À armes nues contre l’exclusion

Après une carrière d'infirmière bien remplie, Saâdia est devenue assistante sociale, s’engageant depuis dans un combat sans relâche contre la misère et l'exclusion. Témoignage d'une femme qui n'a jamais cessé de tendre la main.

Lorsque Saâdia débute sa carrière comme infirmière dans un hôpital public de Rabat, elle pensait avoir trouvé sa voie. Pendant trente ans, elle soigne, panse, soulage. Mais avec le temps, elle réalise que ses gestes ne suffisent pas. “On s’occupait des corps, mais qui s’occupait des âmes ?” se demande-t-elle souvent. L’envie de faire plus la hante, jusqu’au jour où elle décide de reprendre des études. Avec un diplôme en assistance sociale en poche, elle troque sa blouse blanche pour un rôle qu’elle estime plus global, plus humain : aider ceux que la société a oubliés.

Une rencontre marquante

Saâdia se souvient encore du jour où Mohamed a franchi les portes de l’hôpital. Un homme d’une cinquantaine d’années, hagard, habillé de vêtements sales, les cheveux en désordre, une odeur persistante l’enveloppait. “On a vite compris qu’il était sans-abri depuis longtemps”, raconte-t-elle. Les médecins et les infirmiers, gênés, hésitaient à l’approcher. Ils étaient visiblement écœurés, ce qui les empêchait d’accomplir leur devoir. “Personne ne voulait le toucher. On disait que ce n’était pas notre rôle. Pourtant, c’était bien leur mission de soigner tout un chacun, sans jugement”, ajoute-t-elle. 

Alors Saâdia agit. Elle contacte un ami, propriétaire d’un hammam, et le convainc de l’accueillir gratuitement. Pendant que Mohamed retrouve un semblant de dignité sous l’eau chaude, elle lui achète des vêtements propres et l’emmène chez un coiffeur. Lorsqu’il se voit dans le miroir, il fond en larmes. “Il avait oublié à quoi il ressemblait.” Peu à peu, elle découvre son histoire : ancien ouvrier, licencié, rejeté par sa famille, englouti par la rue. “Il n’était pas perdu, juste invisible”, raconte Saâdia. 

Elle ne s’arrête pas aux portes de l’hôpital. Son véritable combat commence dans les bidonvilles et les villages reculés qu’elle visite quotidiennement, tendant une oreille attentive. Elle frappe aux portes, parfois même tard le soir, sans crainte pour sa sécurité. “Une fois, j’ai trouvé une femme seule, enceinte de huit mois, qui n’avait jamais consulté de médecin. Elle était terrorisée à l’idée d’aller à l’hôpital, pensant qu’on allait lui prendre son enfant.” Elle l’accompagne, la rassure, la soutient. “J’étais chez elle quand elle a perdu les eaux, elle ne voulait pas aller à l’hôpital. Je suis restée à ses côtés jusqu’à la délivrance vers 4h du matin. Quand j’ai vu son bébé en bonne santé, j’ai su que j’étais au bon endroit.”

“Si je ne le fais pas, qui le fera ?”

Aujourd’hui, Saâdia a passé la soixantaine, mais elle n’a rien perdu de son énergie. “Je ne peux pas m’arrêter. Ce n’est pas un travail, c’est ma mission de vie.” Elle continue d’intervenir dans les hôpitaux, les associations, d’organiser des collectes, de donner des cours aux jeunes assistants sociaux. Mais son quotidien reste semé d’embûches : les démarches administratives interminables, le manque de moyens, le regard parfois condescendant de ceux qui pensent qu’aider les autres est une utopie. “Certains jours, je me dis que je suis fatiguée. Que personne ne se soucie vraiment des plus démunis. Mais alors je me souviens de Mohamed, de cette femme enceinte, de tous ceux que j’ai croisés. Et je repars.” Elle sourit, puis ajoute : “Je ne suis pas une héroïne. Je suis juste une femme qui refuse de détourner le regard.” F

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