C’est le stress de chaque parent : que faire si son enfant ne trouve pas sa place à l’école et/ou auprès de ses petits camarades ? Car l’enfance, bel âge mais aussi terrible, est un stade crucial dans la construction de sa personnalité. “L’école d’aujourd’hui a la possibilité d’humaniser davantage le lien éducatif pour favoriser et soutenir l’épanouissement de l’enfant ainsi que son développement”, met en avant Kenza Jai Hokimi, psychothérapeute spécialiste dans le développement de l’enfant, de l’adolescent et de la famille. Toutefois, l’enseignement qui y est prodigué ne va pas dans ce sens, laissant les professeurs camper sur leurs positions d’antan. “Le vieux modèle de la salle de classe ne correspond plus aux besoins des enfants”, appuie-t-elle. “Chaque jour, le décalage entre ce qui est enseigné aux enfants et ce qu’ils ont besoin d’apprendre s’accentue”, alerte-t-elle, avant de pointer du doigt qu’“il n’y a toujours pas de dimension affective appuyée dans la formation des professeurs”. Aussi, pour cette spécialiste, les parents et les enseignants ne doivent pas être des “adversaires”, mais, au contraire, des “partenaires”, dans leur processus d’épanouissement formant un tandem solide pour soutenir l’enfant face aux grands changements vécus…
Des débuts à l’école pas toujours évidents
L’entrée à la crèche ou à la maternelle marque le début de la grande aventure scolaire pour son enfant. Aussi, est-il important qu’il vive au mieux cette transition. “Une période d’adaptation est essentielle, appuie Zineb Id Addi, psychologue et psychothérapeute de l’enfant, de l’adolescent et de l’adulte. Toutes les crèches ne le proposent pas alors qu’elle est fondamentale. Car un enfant peut mal vivre la séparation avec ses parents si elle n’est pas préparée progressivement.” Même si la capacité à dépasser un tel évènement est variable d’un tout-petit à un autre, il est indispensable de le sécuriser en lui expliquant tout bonnement la situation avec un vocabulaire adapté, tout en l’aidant à verbaliser ses craintes et émotions. “Si ce travail n’est pas réalisé, il est possible que l’enfant développe un sentiment d’abandon qui perdurera dans le temps”, prévient l’experte. Pour Kenza Jai Hokimi, il faut aussi transmettre à l’enfant le plaisir d’apprendre pour qu’il puisse s’épanouir, et ainsi, trouver sa place. “Par exemple, vous pouvez lui proposer des jeux comme un alphabet avec des lettres majuscules qui s’encastrent dans les grandes pièces du puzzle, lui insufflant ainsi les prémices d’un amour durable pour la lecture”, enchaîne-t-elle, évoquant, dans la foulée, la méthode Montessori. Élaborée au début du XXème siècle par la pédagogue engagée Maria Montessori, cette pédagogie alternative et révolutionnaire est basée sur la liberté de l’enfant dans le choix de ses activités, lui permettant de devenir acteur de son apprentissage, et l’adulte son accompagnateur. Les avantages ? Le rendre, dès son plus jeune âge, le plus autonome possible, éveiller sa créativité et booster sa confiance en soi. “Maria Montessori qualifiait l’esprit d’un enfant (0-6 ans) d’“Esprit Absorbant” puisqu’il fonctionne comme une éponge c’est-à-dire il absorbe, sans distinction et sans jugement, toutes les propositions de son environnement”, développe la spécialiste, rappelant aussi aux parents qu’ils doivent donner l’exemple : “Pour stimuler la soif d’apprendre, notre enfant doit nous voir feuilleter un livre et non pas surfer sur notre portable”.
