ans, mais son regard porte la fatigue de nombreuses années passées à travailler la terre. Elle vit dans la campagne reculée de Laghdira, une commune rurale de la province d’El Jadida. Ici, les horizons sont vastes, et c’est sur cette terre rude que Milouda élève ses trois enfants. Elle fait face à une réalité implacable : l’accès à l’éducation pour ses enfants, et plus largement pour ceux du milieu rural, reste un combat quotidien.
En témoigne une enquête menée par l’Observatoire national des droits de l’enfant (ONDE) et l’UNICEF en novembre 2024, à l’occasion de la Journée mondiale de l’enfant. S’agissant des défis prioritaires pour les jeunes, l’étude révèle que l’éducation, particulièrement en milieu rural, est identifié comme le défi principal par 39,5% des enfants. Ce problème est suivi par l’accès à une éducation de qualité (20,2%) et les questions de santé mentale (6,8%).
Malgré les efforts consentis par le Maroc ces dernières années et un taux de scolarisation en zones rurales en hausse, le chemin de l’école reste un défi pour de nombreux enfants dans les campagnes et montagnes reculées. Milouda, elle, a grandi dans un univers où l’école était un luxe. La scolarisation, dans sa région, n’était pas une priorité. La terre, la maison et les travaux agricoles étaient les seules choses qui comptaient.
Mais aujourd’hui, Milouda est bien décidée à changer le destin de ses enfants. “Je veux que mes enfants aient ce que je n’ai pas eu : des études. C’est le seul moyen pour eux de sortir de la misère”, affirme-t-elle avec détermination. Ses deux filles et son fils sont encore jeunes, mais Milouda sait que chaque année qui passe sans école est une occasion manquée pour eux. Le problème de l’éducation dans la région est bien connu : manque d’infrastructures scolaires, éloignement des établissements, absence de transports, et l’état des routes rend les déplacements pénibles, surtout en hiver, lorsque les pluies transforment la terre en bourbier.
L’éducation des filles
Tous les matins, dès l’aube, elle s’occupe de ses bêtes et s’assure que la maison est en ordre. Elle travaille dur, mais tout cela pour un but précis : que ses enfants puissent aller à l’école et qu’ils puissent un jour s’émanciper de cette vie de labeur. Le chemin vers l’école n’est pas facile. Son village ne dispose d’aucune école secondaire, et l’école primaire la plus proche est à plus de 10 kilomètres de chez elle. “Mes enfants se lèvent très tôt, il faut qu’ils partent à 7h du matin et faire tout le trajet à pied”, dit-elle. Le véritable obstacle, ajoute-elle, reste la mentalité des habitants du village, qui, bien que progressistes à certains égards, restent ancrés dans des traditions qui placent souvent l’éducation des filles en second plan.
Milouda se bat contre ces préjugés chaque jour. “Quand j’ai commencé à envoyer ma fille aînée à l’école, on m’a dit que c’était une perte de temps, que je ferai mieux de la marier”, explique-t-elle.
Le rêve de Milouda est de voir ses enfants, un jour, sortir de la pauvreté grâce à l’éducation. Un rêve qui ne peut se réaliser que grâce à un effort collectif. En combinant des efforts gouvernementaux, des partenariats avec des organisations non gouvernementales et une sensibilisation continue au niveau communautaire, il est possible de créer un environnement où chaque fille aura la possibilité de poursuivre son éducation et de réaliser son plein potentiel.