Le projet de réforme du Code de la Famille, soumis au Roi Mohammed VI, que Dieu l’Assiste, marque un tournant décisif dans l’évolution de la législation familiale au Maroc. Ce processus réformiste, initié par le Souverain dans un esprit de modernisation et d’équité, a franchi une nouvelle étape dans son aboutissement avec la saisine du Conseil des Oulémas. Ce dernier, en tant qu’organe consultatif de référence en matière de jurisprudence islamique, se voit confier une responsabilité capitale : offrir une lecture éclairée et autorisée du projet de réforme.
La Moudawana, depuis sa dernière révision en 2004, a été un levier essentiel dans l’évolution positive des droits des femmes au Maroc. Mais après 20 années de pratique, les limites sont constatées appelant à des avancées plus poussées.
Quand il s’agit de réformes touchant le Code de la famille, de nombreuses questions sont souvent exclues du débat, car elles se frottent à la rigidité, principalement, sous le couvert de limites religieuses. Le rôle du Conseil des Oulémas est, dans ce contexte, plus crucial que jamais. En effet, sa capacité à aborder ces sujets sensibles avec courage et ouverture d’esprit déterminera la portée et l’impact des réformes proposées.
Sa Majesté le Roi Mohammed VI a formellement souligné l’importance de l’adaptation de la législation aux exigences de justice sociale tout en respectant les fondamentaux religieux. Le Souverain a exprimé un appel clair à une réforme qui harmonise les valeurs traditionnelles avec les aspirations modernes d’équité et d’égalité. C’est dans cet esprit que le Conseil des Oulémas est invité à examiner le projet de réforme avec une démarche rigoureuse et une perspective équilibrée. Le Conseil des Oulémas, par la force de la constitution, est la seule instance habilitée à prononcer les Fatwas officiellement agréées. Il est aussi en cela, le seul détenteur de l’aptitude et de l’autorité légitime susceptible de couper court aux surenchères et résistances systématiques, en faveur d’une approche construite et fondée.
Des domaines comme l’héritage ou l’établissement de la filiation, pour ne citer que ceux-là, sont des territoires de réforme où les ajustements pourraient être significatifs. Leurs contours, souvent vus à travers le prisme des règles traditionnelles, pourraient bénéficier d’une réflexion approfondie pour mieux refléter les réalités contemporaines tout en respectant les préceptes de la religion. Le Conseil des Oulémas, par son expertise, est appelé à proposer des solutions qui pourraient concilier ces deux dimensions.
Le rôle du Conseil des Oulémas ne se limite pas à une simple approbation ou réprobation. Il doit également être un acteur de changement, capable de questionner des postulats parfois dogmatisés et d’adopter une approche plus souple et réfléchie pour faire avancer les réformes.
L’audace dont il fera preuve pour traiter ces sujets délicats sera déterminante pour la portée des changements apportés à la Moudawana. N’oublions pas que les percepts religieux et leurs interprétations ont toujours été fondamentalement liés au principe de l’Ijtihad ; et qu’au-delà de la loi, il y a l’essence de la loi. Dans la terminologie religieuse on parle de la Chariaa et de “Maqassid Chariaa”, soit les “intentions de la Chariia”. Des outils et des nuances qui ont toujours été mis au service d’une interprétation éclairée et évolutive des grands principes religieux et dont il est essentiel de se saisir aujourd’hui, loin de toute prudence ou conformisme passifs.
La réforme de la Moudawana est une opportunité historique pour le Maroc, une chance de réconcilier tradition et modernité, et de poser les bases d’une législation familiale plus équitable et adaptée aux besoins de notre époque. L’attente est grande, et les espoirs le sont tout autant.
La saisine du Conseil des Oulémas par le Roi Mohammed VI constitue un moment clé dans le processus de réforme de la Moudawana. C’est un appel à la responsabilité, à l’ouverture d’esprit et au courage, pour faire évoluer le Code de la Famille de manière équilibrée et éclairée. Le chemin de la réforme est semé de défis, mais il est aussi porteur de promesses pour l’avenir du Maroc.