L’école, source possible de souffrance
Stress, fatigue, troubles de l’apprentissage ou manque de confiance en soi,… Les blocages à l’école, que ce soit au primaire ou au collège, sont nombreux. Aussi, avant de s’alarmer, essayez d’identifier le problème, en échangeant tout simplement avec votre enfant : est-il perturbé par les notes ? Ressent-il de la pression de votre part ? La pandémie de Covid-19 l’a-t-elle impacté et de quelle manière ? A-t-il de bons rapports avec ses camarades ? “Un enfant qui a souvent de mauvaises notes, cela ne signifie pas forcément qu’il manque de volonté ou de compétence mais il faut envisager la possibilité qu’il soit en difficulté d’apprentissage ou qu’il souffre d’un trouble qui le met en difficulté, signale Zineb Id Addi. Certains enfants sont incompris alors qu’ils essaient de faire de leur mieux mais ils n’y arrivent pas.” Et de poursuivre : “N’hésitez pas à en discuter avec son professeur, ou avec le psychologue de l’école s’il y en a un, ou à consulter un spécialiste hors de l’établissement.” Mais pour elle, il ne faut surtout pas se focaliser sur les notes, et ainsi, “conditionner” son amour en fonction des résultats scolaires. En d’autres termes, il faut éviter que l’exigence de la réussite scolaire, obsession numéro un des parents, ait une incidence négative sur la relation affective avec leurs enfants. “On doit nourrir son estime de soi, soutient Kenza Jai Hokimi, Aussi, on n’aide pas son enfant si à la moindre bêtise ou mauvaise note, on lui fait une remarque. Mieux vaut l’encourager !” Dans le même sens, on ne force pas son enfant à faire quelque chose qu’il n’est pas encore capable de réussir, mais on l’aide plutôt chaque fois à aller toujours un peu plus loin. Et d’insister : “Tendez la main à votre enfant, dites-lui que vous l’avez compris et que vous acceptez qui il est, et qu’ensemble, vous allez évoluer et travailler sur ses lacunes.” L’engagement des parents est ainsi un élément clé dans la motivation et la détermination de son enfant à trouver ses repères à l’école.
Harcèlement scolaire, une réalité à prendre au sérieux
Pour donner un nouveau départ à son enfant harcelé, certains parents optent pour le changement d’établissement. Bonne ou mauvaise solution ? “Il est indispensable de comprendre déjà pourquoi il a été harcelé”, interpelle Kenza Jai Hokimi. Pour rappel, ce phénomène touche 32 % des élèves à travers le monde, soit quasiment un élève sur trois, d’après un rapport de l’UNESCO en 2019 intitulé “Au-delà des chiffres : en finir avec la violence et le harcèlement à l’école”. Pire encore, depuis le déclenchement de la pandémie de Covid-19, le mal-être des jeunes a explosé. Au Maroc, la helpline Stop Silence de l’association Sourire de Reda a notamment enregistré un taux d’appels 78% supérieur entre janvier et juin 2020, par rapport à la même période de l’année 2019, avec un pic de 92 % entre mars et juin, qui correspond au début du confinement. “Mais si son enfant change d’établissement pour cette raison, il faut impérativement poursuivre le travail déjà réalisé jusqu’à présent, avec la nouvelle équipe scolaire qui va l’entourer”, poursuit-elle. Un avis partagé par Zineb Id Addi qui martèle que la communication, difficile à instaurer dans ce cas-là, doit impérativement être conservée.
Pour cette spécialiste, il ne faut pas hésiter également à pousser son enfant à faire des activités comme du sport. “Petit à petit, cela va l’aider à acquérir de la confiance en lui”, assure-t-elle. Quant à sa vie sur les réseaux sociaux, il faut attendre le “plus tard possible” avant de lui donner le portable. La toile conserve tous nos malheurs… Aussi, il est primordial de le sensibiliser à cet outil, lui expliquant notamment, que “si l’on est harcelé en ligne, il peut être pertinent de supprimer certaines applications ou de ne plus se connecter pendant un laps de temps qui permet de récupérer”, comme l’indique l’Unicef dans l’une de ses publications. Autres conseils de l’antenne onusienne à rapporter à son enfant : “On peut décider à qui son profil est accessible, qui peut envoyer des messages ou commenter un post (…) On peut (aussi) signaler des commentaires, des messages et des photos déplacés et demander leur suppression”, sans oublier de le rassurer, en lui affirmant que “sur la plupart des réseaux sociaux, aucune notification n’est envoyée à une personne que l’on bloque ou que l’on signale”.